Algérie

"Tout dépendra des mécanismes adoptés"




L'Etat mettra-t-il fin au monopole d'Algérie Télécom sur le téléphone fixe et Internet ' Cette éventualité a été soulevée par la ministre des PTIC. Des experts en parlent.Depuis l'annonce faite par la ministre de la Poste et des Technologies de l'information et de la communication (PTIC), Imane Houda Feraoun, sur l'éventualité de mettre fin au monopole d'Algérie Télécom sur le téléphone fixe et Internet, le "petit" monde des télécoms est en ébullition. En effet, cette annonce, si elle venait à se concrétiser par son insertion dans le futur code des postes et des communications électroniques (CPCE), va sans doute bouleverser le secteur des TIC. Dans le but d'en savoir davantage, nous avons sollicité des experts dans le domaine, afin d'apporter leur éclairage sur le sujet et tenter de démêler le vrai du simple effet d'annonce."Les nouveaux opérateurs seront otages d'AT"Pour Younès Grar, expert dans les TIC, cette annonce n'en est pas vraiment une. "Algérie Télécom a perdu le monopole, du moins dans le domaine du fixe, en 2003. Certains se rappellent de l'opérateur Lacom et son échec retentissant", dira-t-il d'emblée. Et de poursuivre, en rappelant qu'à l'époque, il existait déjà une centaine de prestataires de services Internet (ISP) et qui ont été tous "laminés" par Algérie Télécom. "Lors de la promulgation la loi 2000-03, l'Etat avait ouvert le secteur de la téléphone fixe aux opérateurs, mais ils ont été laminés par le rouleau compresseur d'Algérie Télécom", rappelle-t-il.Pour notre interlocuteur, l'ancienne ministre des PTIC, Mme Zohra Derdouri, avait évoqué, en 2014, la possibilité de mettre fin au monopole d'AT. Une proposition qui n'a jamais été mise en ?uvre. Younès Grar n'a pas caché son scepticisme quant à l'éventualité d'ouvrir le secteur à la concurrence. "C'est bien beau de parler de mette fin à ce monopole, mais la véritable question reste comment y parvenir '", s'est-il interrogé. Et d'enchaîner : "Je pense que si cette annonce devait se concrétiser, les opérateurs concurrents n'auraient d'autre choix que de passer par le réseau d'AT, afin de se déployer, pour la simple raison qu'il est extrêmement onéreux d'édifier un réseau propre à eux", a-t-il expliqué. "On aura certainement un système de sous-location du réseau et le tout reste à savoir comment il va être partagé et dans quelles proportions. Une chose est certaine, les éventuels opérateurs seront otages d'Algérie Télécom et de son infrastructure", notera Younès Grar. Et d'assener : "D'ailleurs, toute l'Algérie est otage de cette entreprise aux allures de gigantesque administration."De son point de vue, pour que la fin du monopole d'AT soit effective, il faudrait que l'Etat accorde des facilitations aux éventuels opérateurs dans le but de construire leur réseau et ne plus être dépendants de l'opérateur historique. "Par exemple, il faudrait réfléchir à la mise en place d'un système de dégroupage des lignes fixes et déterminer les conditions relatives à l'interconnexion des réseaux et services de télécommunications ouverts au public."Free avait tout compris... Roslane Bencharif, expert et consultant international en nouvelles technologies, s'est, quant à lui, montré moins catégorique sur le sujet. Pour lui, s'il devait y avoir une ouverture, elle devrait irrémédiablement passer par la mutualisation du réseau. Cette opération est définie par M. Bencherif ainsi : "La mutualisation des réseaux a deux objectifs : partager un matériel existant et/ou partager le coût d'achat d'un matériel et assurer une couverture optimale. Elle peut également toucher autant des éléments d'un réseau fixe ou d'un réseau mobile, tel que des antennes-relais", a-t-il expliqué.Ce consultant citera l'exemple de l'opérateur français Free, lequel, selon M. Bencherif, a démarré avec cette opération de mutualisation du réseau d'Orange (ex-France Télécom). "Aujourd'hui, Free possède sa propre architecture de réseau et il concurrence Orange sur tous les plans." Autre changement qui pourrait intervenir si l'Etat décide de mette fin au monopole d'AT, selon notre expert, est la disparition totale du réseau cuivre et la généralisation de la fibre optique."Avec l'arrivée de nouveaux acteurs dans le domaine du fixe et l'internet, on va sans douter aller vers la généralisation de la fibre optique et la disparition du réseau filaire actuel, ce qui va engendrer une meilleure qualité de service", précisera M. Bencherif. Interrogé à propos de l'échec de Lacom, notre vis-à-vis a nuancé quelque peu cette comparaison. "Lacom était un opérateur de WLL (Wireless Local Loop, ndlr) et à l'époque, le débit offert par cette technologie était dérisoire. Si on veut faire une comparaison, je préfère l'établir avec l'opérateur Eepad, qui avait connu un succès retentissant auprès des consommateurs, avant qu'il ne soit brisé." Concernant les incidences inhérentes à l'éventuelle ouverture du secteur, M. Bencherif notera "la baisse significative" des prix par rapport à ceux pratiqués par Algérie Télécom, ce qui va permettre aussi de booster l'économie nationale. "Vous ne pouvez pas imaginer combien coûtent les abonnements professionnels chez Algérie Télécom. Avec l'arrivée de nouveaux opérateurs, on peut envisager une meilleure qualité pour des prix raisonnables, notamment pour les clients business", a-t-il conclu.RAMDANE BOURAHLA


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