Tous logés à la même enseigne

Il est tout de même inconcevable que la puissance humaine permette aux êtres pensants de se promener sur la Lune et ne soit pas capable de leur dispenser à tous de quoi se nourrir. D'un côté, l'intelligence et le génie des hommes les autorisent à assurer leurs pas sur une planète lointaine quand d'un autre ils perdent pied sur la Terre. Ils réussissent à planter un drapeau sur un astre inconnu mais ils n'arrivent pas à disposer d'un plat garni sur une table de leur cuisine. Le maléfice est flagrant pour que l'esprit et la raison se perdent dans de profonds questionnements sur l'existence et sur la nature humaine.Plus de trois milliards de personnes dans le monde vivent avec moins de deux dollars par jour. Plus de deux milliards n'ont pas accès à l'eau. Des officines officielles et sérieuses se targuent d'affirmer pour s'accorder avec une bonne conscience que la pauvreté a reculé en braquant le regard sur des contrées réputées déshéritées. Les données ont fini par changer et le comble actuel est que la plupart des sociétés supposées encore solidement debout ont été elles aussi gagnées par la misère. Adossées à leurs centaines de milliardaires, elles n'abritent plus en silence leurs couches sociales dans un besoin flagrant de moyens de subsistance. L'immense anomalie du présent prouve que malgré son génie, l'homme s'évertue à ne pas accorder ses pas. En mesure de vaincre l'impossible en perçant les grandes énigmes de la nature, de la conquête de la Lune à la découverte des secrets de la médecine, il se déclare en tout lieu inapte à trouver un remède à l'errance et à la famine.
Des millions d'Anglais, de Canadiens, de Français, d'Américains et d'autres encore, hier encore tapis au c?ur de sociétés cossues se surprennent dans un besoin identique à celui des Ethiopiens ou des Nigérians le dos courbé dans le désert par la soif et la désespérance.
L'énorme déphasage grandissant entre l'intelligence humaine, ses capacités incommensurables avec le lot des guerres et des conflits ne trouve pas de nom ni de justes explications sinon que les hommes ont quelque chose de démentiel en eux.
Pourtant avec des têtes aussi riches et aussi pleines, les gamelles et les ventres ne devraient pas sonner creux.