«Rien ne sert de
courir, il faut partir à point». La Fontaine
Tout a été dit
sur les attentes des citoyens, sur les espérances formulées par ceux qui ont
accès aux journaux privés dans lesquels des élites algériennes, toutes
disciplines confondues, avancent des analyses très souvent pertinentes sur la
sociologie, les médias, la finance et l'économie, l'UE, l'UPM, le Maghreb,
l'entreprise et la gouvernance du pays d'une manière générale ou par secteur.
Le constat
premier est que le pays dispose de beaucoup d'expertises et de matière grise à
l'intérieur et à l'extérieur, reconnues à travers le monde. La seule question
déterminante est de savoir comment et par quels mécanismes mobiliser ces
énergies créatrices, les rassembler, les motiver dans tous les sens du terme
pour constituer un front national qui transcenderait les clivages politiques
pour servir les intérêts stratégiques de l'Algérie.
Si la chose est
complexe, elle est cependant réalisable, comme l'ont fait l'Inde et la Chine où
un grand nombre de chercheurs et de managers sont rentrés chez eux dans des
conditions identiques à celles d'homologues occidentaux. Mais avant, il est
essentiel de garder les cadres qui activent ici, dont beaucoup seraient prêts
pour partir ailleurs, à la moindre opportunité, pour n'importe quelle
destination.
Si la diaspora,
les phénomènes migratoires, les mixités à travers les capitaux, les mariages,
la circulation des idées sont d'un âge très avancé et ne sont pas propres à
l'Algérie, leur analyse et leur intégration ne semblent pas importantes pour
les gouvernants algériens. Ces thèmes sont régulièrement utilisés comme des
éléments décoratifs dans des discours, des thèmes de campagnes électorales. Il
y a même un ministère, désigné par des jeunes comme celui de la «Sadaka», qui
est censé penser, concevoir et publier des plans et des stratégies (en
association avec d'autres ministères, des entreprises publiques et privées, des
centres de recherche, des syndicats et associations d'artistes, de
chercheurs...) pour générer des retours au pays, des aller-retour, une
rentabilité à distance, l'implantation de formations sur des courtes, moyennes
et longues durées, un brassage en continuité. Or, le ministère en question ne
génère que des dépenses improvisées, des blagues de potaches, sinon l'embarras
et l'étonnement de compagnies d'aviation (entreprises commerciales) qui se
voient «ordonner» de faire des réductions à des catégories de passagers après
avoir vérifié leur revenu. Ah, le contrôle et la vérification hérités de la SM
et du parti unique ! Comment créer dans la réflexion et l'action planifiées des
pôles de compétitivité en associant les élites expatriées et celles qui sont
restées au pays pour mieux les dissuader de partir ? Tel est l'enjeu qui
caractérise aussi des gouvernances dans de grands pays hyper développés mais
qui investissent lourdement (privé/public) dans la recherche, les industries
culturelles, l'innovation technologique, les énergies vertes, la médecine et
les transports de pointe.
De toutes les
façons, le troisième mandat de M. Bouteflika, selon ses principaux soutiens
dans les appareils partisans, devrait être celui du «parachèvement des
programmes» initiés depuis sa première élection et la mise sur rails d'annonces
faites pendant la dernière campagne et après la reconduction du gouvernement de
M. Ouyahia. Le logement, l'emploi, les industries culturelles et,
éventuellement, certains réaménagements institutionnels (l'avenir de l'APN
actuelle, possible remaniement ministériel à la rentrée, initiatives autour de
l'anémique audiovisuel et d'un cinéma moribond qui affiche des films faits avec
l'argent des autres, mise en ordre de la gabegie publicitaire où la
politisation outrancière met aux orties les normes éthiques, universelles, en
offrant l'horrible visage d'un informel qui brasse milliards, opportunismes
conjoncturels, fausses annonces, etc. Et il serait temps que le patriotisme
économique touche aussi les rentes que produit la communication sur tous les
supports, dominée par des aventuriers étrangers qui savent comment ouvrir des
portes fermées aux nationaux.
Parallèlement,
l'hypothèse d'un tourisme de masse national et à l'international est chaque
jour remise aux calendes grecques par l'orchestration à l'échelle nationale
d'une série de mesures dont l'objectif premier est en voie d'être atteint.
L'idéal pour certains courants archaïques, franchement intégristes, serait
l'érection d'une muraille pour «protéger» la société d'une contamination impure
propagée par l'occident mécréant à travers un tourisme de grande envergure qui
verrait chaque année des millions d'étrangers croyants, laïcs on athées,
altérer notre pureté originelle. La fermeture de bars, de restaurants, de
commerces de boissons alcoolisées, de kiosques à tabac, est donc considérée par
de grands et géniaux planificateurs comme la démarche essentielle pour une
fermeture des frontières devant les agressions extérieures.
Or, en matière de
prohibition, la grande Amérique a tenté l'expérience il y a bien longtemps,
suivie par des velléitaires dès les premiers jours de notre indépendance politique.
Les résultats sont connus dans les passés américain et algérien. La fabrication
d'alcools artisanaux, qui sont d'énormes dangers pour la santé publique, les
trafics aux frontières, l'organisation scientifique d'une contrebande juteuse,
loin de l'impôt et du contrôle sanitaire des produits, caractérisent toutes les
prohibitions et l'intrusion du religieux dans le fonctionnement et l'ancrage
des libertés individuelles garanties, théoriquement, par les Constitutions.
Et toute
l'histoire des sociétés humaines en témoigne. Il serait plus simple, plus
efficace de supprimer le ministère du Tourisme, ce qui serait un message clair
et honnête adressé à tous les étrangers qui seraient tentés d'investir et de
visiter un pays que la nature a pourvu de tous les atouts pour devenir en
Méditerranée une destination aussi prisée que la Turquie, l'Espagne ou
l'Italie. Sans parler de la Tunisie, pays musulman qui chouchoute les touristes
algériens qui, chaque année, s'y rendent en masse et en famille. Ce qui n'est pas
évident chez eux.
Les chantiers
d'avenir, porteurs et pleins de promesses, sont innombrables en Algérie. Mais
faire la chasse aux couples d'amoureux et aux amateurs de vin apparaît
stratégique pour les Torquemada locaux.
Posté Le : 18/06/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : Abdou B
Source : www.lequotidien-oran.com