Algérie

Tourisme, corruption et bureaucratie



Contrairement au Maroc et à la Tunisie, le secteur du tourisme en Algérie trouve du mal à attirer les investisseurs et à concrétiser ses objectifs sur le terrain.

Pourtant, les lois pour la promotion du tourisme ne manquent pas et les potentialités en matière de tourisme non plus. C’est ce qui ressort de la rencontre qui a réuni hier des professionnels du tourisme et des professeurs d’université au siège de l’Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA) autour des problèmes et des perspectives du secteur du tourisme. L’économiste et professeur de l’université d’Alger, Hachmaoui Mohamed, s’est montré très sceptique quant à l’avenir du secteur du tourisme. Chiffres à l’appui, il démontre que le secteur du tourisme algérien est bien loin de celui tunisien ou marocain. Pourtant, l’Algérie a des potentialités culturelles et géographiques qui dépassent de loin ceux de la Tunisie et du Maroc. M. Hachmaoui a fait une petite comparaison en indiquant que les Marocains attirent plus de 5 millions de touristes et les Tunisiens 4 millions, au moment où l’Algérie arrive à peine à frôler la barre des 820.000 touristes. Pour ce qui est des revenus en matière de tourisme, l’Algérie engrange 133 millions de dollars, alors que nos voisins tunisiens et marocains sont arrivés à enregistrer 4 à 6 milliards de dollars. Idem pour l’emploi, les Marocains emploient 620.000 personnes dans le secteur touristique, les Tunisiens 334.000 et l’Algérie à peine 15.000. M. Hachmaoui explique que ce retard est l’une des conséquences des années de terrorisme, sans omettre de relever l’absence d’une stratégie continue en la matière. « Chaque ministre arrive avec une nouvelle stratégie qui divorce avec la stratégie précédente, raison pour laquelle les projets touristiques n’arrivent toujours pas au bout de leur chemin », dira le professeur, en appelant les pouvoirs publics à trancher et à comprendre que les politiques changent mais les stratégies doivent se développer d’une façon horizontale pour qu’elles atteignent leurs objectifs. Recourant à des exemples, l’orateur indique que l’Etat n’arrive toujours pas, et ce depuis 1998, à aménager les 194 zones touristiques délimitées. Sur ces zones, 22 seulement ont été récupérées et aménagées. Le reste est confronté à des problèmes de foncier, les terres appartenant soit au privé soit aux collectivités locales, et faute aussi de financement des grands projets d’aménagement des zones touristiques. « Pour la simple raison que nous n’avons pas une banque spécialisée dans le développement du tourisme, comme ça se fait ailleurs », précise-t-il. Et d’ajouter que « la corruption et la bureaucratie sont aussi un facteur qui bloque souvent les projets d’investissement en matière de tourisme, et font même fuir les investisseurs ». M. Hachmaoui a évoqué le cas d’un groupe des Emirats Arabes Unis qui comptait investir 8 milliards de dollars en Algérie dans des projets touristiques; mais compte tenu des lenteurs administratives dans le traitement des dossiers, l’investissement a été détourné vers la Tunisie et le Maroc. Le problème du déficit en matière de personnel qualifié a été aussi évoqué. « 90% du personnel du secteur du tourisme n’est pas formé », déclare M. Hachmaoui, qui précise qu’il n’y a actuellement que deux écoles, l’une à Tizi Ouzou et l’autre à Boussâada, qui assurent des formations pour 900 candidats. Enfin, les opérateurs ont accusé les directions du tourisme et des responsables de faire dans le favoritisme au détriment du professionnalisme. « Ils donnent des projets d’investissement dans le domaine du tourisme à des gens qu’ils connaissent, sans se soucier s’ils s’agit de professionnels ou pas ». Les invités à cette rencontre se sont mis d’accord sur la nécessité de créer une association des opérateurs du tourisme, une association porteuse d’idées qui pourra créer la valeur ajoutée.




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