Algérie

Tlemcen : Taleb Bendiab Djelloul, un des derniers artisans tailleurs, n'est plus


La corporation des tailleurs, plutôt des maîtres tailleurs, a perdu jeudi dernier l'un des derniers sanaâ (maître) de cette profession très respectée où le nouveau marié était obligé de commander son smoking noir à l'avenue chez son tailleur préféré. Hadj Djelloul a fait partie de l'équipe de tailleurs qui confectionnaient les plus beaux costumes vendus en Oranie et même au Maroc dans l'atelier de la rue Idriss dont le mâalem (patron) était Bouayed Sid'Ahmed dit Sti.

Avant sa mort, j'ai évoqué avec Si Djelloul (1922 - 25/6/2008), décédé à l'âge de 86 ans, les belles années où le maître tailleur était considéré comme un artiste dans la cité des Zianides, l'équipe Bouayed Ahmed avec le défunt Taleb Bendiab Djelloul, Ghouti Sari, Ahmed, le chef d'atelier «Jojo», l'ambiance qui y régnait dans cette cave de la rue Idriss aménagée en atelier de couture. Cette profession de tailleur, comme celle de tous les artisans, a perdu son lustre au profit des importations de costumes prêts-à-porter qui ont «tué» ce noble métier où nos anciens tailleurs concurrençaient ceux de Marseille et même de Paris. Je citerai quelques exemples ou «modèles» par respect pour cette profession qui a besoin de beaucoup de doigté et de sanâa (métier): maître Hadj Abdelkrim Tabet Aoul d'El Medress, spécialiste de la makfoula et pantalon bouffon (sarwel arbi) datant de l'époque turque avec ses histoires et ses blagues légendaires, maître Ouali Ghouti (rue de l'Indépendance), connu à travers toute l'Algérie et à l'étranger, maître Diabi, maître Boukli Hacène, maître Chaoui Djamel, maître Bouhamed, maître Dali Yoycef, Ghaffour de Ghazaouet (qui m'a «coupé» mes premiers costumes d'instituteur) et d'autres artistes que j'ai peut-être oubliés.

La génération des artisans tailleurs, cordonniers, balaghdjias, tisserands, dinandiers, brodeurs, bijoutiers, fabricants d'instruments de musique (oud, kouitra, rbeb), maroquinerie, sellerie, sculpture du bois, travail de la corne, ferronnerie, mdels (chapeaux à larges bords), calligraphes, marbriers... qui s'en va, laissant un grand vide qu'il est difficile de combler. Le cimetière de Sidi Senoussi accueille chaque jour «un livre de bibliothèque» qu'on enterre. Essayons de récolter auprès des «artistes vivants» les fruits de ce qu'ils ont semé au moins pour la mémoire.




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