Il y a à peine deux ou trois décennies, Tlemcen s'enorgueillissait de ces petites médinas implantées un peu partout dans la ville et qui faisaient son identité. Il n'en est plus le cas, maintenant. Surtout dans la vieille médina de R'Hiba où personne ne s'occupe plus de ce qui se passe derrière les murs de sa maison. D'ailleurs, les grandes familles qui composaient R'Hiba ont disparu de ces petites venelles, des derbs où ne restent parfois que des ruines ou des maisons qui menacent de s'écouler.
On ne voit plus, à l'orée de chaque saison ou à l'approche du Ramadhan, les habitants s'occuper de cadre bâti à la blancheur immaculée. On ne se réfugie plus que dans l'évocation de souvenirs, pour les moins jeunes, inoubliables, du temps où les femmes, à la tombée du jour, à la veille de chaque maoussem, venaient allumer des bougies dans le mausolée de Sidi El-Mazouni. On disait qu'il avait certains effets sur la stérilité des femmes. Une tradition qui se perd, tant est-il que le mausolée est invisible sur la placette de R'Hiba tellement encombrée par les taxis clandestins. Rien n'est plus infernal pour les habitants et dangereux pour les enfants qui ne trouvent plus d'espace pour jouer que la ritournelle incessante de ces vieux véhicules, bruyants et polluants.
Une placette mythique, avec son four banal, le dernier four banal centenaire, pourtant située en plein centre-ville et qui se clochardise de plus en plus. C'est déjà la désolation pour le flot de visiteurs quotidien qui a emprunté le car pour se rendre à Tlemcen.
Des cafés ont élus domicile à la hâte sur la placette et se sont agrandis sans aucun contrôle, allant à se transformer en gargote perdant leurs eaux usées à même le sol, parfois dans une seguia creusée à même le goudron souillant les trottoirs squattés par des dizaines de commerces, et dégageant des odeurs nauséabondes qui incommodent les riverains. Le soir, le spectacle est des plus affligeants: dépotoirs à ciel ouvert, véritable fief pour tous les animaux à quatre pattes, eaux stagnantes, amoncellement de restes de bâti.
Une réalité qui ne semble pas être vue par les élus locaux mais dont les habitants font des rapports chaque jour. Une réalité qui est, peut-être, dissimulée à la vue des responsables par les platanes séculaires qui laissent propager leur ombre à longueur de journée mais dont personne ne profite.
Pourtant, R'hiba est un exemple d'architecture traditionnelle avec ses arcs qui ont un grand sens dans la vie des médinas, ses vieilles maisons à patio ouvert sur un citronnier qui abrite, entre autres, la maison natale des Messali Hadj, des Hamidou, le premier bureau de presse de Tlemcen mais aussi des meutes de chiens, des clochards qui ne trouvent pas mieux que de terminer leur beuverie dans les derbs, des S.D.F.... Rien n'a été fait cependant sauf, bien entendu, à l'approche d'une visite officielle ou présidentielle. Mais ça, tout le monde le sait.
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Posté Le : 27/07/2008
Posté par : sofiane
Ecrit par : Belbachir Djelloul
Source : www.lequotidien-oran.com