Tlemcen - Sidi El Haloui

Tlemcen: Le cadran solaire de Sidi el Haloui revisité



L'Islam au Maghreb et le rôle de Tlemcen dans sa propagation» est le thème du colloque international qu'abrite du 21 au 23 mars la maison du parc de Lalla Setti sous l'égide du CNRPAH et de l'UABT. Dans sa conférence inaugurale sur «La position de Tlemcen par rapport à la chronologie de l'expansion de l'Islam au Maghreb (8è-12è s.), le Dr Amara Allaoua de l'université Mentouri de Constantine parlera des traditions de conquête. Il citera l'Egypte, Kairouan, Rome, l'Andalousie ainsi que la référence ibadite comme repères géographiques. Le christianisme et le judaïsme ont-ils (pour autant) disparu avec l'avènement de l'Islam ? s'interrogera-t-il. Le Dr. Abdelmamalek Slatnia de l'université de Guelma mettra en exergue «L'apport civilisationnel de la période punique». Des sites comme Luxos, Tanger, Rachgoun, Hippone, Utica, Carthage, Sedrata sont des vestiges témoins de l'époque phénicienne. A travers sa communication intitulée «Essais de synthèse des études historiques et archéologiques dans la région de Tlemcen», le Dr. Saïd Deloum de l'université d'Alger 2 (institut d'archéologie) parlera de monnaie et de numismatique. Siga, Camarata, Timici abritaient des ateliers de frappe de monnaie «TMC». Il soulèvera le problème d'identification et de datation de la monnaie faute d'un catalogue qui permettrait de replacer la pièce dans son contexte historique. Quant au Pr. Mohamed Meouak de l'université de Cadiz (Espagne), il s'intéressera «Aux origines du peuplement du Maghreb ancien et médiéval (avec) le recours à la toponymie et la philologie». Il convoquera pour ce faire quatre approches: libyco-berbère, sémitique, latine… L'origine perse (Maroc), la perspective cananéenne (Salluste/Moïse), la piste grecque (Tanger/Ptolémée), la filière berbère (Palestine/David)… illustrent à juste titre la complexité de la question évoquée par plusieurs géographes et chroniqueurs arabes comme Ibn Khaldoun, El Messaoudi, El Bekri, El Idrissi. La littérature ibadite recèle en la matière des matériaux fabuleux (généalogies, biographies, hagiographies…). Le Dr Leith Chakir Mahmoud Labidi de l'université de Baghdad (Iraq) fera une «Lecture des états de Tlemcen à travers les livres des contrées (d'El Hamaoui)». Son intervention portera sur les caractéristiques de la ville (origine du nom, toponymie, espace urbain, population, confession…) et sa relation avec les autres villes du Maghreb central (Algérie). « Le rôle du facteur économique dans la structuration du tissu urbain» est le titre de la communication du Dr Mohamed Negadi de l'université Abou Bekr Belkaïd de Tlemcen, qui évoquera, non sans passion, l'organisation des métiers avec sa dimension éthique (écologique). En effet, les activités polluantes étaient implantées «extra muros», telles les tanneries «dar edbagh» (odeurs), la tuilerie «el qermadine» (fumée), la ferronnerie «essafarine» (bruit), le lavage de la laine «quessarine» (allergie). Les métiers ne présentant pas de nuisance particulière étaient exercés en «intra muros» comme les «sebbaghine » (teinturiers), les «blaghdjia» (babouchiers», les «fekharine» (potiers), les «siyaghine» ( joaillers), les «kherratine» (charpentiers)… Le Dr. Abdelaziz Laâredj de l'université d'Alger 2 (I.A) fera, lui, une lecture de «L'esthétique de l'art islamique, son symbolisme et ses aspects créatifs dans les édifices mérinides et zianides à Tlemcen». Après avoir fait le tour sémantique du mot «art», il s'attaquera à la vision de l'art islamique en précisant dans ce contexte les critères de l'esthétique et l'éthique de sa fonction. «La boulimie de l'urbanisme moderne et l'avenir de la cité islamique» est le thème traité par le Dr. Larbi Bouayed de l'école supérieure d'architecture de Rabat (Maroc). Il passera sous la loupe les trois modèles d'habitat : le traditionnel (authentique), le colonial (étranger) et le moderne («précaire»). Un quatrième modèle s'impose, selon lui. Il s'agit de la ville de demain «fondée» sur des valeurs de bon voisinage, de solidarité, de civisme, de justice… Quelle est la logique qui dicte le choix architectural chez nous ? Pourquoi les pays musulmans n'ont pas pu produire un modèle alternatif ? se demandera-t-il… Le Dr. Abdelhamid Hadjiet de l'université de Tlemcen se penchera sur «L'évolution de la pensée islamique sous la dynastie des Almohades» à travers deux axes: le soufisme philosophique et le soufisme pur. «Le soufi était proche de la société», soulignera-t-il en citant des noms tels Abou Zakaria Yahia, Ibn el Hadjam, Abdeslem Tounsi, Sidi Boumediene dont il fera lecture de quelques maximes. Il fera le distinguo entre soufisme scientifique et soufisme populaire (superstition et légendes)… En tandem, Le Pr. Sofie Gilotte du CNRS de Paris et le Pr. Ptrice Cressier du CNRS de Lyon parleront des «Mosquées des provinces d'al-Andalous: problèmes de méthodologie et études de cas». La diffusion des «masadjid» est liée au processus d'islamisation de l'Occident musulman, selon ces chercheurs. Quels sont les styles utilisés dans le décor des mosquées de province ? Qui sont les commanditaires (bailleurs de fonds dans le cadre légal et administratif)? Est-ce qu'on peut transposer ce modèle andalou (approche méthodologique) au Maghreb? Tels sont les axes de réflexion retenus par les deux intervenants. Le Dr. Fethi Jarray de l'université de Tunis (Institut supérieur de patrimoine) expliquera comment «Mesurer le temps à Tunis et à Tlemcen aux 8è et 9è siècles». Son exposé portera sur la science dite de la gnomonique qu'il illustrera avec deux instruments contemporains: le cadran solaire de la mosquée de Sidi el Halloui (fabriqué en 1346 par Ahmed Ben Mohammed Lamti) et le cadran solaire du musée de Carthage (conçue lui aussi en 1946 par Abou el Qassim Chaddad). La «mizwala» (cadran solaire) se compose de courbes de constellation (Zodiaque, Bélier, Capricorne, Cancer), de courbes de prières (Asr, Dohr) et de tracé de «Zawel» (midi)… On saura que l'heure temporaire faisait entre 48 et 72 mn selon la saison…

Le Pr. Fatima Belhouari de l'université d'Es Senia Oran mettra en exergue les «Rôles des savants de Tlemcen dans le rayonnement culturel à Fès» (un sujet déjà traité par le Dr. Belkacem Sââdallah dans le premier colloque). Fès abritait quelque 700 mosquées et 11 écoles coraniques toutes dotées de riches bibliothèques, indiquera-t-elle. La migration des savants obéissait à des motivations académiques ou politiques, selon l'oratrice. Dans le domaine de l'enseignement, elle citera El Abili, El Maqarri el djed, Ettenassi «le diplomate»… Clôturant la série de communications, le Dr Faïza Mehtari de l'université de Tlemcen revisitera «Les bains maures dans le Maghreb islamique: étude historique et architecturale». Elle proposera trois cas: Hammam Sebbaghine de Tlemcen, Hammam ksar el Bali de Nedroma et Hammam ksar Seghir de Marrakech. Le bain maure se compose de quatre salles: froide ( frigidarium), tiède (tépidarium), chaude (caldarium) et le four (fernaq). Il faut savoir que Hammam Sebbaghine, dont le plan fut élaboré par William Marçais et rectifié par la suite par le Pr. Terrasse Michel, chercheur au CNRS de Paris (présent dans la salle), fait l'objet actuellement d'une opération de rénovation qui aurait mis au jour la salle froide… A noter enfin la désaffection du public, notamment les après-midi, toutefois «compensée» par la présence protocolaire de trois charmantes jeunes filles en chedda tlemcenia, installées solennellement aux premiers rangs.


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