Algérie

Tlemcen Entre boulimie et pouvoir d'achat limité !



Le Ramadan cette année a coïncidé avec larentrée scolaire fixée au 15/9, ce qui a dérouté les citoyens qui n'arriventpas à équilibrer leur maigre budget entre le couffin de légumes et de viande,le cartable ou les sacs à dos avec les fournitures scolaires indispensables.Il y a aussi les habitudes qui ont changé,la vieille génération à laquelle nous appartenons a vécu les momentsdifficiles, colonisation, guerre de libération et a pu résister à la misèregrâce au savoir-faire de nos grand-mères qui réussissaient des plats succulentsavec peu de moyens et surtout grâce à la solidarité de famille et de quartierque nos parents nous ont inculquée pour aider les affamés et les SDF.L'équilibre de la société de cette époque avant l'indépendance du pays a permisà toutes les familles de survivre et de subsister grâce à cet élan solidairequi a été rompu par la «course au dinar» qui a gangrené le groupe social qui aperdu les réflexes de son identité et même sa morale. A Tlemcen, on est passéde la grande maison de Mohamed Dib, avec son patio, sa culture, sacivilisation, son savoir-faire avec quatre à cinq familles soudées etsolidaires qu'il vente ou qu'il pleuve, à de tristes HLM où chacun s'enferme à«double tour» dans «sa cage» ou appartement exigu sans communiquer avec levoisin même d'en face. Voilà la différence entre Ramadan d'hier où malgré lemanque à gagner, les gens souriaient et discutaient entre eux autour d'unetable garnie de gâteaux de chez nous : Baghrir, Machahad, Kaâk (galette priséepar les enfants), Zlabia, Bananes au miel, réalisés par des spécialistes quiont disparu et qui ont pour nom Sebaïhi Nedromi connus sur la placed'El-Medress. Les soirées étaient animées après les Taraouih dans les cafés parFeu Nekkache avec son guenibri (dos de tortue à un seul fil) au café del'Espérance Feu Boubekeur Benzerga à l'hôtel du Maghreb (encore en ruines),Hadj Zizou et Benkabil au café Lotfi. La vieille médina n'était pas encoremorte, l'artisanat se portait bien, les relations entre citoyens n'étaient pasencore ébranlées par le Trabendo le commerce informel où personne n'arrive àtrouver ses repères. Le Ramadan d'aujourd'hui, c'est la course contre la montrepour remplir un couffin avec des légumes dont les prix frôlent l'insolence, lapomme de terre toujours à 60 DA qu'elle soit algérienne ou marocaine à DarBentata (Ghazaouet), la tomate qui est passée sans avertir de 15 DA à 30 DA,les dattes Deglet Ennour qui ont disparu des étalages pour revenir aprèsl'écoulement des dattes de 2ème catégorie et les bouchers qui n'arrivent pas àcomprendre que les salariés préfèrent la viande congelée à moitié prix (350 DA)au lieu de 700 DA. Même le poulet a pris des ailes 250 DA le kg à cause, paraît-il,des grosses chaleurs du mois d'août où, d'après les éleveurs des milliers depoussins ont péri... Ce qui est sûr c'est que la classe moyenne a disparucréant ce marasme économique où personne ne trouve son compte. C'est dur pourun fonctionnaire de passer de l'économie planifiée avec des souk el fellahdébordants de marchandises à une économie libérale où chaque commerçant fixeson prix, surtout les produits de première nécessité, huile, sucre, lait,semoule.A propos de farine et de sucre, au moment oùj'écris ce billet, j'ai appris la fermeture des Moulins de Souani (daïra de BabEl-Assa) et le licenciement de 61 ouvriers qui, d'après un responsable de cetteentreprise, «sont mis à la rue, sans pécule au début du Ramadan !». Pourquoiavoir choisi cette rentrée sociale pour fermer ces moulins et mettre dansl'embarras une centaine de familles plus les boulangeries qui n'auront plus defarine sur place pour faire du pain. Parmi les plus déçus des catégoriessociales, ce sont les retraités, cette frange de la société qui a tant donnépour le pays et qui attendront comme toujours la date fatidique du 24 septembrepour aller retirer leur maigre pension et régler d'abord la facture Sonelgazqui a eu «la gentillesse» de remettre la facture salée à la veille de ceRamadan. Restons optimistes avec les promesses de relèvement des salaires et derégularisation des pensions de retraite, et prenons notre chorba (soupe) ouhrira en priant le Bon Dieu de passer un mois de Ramadan dans le calme et lasérénité. Molière avait inscrit en lettre d'or cette maxime dans sa pièce dethéâtre l'Avare : «il faut manger pour vivre et ne pas vivre pour manger !».


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