L'association de la sauvegarde et la promotion de l'environnement de la wilaya de Tlemcen (ASPEWIT) a entamé ses activités en ce début d'année 2016 par une conférence sur les «mathématiques arabes», animée par le mathématicien, professeur d'histoire des mathématiques et chercheur en histoire des sciences, Ahmed Djebbar.Devant un public motivé et nombreux, cet ancien ministre de l'Education nationale (du temps du défunt président Boudiaf), qui compte parmi les plus grands spécialistes de l'histoire des sciences dites «arabes», est venu exposer lundi soir la naissance, le développement et la circulation de cette science exacte depuis l'antiquité à nos jours, ainsi que l'apport des différentes civilisations à son épanouissement (grecque, romaine, chinoise, indienne, islamique…) D'après le conférencier, en 1962 dans notre pays, les mathématiciens pouvaient comprendre ce qu'on leur a appris mais pas comprendre les mathématiques qui se produisaient au Etats-Unis car, « au même moment, ils n'avaient pas les outils. Notre université n'était pas développée. Il faut bien voir que parfois nous avons des questionnements et des réponses sur des choses très simples sur le terrain, il faut éviter les discours. Quels sont les outils mathématiques qui sont passés dans la tradition arabe, qui vont rester, et grâce aux mathématiques dites arabes ou écrites en arabe, ces outils vont être universels. La civilisation de l'Islam, a permis d'améliorer, polariser, diffuser et faire circuler les outils et les résultats mathématiques qui sans elles n'auraient jamais traversé la Méditerranée, ni d'ailleurs l'Asie. La Chine et l'Inde seront concernées par l'apport des sciences en pays d'Islam, chose qui n'était pas connue il y a 25 ans». Selon Ahmed Djebbar, «le sinus est une invention indienne. Le cercle trigonométrique est une conception indienne. Les musulmans ont unifié et inventé le cercle trigonométrique de rayon 1. Ça a été inventé par le plus grand mathématicien du 10ème siècle Abou el Wafa Bousajani, mort en 997, c'une invention de type méthodologique qui est restée jusqu'à maintenant et est enseignée pour des raisons qui sont connues des mathématiciens bien sûr. Les Grecs ne faisaient pas des mathématiques démonstratives. Grosso modo, avant l'avènement de l'islam, il y avait deux manières de faire les mathématiques, il y a une manière qu'on appelle la manière algorithmique : on vous pose un problème, vous cherchez une méthode pour le résoudre et donner la réponse à celui qui a fait la commande. Lorsque vous lui donnez la réponse, s'il est satisfait, il n'a pas à vous demander comment vous avez trouvé la solution. Culturellement, il ne vous la posera pas, parce qu'il est dans un espace algorithmique, ce qui compte c'est de trouver un procédé même si vous le tirez du chapeau, n'importe, même si vous ne le justifiez pas, il marche… il marche, jusqu'au moment où il ne marche plus, alors soit le client change, soit vous. Vous prenez votre outil et vous le rabotez et vous le transformez pour la date, à ce moment-là vous l'inventez. La mathématique grecque est différente, elle s'appelle la mathématique hypothético-détective. Il ne suffit pas de trouver une méthode pour répondre à la commande de madame ou monsieur, résoudre un problème. Madame ou monsieur exigent que je leur dise comment je l'ai trouvée, et là il faut démontrer, et ça c'est beaucoup plus difficile. Il n'y a qu'une seule tradition culturelle et scientifique qui a fait ça dans l'histoire de l'humanité c'est la Grèce. Arrivent ensuite les premiers scientifiques musulmans, ils avaient une mathématique algorithmique qui vient de l'Inde, de la Chine, une de l'Egypte, de Babylone, et une mathématique grecque d'une seule région qui vient même pas d'ailleurs d'Athènes mais d'Alexandrie. Eux décident, ils ont de grands empires mondiaux, qu'est-ce qu'ils font ' Mais cela est lié aussi à cette culture nouvelle, ils ne choisissent pas, ils rassemblent. Comme ils ont rassemblé politiquement tous ces peuples, comme ils ont essayé de les unir malgré tous leurs différends et leurs courants browniens qui partageaient ces peuples. Pour la science ils ont dit tout est bon à prendre et ont appelé tout cela science. Ils ont même appelé la cuisine la science de la cuisine, parce que c'est du savoir. C'est un comportement culturel et ils n'avaient pas à le justifier. Le système décimal positionnel est une invention indienne. C'est-à-dire les chiffres de 1 jusqu'à 9 avec le zéro, plus l'écriture évidemment avec la position, voilà les chiffres indiens à l'origine.Ces chiffres indiens existaient au moins deux siècles avant Jésus-Christ. Il y a eu une transformation due à la pratique au quatrième siècle après Jésus-Christ jusqu'à la fin du huitième siècle. Mais, ce qu'il faut retenir c'est qu'aucun pouvoir politique ne va intervenir dans les sciences exactes. Deuxième remarque, aucun théologien ne va intervenir dans la pratique des scientifiques».
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Posté Le : 20/01/2016
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Khaled Boumediene
Source : www.lequotidien-oran.com