Algérie

Tizi Ouzou: la fin des cerises



La saison tire à sa fin, mais la situation reste lamentable sur tous les plans. À l'exception d'une fête annuelle qui se cherche une vocation, la cerise ne signifie pratiquement plus rien au présent et encore pire au futur. La wilaya de Tizi Ouzou a pratiquement perdu toute sa cerisaie au rythme de grands discours pompeux qui, eux, ont traversé les années mais sans ce fruit noble qui disparaît chaque jour un peu plus. La cerisaie de la wilaya de Tizi Ouzou qui représentait, il n'y a pas si longtemps, 60% de la production nationale est un souvenir. La preuve en est que la cerise vendue durant les mois de mai et juin est ramenée par des vendeurs venus de Bouira.En effet, alors que les discours officiels évoquent pompeusement le développement de la filière, les choses continuent de se dégrader sur le terrain. Jusqu'à il y a quelques jours seulement, la cerise était encore vendue dans des conditions lamentables, loin de tout contrôle. Elle est étalée aux abords des routes, sous la chaleur et dans la poussière. Pour comprendre ce qui se passe, nous avons préféré nous éloigner des discours démagogiques redondants et complètement coupés de la réalité et nous nous sommes adressés aux vendeurs. Nos questions portaient sur l'origine de la cerise vendue, les mauvaises conditions et les perspectives économiques.
Nous sommes sur la RN12, tronçon situé entre le chef-lieu de wilaya et la ville de Draâ Ben Khedda, au lieudit «Les Toumis» où commencent à fleurir les tentes en roseau à droite et à gauche de la chaussée. Les vendeurs exposaient dans des paniers en osier le fruit. Il y avait aussi des figues précoces, mais là n'est pas notre propos, du moins pour cette fois. De prime abord, nous avons tenté de connaître l'origine de la cerise. «Non, pas du tout, la cerise, nous la ramenons de Bouira et d'Aïn Defla», nous répond un vendeur à qui nous avons demandé si le produit n'est pas de Larbaâ Nath Irathen ou de Tizi Ouzou en général. Tous les vendeurs, des dizaines, ont confirmé qu'il n'y a aucune petite cerise qui est de Tizi Ouzou. D'ailleurs, tous les vendeurs viennent de la wilaya de Bouira.
La question qui s'impose alors est relative aux causes de cette absence de la cerise de la wilaya de Tizi Ouzou sur ces lieux de vente improvisés. «S'il y a de la cerise à Tizi Ouzou, nous l'aurions su. Pourquoi ramener de la cerise à des centaines de kilomètres s'il y avait où acheter ici quelque chose de frais», nous répond un autre vendeur. Au sujet des conditions de vente, ces derniers reconnaissaient que la poussière et la chaleur nuisent gravement à la qualité de ce fruit «mais, nous ne serions pas ici à vendre dans la poussière, s'il y avait des lieux de vente dédiés aux produits du terroir», regrette un jeune vendeur qui affirme que la situation est similaire dans tout le pays.
«Les cerises, comme les autres produits du terroir, ne sont que des sujets de discussion pour des responsables qui justifient leurs salaires. Sur le terrain, il n'y a absolument rien du tout. Croyez-vous qu'un marché couvert des produits du terroir est difficile à ouvrir'», s'interroge un autre vendeur et aussi producteur. «Jusque-là, les discours ne sont pas suivis d'actes, car il n'y a pas de coordination et de synchronisation dans le travail des responsables. Autrement, il y a ceux qui ont la mission d'accompagner les agriculteurs et il doit y avoir ceux dont la mission est de réguler la commercialisation de ce produit et un tas d'autres choses à faire», explique un jeune vendeur qui refuse de poursuivre la discussion, justifiant qu'il a mal à l'estomac dès qu'il parle des responsables. En fait, cette situation calamiteuse sur le terrain, ne trouve pas d'explication dans les chiffres et les statistiques officiels. La cerise, qui représente 60% de la production nationale, est un chiffre qui n'a aucun lien avec la réalité du terrain, quand on sait que la cerise n'existe pas dans les commerces et encore moins dans des emballages destinés à sa commercialisation. Les prix sont plus déconnectés de la réalité, car un kilo à 1 200 dinars est juste surréaliste. La réalité est que la cerise n'existe pas dans les circuits commerciaux légaux. Dans le meilleur des cas, seuls 4% de la production ont été vendus sur les circuits commerciaux légaux et cela remonte à plusieurs années, lorsque la cerisaie locale n'a pas été encore décimée par la moniliose. Celle-ci a fait réduire la productivité de 80 q/h à seulement 4 q/h.


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