Algérie

Théâtre Régional Sirat Boumediene de Saïda : Générale de Hammam, un spectacle honnête



Le Théâtre régional Sirat Boumediene de Saïda a donné la générale de Hammam, sa dernière production. Spectacle honnête, il est assurément le plus abouti de tout ce que Lakhdar Mansouri a jusque-là mis en scène.Toujours sans fioriture, ses créations passent la rampe depuis Canat leïla (Ce fut une nuit) que nous avons vue en 1996.
Cette fois, il a réussi à dépasser ce qui les lestait parfois : la direction d'acteur. Pourtant, Hammam est un spectacle-école n'ayant compté aucune tête d'affiche, hormis l'unique comédienne distribuée, Sara Rezigua qui a une longueur d'avance sur ses compagnons de scène pour avoir travaillé avec des professionnels.
Tous les huit autres comédiens sont des amateurs. Ils se sont donné avec fougue, mais avec assez de justesse pour ne pas se laisser aller au sur-jeu, le péché mignon des amateurs.
Le texte est d'ailleurs de l'un d'eux, Djebari Mohamed Khalil campant Youcef, un personnage qui revient mutilé intérieurement après des années de geôle, victime d'un dévouement fraternel qui l'y a jeté.
Très allégorique par sa trame, le spectacle commence en comédie de m?urs pour se conclure en poignant drame, suggérant davantage son propos sur l'état de la société que l'assénant à la volée.
C'est ce qui, en lui, a attiré l'intérêt de Mansouri. La situation est celle de la réouverture du Hammam après cinq années de fermeture. La salle chaude avec côté jardin une ouverture d'accès, côté cour, un vasistas, est rendue par un décor réaliste que son auteur Abdellah Kabirri inonde d'un blafard éclairage.
Toute l'intrigue se déroule dans ce lieu de purification dans tous les sens du terme mais aussi antre affecté de croyances superstition, hanté intermittemment par un troublant être, mi-succube, mi-ange de la mort, Chala, qu'incarne Sara Reziga.
Ses « magiques » apparitions font relever la dramaturgie à un niveau supérieur et basculer l'intrigue. Tous les personnages sont des connaissances de longue date.
Dans la chaleur et l'intimité du lieu, les langues se délient, ce qui entraîne des face à face avec des règlements de compte dans un déballage entre sordide, cruauté et indicible souffrance. Cela n'exclue pas le comique de sourdre. Le burlesque s'invite opportunément pour évacuer toute insipidité.
Le rythme est ainsi constamment maintenu. Spectacle langagier, la mise en scène a réussi à en tempérer la verbosité en privilégiant l'action. Un soupçon de chorégraphie injecté par Ryad Beroual par moments, vient styliser quelques actions d'ensemble.
La musique de Mohamed Zami est en soutien. Dans la distribution, certains comédiens font des étincelles à l'instar d'Abdellahi Toufik campant un coiffeur efféminé avec ce qu'il faut d'humanité, de fragilité et de drôlerie.
Il est Titou, un gay qui s'assume sympathiquement et qui espère une fetwa d'un imam libérant le « tabarouj » de façon que lui puisse réaliser des merveilles sur les chevelures féminines. A l'opposé, Gacem Merzoug est Ali, un nouveau riche, détestable de cynisme et de fourberie.
Il est le frère du malheureux Youssef. La confrontation entre les uns et les autres est d'ailleurs l'occasion d'une galerie de portraits sur des profils d'individus. L'un d'eux est un taleb traditionnel que porte Kadem Mohamed en Tartuffe. Bouguetouf Hamid est un ardent syndicaliste.
Abdallah Bahloul est Hadj Bouziane, le propriétaire du Hammam. Guesmi Salah est Djamel le dealer qui s'envoie dans des rêves bleus même au hammam, abandonnant les autres dans leur papotage.
Fethi Mebarki est Amar, un « pauvrico » qui vit du massage ainsi que du grattage de la saleté corporelle des autres. Hammam est un spectacle qui se laisse agréablement voir.


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