La pièce Le Dernier Train, écrite par un auteur néerlandais, est difficilement adaptable à un contexte culturel non occidental, et la tentative de Yahia Benamar de la mettre en scène, d?après un texte de Ahmed Hamoumi et Abdelkader Belkaroui, pour avoir justement voulu introduire des éléments épars de la réalité d?aujourd?hui, a contribué à la confusion (l?Irak, Bush, etc.). La générale de cette pièce a été présentée, jeudi dernier, au TRO avec une distribution mettant en scène Hamouda Bachir dans le rôle de l?homme et dont les qualités d?interprétation restent extraordinairement dominantes face à Messoussa Naouel dans celui de la jeune femme. Les deux protagonistes se rencontrent dans une gare où vont se succéder des péripéties. Au tout début et sous l?effet de l?alcool, l?homme veut convaincre sa compagne qu?il se trouve dans une gare désaffectée depuis 1933 et elle veut prouver que la gare est non seulement fonctionnelle mais qu?elle-même vit en 1850 et s?apprête à effectuer un voyage dont elle taira la destination. Car, ce n?est pas l?espace mais le temps qui est au centre de la philosophie de l?auteur de la pièce, dont l?intrigue se joue essentiellement autour des tentatives des protagonistes pour trouver les symboles ou les signes temporels qui permettraient de trancher pour l?une ou l?autre des époques. L?homme déjoue les preuves présentées par la femme mais reste incapable de défendre sa cause. Cette ?uvre a déjà été jouée au TRO par une troupe indépendante, à laquelle adhérait le défunt Hamoumi au milieu des années 1990. La première version du spectacle, avec Hadj Seghir et la comédienne Lola, se voulait une simple traduction (de Benyoucef) du texte originel et c?est à partir de là que le fond de la pensée de l?auteur a pu être saisi. Sans ambition de coller au réel local, cette version qui paraissait déphasée était cependant crédible. A une période moderne hautement industrialisée (très probablement les années 1970), marquée par la course contre la montre et la perception d?un temps qui s?écoule de manière vertigineuse, les angoisses que suscitaient une réelle menace nucléaire (en pleine guerre froide) et le spectre du chômage de masse, l?auteur oppose une époque, le XIXe siècle, pourtant positiviste ayant constitué les jalons de l?ère techniciste du centenaire suivant mais au contraire romantique et plus facile à vivre comparée au chaos de l?ère moderne.Dans cette nouvelle version du Dernier Train, étirée jusqu?à ses extrêmes limites, la scène de la petite boîte à musique qui reprend l?air de la Lettre à Elise de Beethoven, reste à ce propos significative d?une certaine nostalgie des temps passés, presque un paradis perdu en comparaison avec la détresse de l?homme moderne. Les effets scénographiques utilisés, très intéressants au passage, et la prestation de Hamouda qui a essayé de se surpasser n?ont pas été d?un grand secours à l?éclatement des repères de la pièce, qui était pourtant à l?origine, très compacte.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 21/05/2008
Posté par : sofiane
Ecrit par : Djamel Benachour
Source : www.elwatan.com