Algérie

Terre dilapidée



Terre dilapidée
Le message présidentiel du 19 mars dernier accablant l'opposition, accusée de pratiquer la politique de la terre brûlée, prend des résonances particulières au vu des développements de la scène nationale.En osant cette image quelque peu catastrophiste, le Président ne croyait pas si bien dire, sauf que les parties ayant lancé cette entreprise destructrice ne le font pas pour arriver au pouvoir, elles y sont déjà. Si l'on demandait l'avis du simple citoyen à propos de l'accusation présidentielle, il répondrait qu'elle est fondée, mais elle s'applique au clan politico-affairiste qui maintient et tire profit du statu quo au sommet de l'Etat.Loin de pouvoir brûler ni la terre ni les vaisseaux, l'opposition politique ronge son frein aux côtés de quelques pans de la société civile, luttant contre l'essoufflement et les tentatives de noyautage lancées assidûment par les appareils et les satellites du pouvoir. La participation symbolique aux rassemblements antigaz de schiste dans les villes du Sud, entre autres actions menées ces dernières semaines par l'opposition, n'a rien de mortel pour le pays. Il y a, au pire, assistance à populations en danger. Alors, lorsque le pouvoir cible l'opposition, il touche son propre clan.Accessoirement, l'accusation de manque d'éthique professionnelle lancée contre la presse indépendante est valable pour les médias qui soutiennent la présidence à vie, parrainent le discours intégriste et se laissent aller à des dérives inquisitoriales. Lorsque le gouvernement promet de mettre de l'ordre dans sa cour médiatique, personne ne le croit. Elle est trop précieuse en temps de crise ou d'élection, si tant est qu'il y ait encore quelques ressorts de survie politique.Mais à un certain moment, l'illusion n'opère plus, le vernis politico-médiatique se craquelle de toutes parts. Signe des régimes en déclin, les affaires de corruption et de dilapidation de biens publics, prioritairement le foncier, vont connaître leur vitesse de croisière et ne manqueront pas d'atterrir sur la place publique. Les dignitaires du régime vont alors s'apercevoir que leur pouvoir de prédation ne relève pas du sacro-saint et qu'ils risquent d'être comptables devant l'opinion publique, même s'ils ont accumulé suffisamment de ressources intra et extra-muros pour échapper à l'emprise de la justice. Il est rare que des lendemains de «victoire» électorale soient à ce point délétères.Les quadruples vainqueurs des élections ont préféré construire le château de cartes du pouvoir et de l'enrichissement personnel, reléguant à des horizons incertains les perspectives de développement et de démocratie. Il est possible de limiter les dégâts, de réserver quelques voies de sortie et de reconstruction du destin national.Le même message présidentiel du 19 mars mettait en garde, avec force menaces, contre la tentation de «démoraliser» le peuple. Or, l'une des dernières sources d'angoisse pour la population est d'apprendre qu'un opérateur qui a du mal à bien goudronner une route va se lancer prochainement dans un projet de partenariat pour la fabrication d'équipements de radiothérapie.




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