Algérie

Tension entre Alger et Bamako : Gel des relations diplomatiques avec le Mali


Tension entre Alger et Bamako : Gel des relations diplomatiques avec le Mali
Après le rappel de l'ambassadeur, les relations entre Alger et Bamako sont désormais gelées jusqu'à nouvel ordre. Pierre Camatte, l'humanitaire français, a été relâché par ses ravisseurs qui le retenaient en captivité depuis plus de trois mois. Une libération obtenue après l'élargissement par le Mali de quatre terroristes, dont deux Algériens réclamés depuis des mois par la justice algérienne. Jamais les relations entre l'Algérie et le Mali n'ont été aussi tendues au point d'être gelées, jusqu'à nouvel ordre, selon des sources proches du dossier. Celles-ci expliquent qu'il est attendu de Bamako « des explications sur les raisons qui l'ont poussé à libérer des terroristes concernés par une demande d'extradition, en vertu de la convention qui lie les deux pays en matière d'entraide judiciaire ».Pour l'instant, aucune réaction n'a été exprimée par Bamako, qui se contente de se murer dans son silence. Cette crise était prévisible vu la gestion par Amadou Toumani Touré (ATT) de la situation au nord du Mali, une région devenue, depuis quelques années, une zone d'activité et de repli des barons de la drogue et des groupes terroristes agissant sous la bannière d'Al Qaîda. L'insécurité et les trafics pèsent dangereusement sur sa population, déjà fortement affectée par la pauvreté, la sécheresse et les maladies.Les évènements qui se sont succédé ces derniers temps montrent que la transaction qui a permis la libération de Pierre Camatte n'était pas uniquement l''uvre d'ATT, mais surtout celle de la France qui, à juste titre, a préservé la vie d'un de ses citoyens au détriment de celle des populations de la région, notamment algérienne et mauritanienne. L'exécution des exigences des quatre terroristes en dépit du fait qu'ils soient concernés par des demandes d'extradition formulées par leurs pays d'origine, où ils sont recherchés pour des crimes qu'ils ont commis, est en soi une manière d'encourager les prises d'otage tout autant que le paiement des rançons. Et ce n'est certainement pas « la solidarité avec les Etats de la région » exprimée, hier, par le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Bernard Valero, qui va empêcher les quatre élargis à reprendre leurs activités terroristes.Bien au contraire, le GSPC est sorti renforcé humainement et médiatiquement grâce à la diplomatie française et à la passivité malienne. En effet, l'on se rappelle que durant la semaine qui a précédé le 20'février dernier, délai d'expiration de l'ultimatum lancé par les terroristes, il y a eu la visite éclair de Bernard Kouchner, chef de la diplomatie française, à Bamako. Il a été reçu par ATT en personne, avant de repartir, visiblement un peu déçu par le « non catégorique » et public de son interlocuteur. Mieux, ce dernier a même renvoyé la balle à l'Algérie, étant donné que celle-ci avait demandé l'extradition des deux terroristes réclamés par Al Qaîda.Mais étant donné l'importance qu'accordait la France à cette affaire, B.'Kouchner est revenu à la charge, cette fois accompagné de Claude Guéant, secrétaire général de l'Elysée, homme de confiance de Nicolas Sarkozy, qui pèsera pour pousser à la libération de son ressortissant en négociant avec Al Qaîda, quitte à provoquer la colère des voisins, ceux-là mêmes qu'il a classés sur la liste des pays dont les ressortissants sont à surveiller pour leurs éventuelles accointances avec les terroristes. Vingt-quatre heures après, et contre toute attente, les quatre terroristes sont déférés devant un tribunal, à 6h30 (du matin), et presque à huis clos, pour être jugés pour détention « illégale d'armes à feu », et condamnés à 9 mois de prison. Une peine qui couvre leur détention et qui leur a permis de retrouver la liberté. Ils ont été transférés à Gao, vendredi dernier, et remis aux négociateurs attitrés de ATT, qui étaient en contact direct avec Abdelhamid Abou Zeid, dans ses retranchements au nord-est de la région.L'information était gardée sous embargo, jusqu'à dimanche, après la visite de Pierre Guéant, à Alger, dont la mission était de calmer probablement la colère d'Alger. « De très nombreux paramètres, qui dépassent les développements de ces derniers jours, rentrent en ligne de compte, s'agissant des conditions de libération de Pierre Camatte et des moyens mis en 'uvre dans la région pour lutter contre Al Qaîda », avait expliqué hier, le porte-parole de la diplomatie française, repris par l'AFP, sans pour autant préciser de quels « paramètres » s'agit-il, et si ces derniers valaient plus que la vie des Algériens et des Mauritaniens. Pour sa part, l'Espagne qui s'apprête à verser les 5 millions d'euros réclamés par Mokhtar Belmokhtar, le frère ennemi de Abou Zeid, chef d'un groupe terroriste, pour arracher la libération de ses trois ressortissants, membres de l'ONG Barcelona Accio Solidaria, enlevés au mois de novembre dernier alors au nord-est de la Mauritanie, avant d'être dirigés vers le nord du Mali.Là également, c'est ATT qui assure les négociations pour leur libération, en attendant qu'une rançon soit versée également pour la libération du couple italien, enlevé au mois de décembre dernier en Mauritanie, et remis à un lieutenant de Abou Zeid, au nord du Mali. Il faut rappeler que depuis que le gouvernement allemand a ouvert les portes de l'enfer du paiement des rançons (5 millions d'euros), en 2004, le GSPC a mené au moins sept opérations de kidnapping, qui lui ont permis d'obtenir plus de 20 millions de dollars, sans compter ce qu'il va certainement avoir en contrepartie des cinq otages qu'il détient encore. Le tarissement de ses ressources de financements au nord du pays et la facilité avec laquelle les prises d'otages sont menées, ont fait que ces opérations sont devenues pour l'organisation terroriste une activité très lucrative. Celle-ci lui a permis de renforcer ses rangs, qui sont passés de 80 terroristes fin 2005 à près de 800, en 2010.Sans aucune surprise, tout porte à croire que la résolution contraignante du Conseil de sécurité de l'ONU, relative à l'interdiction du paiement par les Etats de rançons aux terroristes sera foulée aux pieds.
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