Algérie

Tendance monopole



Le monopole sur le commerce extérieur, c'est une vieillehistoire qui remonte à la présence turque. C'est même un des paramètres parlequel certains politologues et historiens expliquent le fonctionnement dusystème politique algérien et l'histoire du pays.Sans remonter aux Ottomans, on se souvient qu'au tout débutde son premier mandat, le président de la République avait eu la dent durecontre la poignée de personnes qui contrôlent le commerce extérieur, les fameux« M. Sucre, M. Céréales... ». C'était, d'une manière fortement imagée, indiquerque le monopole de l'Etat sur le commerce extérieur a été transféré versquelques privés.Les choses n'ont pas l'air d'avoir beaucoup évolué. Leministre du Commerce en personne constate que la libéralisation du commercen'empêche pas une « tendance au monopole sur le marché ». Le propos servait àjustifier l'amendement à la loi sur la concurrence pour empêcher la situationde monopole qui déplaît au patronat. Il sert aussi à justifier la prochainelevée partielle de l'obligation d'avoir un capital de 20 millions de dinarspour les entreprises d'importation.On se souvient que le capital minimum de 20 millions dedinars avait été imposé au nom de l'impératif de mettre de l'ordre dans unsecteur où les « beznassis » foisonnent. On se souvient aussi que des petitsimportateurs avaient crié à l'injustice et à une élimination destinée àfavoriser les plus gros. Le moins qu'on puisse dire est qu'on leur donneaujourd'hui « partiellement » raison. On ne cesse donc de changer d'optiquemais le monopole semble avoir la vie dure.Le plus étourdissant est que nos responsables font dans ladéclaration sibylline, comme s'ils craignaient de poser ouvertement laquestion. On aurait aimé, par exemple, que M. El-Hachemi Djaâboub nous en disedavantage sur cette tendance au monopole, sur quels produits elle s'exerce etquelles sont les entreprises importatrices qui détiennent ce monopole. Sont-ilssi puissants ces importateurs qu'on ne puisse les nommer que par allusion ? Questiond'autant plus légitime que le « marché » est en théorie de la transparence.Comment ne pas rapporter ces propos du ministre du Commerceà ceux, tout aussi prudents, du gouverneur de la Banque centrale, s'inquiétantd'un « phénomène » de concentration des crédits pour des groupes privés. Adéfaut de transparence et d'informations publiques, la rumeur s'est chargée demettre des noms à ces groupes privés qui continuent d'avoir des privilègesmalgré les retentissantes affaires de ces dernières années.Comme l'activité productrice relève toujours d'une forme denaïveté aujourd'hui, les gens en arrivent à la conclusion que la « tendance aumonopole » sur le commerce évoquée par M. Djaâboub et le « phénomène » deconcentration des crédits pour certains groupes privés sont les deux faces dela même médaille. Et jusqu'à plus ample informé, ils n'auront pas tort. Lespolitologues pourront continuer à plancher sur une autre vieille question: ladémonopolisation du commerce est-elle possible à l'ombre du monopole politique?


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