Une histoire d?amour au féminin Mara Mara, une douce amère histoire d?amour au féminin. Sur la scène, la lumière se fait très lentement. Puis, progressivement, une femme apparaît assise sur un objet qui fait office de siège en un lieu non précisé par la scénographie. Elle jette au loin des regards impatients. Elle sort une missive défraîchie, l?ouvre, puis la remet avec dépit dans son sac à main. Ainsi, commençait le dernier spectacle du programme d?animation ramadhanesque concocté par la maison de la culture de Témouchent. Mara Mara, une pièce de Bouziane Ben Achour, produite par le théâtre du Point, était à l?affiche. Celui qui a déjà vu le spectacle, il y a une ou deux années, ne pouvait manquer de relever les notables changements apportés à la mise en scène assurée par Lakhdar Mansouri. Depuis, ce dernier l?a élaguée de certains éléments pour en introduire d?autres, donnant ainsi plus d?allant et de rythme à une mise en scène qui souffrait d?être pas trop statique. Et à revoir la pièce, le rapprochement avec En attendant Godot s?impose. Il y est question d?attente, d?une longue attente, ainsi que de deux personnages dans un lieu désert. Mais là seulement, s?arrête l?analogie, car si la pièce de Beckett s?enfonce dans l?absurde, Mara Mara, elle, se prend à étaler les bleus à l?âme de ses deux personnages féminins. Le dialogue entre elles relève du propos d?alcôve, celui qui tourne autour de ce qu?il y a de plus intime. C?est cela que la pièce expose avec des mots lestés de passion bridée. Avec un texte où tout est dans le presque dit, la pièce relate sans impudeur la douloureuse soif d?aimer ou plus crûment l?envie d?un homme par deux femmes qui se retrouvent par hasard ensemble à en attendre chacune un, au même endroit, au même moment. D?où parfois les quiproquos. L?une a rencontré le sien vingt ans plus tôt, l?autre est venue à sa première rencontre à l?orée de ses vingt ans. Le thème est nouveau au théâtre algérien, il faut le souligner. Et quand la pièce passe à Oran ou à Alger, le propos n?a rien de subversif. Mais, à El Bayadh, la troupe s?est faite huer. Des jets de pierre avaient suivi. A Témouchent, les tenants de la pruderie ont quitté la salle sur la pointe des pieds. Les jeunes, dont des adolescents connus pour leur turbulence et leur machisme, ont surpris par leur attitude et leurs applaudissements à la suite de répliques furieusement féministes, il est vrai, enrobées de poésie. Amel Bentolba en impétueuse Bouchra et Khadija Dahmani en mesurée Haloum ont su mettre dans le propos les bonnes inflexions par la voix et par la gestuelle. Elles ont même, par des frôlements mutuels, des câlins peu innocents, réussi à faire accepter la légitimité de leur « coupable » liaison. Leur jeu est soutenu par un approprié jeu de lumière et une adéquate musique d?ambiance. Le travail de mise en scène de Mansouri est efficace. Il n?empêche à deux moments, lorsque le huis-clos s?éternise, que le spectateur est pris de l?envie de voir surgir un fan, un événement extérieur au drame.
Posté Le : 01/11/2005
Posté par : sofiane
Ecrit par : M. Kali
Source : www.elwatan.com