Algérie

Témoignage pictural d'un ancien « cadre incarcéré »


L'art et la politique font parfois bon ménage, et c'est sans doute le cas avec les dessins de Nourine Djelouat, exposés depuis jeudi à la galerie Lotus (Oran). Mais, en dehors de tout engagement, ce sont cependant les conditions de production de ces 'uvres ' l'auteur était incarcéré à l'époque, deuxième moitié de la décennie 90 ' qui permettent ce rapprochement. En effet, rien ne prédestinait cet universitaire, économiste de formation et sportif de vocation, à effectuer un séjour en prison si ce n'est l'épisode des cadres incarcérés, ceux du secteur public, une tache noire dans l'histoire de l'économie algérienne. « Résilience carcérale », l'intitulé de l'exposition, n'est pas un témoignage sur les conditions de détention ni un mémorandum sur l'affaire elle-même, mais c'est une expression profonde des sentiments du détenu contraint à l'exil intérieur et un repaire de ses fantasmes et de ses angoisses. « Pour moi, c'était un moyen de résister », explique Nourine Djelouat qui a également voulu prouver grâce l'expression artistique que l'homme est libre par essence. « Ils ne pourront pas emprisonner nos pensées », fait-il remarquer et le dessin représentant un arbre qui ploie entièrement sous le poids d'un oiseau est très significatif.Une goutte de sérénité dans un océan de tourmente et tout le reste, à quelques exceptions, n'est que visages torturés et corps mutilés et agglutinés comme dans un purgatoire. Certains se réfèrent à des archétypes et à des mythes fondateurs, comme le poisson qui avale les hommes ou les innombrables symboles se référant aux croyances religieuses. Une lecture psychanalytique s'y prête dans cet univers sombre et amplifié par le souci du détail, sans doute fruit de la patience que permet l'étirement du temps en prison. « A aucun moment je ne pensais faire quelque chose de mes dessins. A défaut de moyens, un stylo à bille et du papier ordinaire ont été mes seuls outils. Ce n'est que plus tard (près de 10 ans) que l'idée de les rassembler, de les encadrer et d'en faire une exposition m'est venue avec l'ouverture de cette nouvelle galerie gérée par Moussa Mediène. » Avec cette manifestation, l'auteur semble avoir vaincu ses démons et tiré définitivement un trait sur cette expérience douloureuse.
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