Algérie

Témoignage : Bouamari, un enfant algérien



Je passe devant un kiosque à journaux, une annonce attire mon regard : « Le cinéaste Mohamed Bouamari n’est plus. » Mon Dieu, un ami, quelle peine encore à surmonter !

Mohamed, je ne l’ai plus revu depuis longtemps, depuis que le malheur a frappé aux portes de l’Algérie mort deuil exil programme non annoncé ! Tel un séisme, tout s’écroule subitement et la grande famille s’effrite Bouamari était parti en France sur les traces de son enfance passée à Lyon. Là, où il a vécu et encaissé toutes les turpitudes de la vie d’une famille immigrée. Il tourne comme un lion en cage délogé de sa savane emmuré qu’il était dans la grisaille de la vieille Europe, lui le natif de Sétif de ses vastes espaces de liberté. C’est la mort qui avance... inexorablement... destructrice de tant de rêves ! « Bouamari même s’il n’existait pas, il fallait l’inventer », disait de lui son ami Lamine Sakhri. C’est vrai, tel un torrent impétueux, il avait des discours moralisateurs sur un cinéma qu’il fallait construire. Il nous drainait dans son sillage à l’assaut des citadelles de la bureaucratie et de la désinvolture des décideurs – nous étions fascinés par le personnage tant en couleur avec son air paysan des grands espaces – il faut dire que sa corpulence à la Gérard Depardieu l’y aidait beaucoup. Bouamari a beaucoup fait pour le cinéma algérien. En plus de sa filmographie prestigieuse par endroits, il s’est illustré sur tousles fronts de la bataille contre l’absence d’une vraie politique culturelle dans son pays – souvent avec des hauts et des bas – tenant à bras-le-corps cette inestimable espérance sans laquelle un pays n’a plus d’âme. Voilà Mohamed, mon ami, je pense à ton épouse, à tes enfants, à ton frère Miloud et aussi à la peine de tes chers amis Guenifi, Boudj, Lallem, Laskri, Ali Sria et à beaucoup d’autres qui t’ont aimé, parce que nous savons tous, malgré les vicissitudes de la vie, au fond que tu étais un homme, un brave. Alors tu vois, tout ce que nous avons fait ensemble pour un monde meilleur, nous l’avons fait avec enthousiasme. Je sais que tous tes projets, tous tes espoirs tu les portaient avec courage, et, mon Dieu, s’attaquer aux moulins à vent, il fallait le faire. Sacré Bouamari, nous garderons de ton souvenir que les jours heureux.




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