Algérie

Témoignage à l'hôpital de Ben Aknoun «J'ai ramassé des morceaux de chair»



Le personnel médical est resté, au lendemain des deux attentats meurtriers ciblant le Conseil constitutionnel à Ben Aknoun et une représentation de l'ONU à Hydra, traumatisé. Les images apocalyptiques des victimes déchiquetées resteront gravées dans leur mémoire. C'est ce qui ressort d'ailleurs de leurs témoignages. Un agent de service à l'hôpital de Ben Aknoun, M. Fartas, relate sans cesse le cas d'un jeune policier qu'il l'avait transporté lui-même dans une ambulance. «Personne n'a pu le transporter, un pompier s'est précipité pour l'évacuer mais il a vite pris du recul en voyant des morceaux de chair du corps du jeune policier, âgé seulement de 28 ans, sur le sol», a-t-il précisé en se répétant à plusieurs reprise. «C'est horrible, il a été complètement déchiqueté. J'ai ramassé avec mes propres mains les morceaux de chair de son corps ainsi que son pantalon et son portable», raconte-t-il. Et d'ajouter qu'il n'a pu fermer les yeux durant toute la nuit d'hier. «J'ai eu une certaine dose de courage au moment des faits. C'est maintenant que les images horribles reviennent. Pourtant j'ai déjà travaillé dans ce genre de situation. Mais peut-être que mon esprit ne supporte plus ces atrocités». La surveillante médicale du service de réanimation à hôpital Ben Aknoun, M. Keniche, nous indique que sur les 37 victimes admises à l'hôpital, deux personnes seulement sont restées sous contrôle médical. Il s'agit d'une jeune femme, employée à la Cour suprême, nommée H.Hadda, qui devait quitter l'hôpital hier dans l'après-midi. «Je suis encore épuisée et affaiblie mais tout ce qui compte pour moi, en ce moment, c'est de revoir mes trois enfants que j'ai laissés à la maison, les médecins m'ont informée que je sortirais aujour-d'hui, dans l'après-midi, Dieu merci», s'est-elle contentée de dire. L'autre cas concerne un jeune chauffeur exerçant au siège de la représentation de l'ONU. Ce dernier, sérieusement touché au niveau de ses deux jambes et de son bras, restera encore sous contrôle médical, par mesure de précaution. Il relate qu'il était à 5 mètres seulement du lieu de l'explosion. «Les deux agents qui étaient à côté de moi ont péri sur place», précise-t-il. La surveillante médicale a affirmé que l'ensemble des blessés ont quitté l'hôpital mis à part ces deux cas. Elle a signalé la mort de deux personnes, un jeune policier de 28 ans et le chauffeur d'un bus, âgé de 53 ans. Elle a également affirmé qu'une troisième personne souffrant d'un traumatisme crânien a été transférée à l'hôpital Mustapha. «Dès qu'on a entendu la déflagration, on a tenté de s'informer pour nous préparer, mais en vain, on n'a pas réussi. Le réseau téléphonique a été suspendu, quelques minutes après, on a été complètement dépassé. L'hôpital a été pris d'assaut par les proches des victimes ainsi que par des parents inquiets qui venaient demander des nouvelles», relate notre interlocutrice. Le personnel médical a déploré l'absence de psychologue. «Il faut qu'il y ait une cellule de psychologues qui intervient dans le cas de catastrophe ou d'attentat», suggère la surveillante médicale. «On a mis une demi-heure pour connaître le nom et l'âge de la victime H.Hadda qui a été sérieusement choquée», a-t-elle affirmé. «Le personnel essayait à la fois de soigner les victimes et de les rassurer pour qu'elles surmontent le choc... Je vous assure, ce n'est pas du tout facile». Si on a pu facilement accéder à l'hôpital de Ben Aknoun, les choses n'ont pas été si faciles au niveau de l'hôpital Mustapha. Des instructions fermes ont été données aux services de sécurité pour empêcher l'accès des personnes étrangères au sein des différents services. Un élément de la sécurité a affirmé que 4 personnes mortes sont à la morgue de l'hôpital. Il a ajouté qu'on ne pouvait pas accéder aux différents services de l'hôpital puisque les victimes continuent à recevoir des soins et que leur cas est sensible. Les 20 blessés évacués à l'hôpital Beni Messous ont tous quitté les lieux.


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