Algérie

Tébessa: Le tapis N'memchas, symbole de l'art traditionnel



Ce fut un temps où on célébrait le tapis ‘N'memchas', originaire de la région de Tébessa, un tapis traditionnel dont la réputation a franchi les frontières. Un produit artisanal de qualité pour la richesse de la première matière, la laine et les colorants naturels utilisés dans sa fabrication. Puis et surtout, le savoir-faire de quelques tisserands, hommes et femmes, aux doigts d'or, qui faisaient jaillir les couleurs et la lumière d'un tapis local, reconnaissable selon les experts, car le tapis ‘N'memchas' est unique. Il fut un temps où plusieurs familles possédaient leurs propres métiers à tisser ‘sadaya' et les accessoires de filage de la laine, cardes à main ‘gardech', rouet et son tissage, peigne, battoir, navette. Une laine travaillée puis envoyée au teinturier qui lui donnait les tons, selon le degré de la clarté ou l'obscurité voulue. Outre le tapis, les femmes s'entraidaient pour fabriquer le burnous, la kachabia ou encore la couverture (houli ou hanbale) Aujourd'hui, le métier s'est perdu dans les dédales de la concurrence impitoyable du produit manufacturé, importé des pays asiatiques, en particulier, un tapis de moindre qualité, bien-sûr. Le tisserand se meurt à petit feu et avec lui le teinturier, le laveur de laine, le vendeur de colorants. L'activité périclite. Les gens délaissaient ce beau tapis aux motifs bien particuliers, qui était prisé par les riches familles citadines, qui l'utilisaient pour l'ornement de leurs salles de séjour, mais aussi une source de vie pour les familles rurales. Dans les années 70-80, le tapis ‘N'memchas' était le symbole, de l'originalité et l'authenticité de l'art traditionnel algérien, on l'offrait en cadeau, aux hôtes de notre pays. Parfois ce tapis est très peu exposé, on préférait le stocker pour la valeur qu'il représentait. Peu de tisserands sont encore en activité. Les matières premières deviennent, de plus en plus, chères, conséquence, le prix du tapis augmente et n'arrive plus à trouver acquéreur. Un travail d'orfèvre d'un ou plusieurs mois est réduit à rien, à cause de la concurrence du tapis de fabrication industrielle, au prix de revient moins coûteux. Un tapis local, où chaque tribu se vante du sien, car les variétés se différent d'un douar à l'autre, jusqu'aux confins des Aurès, du côté de Babar à Khenchela et ses mechtas.Qu'en est-il du projet d'un espace réservé à l'Artisanat, que l'ex-siège des Galeries algériennes allait abriter, où seront construits des ateliers et locaux regroupant les artisans, l'objectif serait de valoriser les métiers de l'artisanat productif et surtout, la promotion et la commercialisation des produits artisanaux, avec, entre autres, l'ouverture de points de vente, aux postes-frontières et à l'aéroport de la ville, paraît-il. De même pour la création de postes d'emploi pour des dizaines d'ouvrières, car le problème est avant tout d'ordre financier. Un investissement qui pourrait relancer les activités de l'Artisanat, comme créneau productif et lucratif. Où en est-il aussi du centre d'estampillage du tapis local afin de lui conférer le label de qualité pour son exportation à l'étranger et préserver la propriété des droits de l'artisan. On fêtait le tapis, pour perpétrer des traditions et les transmettre aux générations. Voilà, que depuis, on a oublié ce rendez-vous annuel, la manifestation a disparu du paysage. Quand la gardienne du temple, la femme artisane, en l'occurrence se trouve confrontée à des multiples difficultés, pour acquérir les matières premières, puis pour tisser son tapis et le vendre. Elles vous le diront, ces tisserandes qui faute de mieux, ont dû renoncer. Le tapis est l'une des nombreuses facettes, du patrimoine culturel, à sauvegarde à lui redonner vie, à l'enrichir. C'est aussi, une ?uvre d'art et de créativité, un repère pour l'étude sociologique, une source d'inspiration pour le poète, l'artiste peintre, pour brosser le traits de l'âme d'un peuple, ses m?urs, ses espérances, son passé et son mode de vie. Un tapis à forte charge symbolique, exprimant dans ses divers modèles, une appartenance religieuse, ou renvoie à des croyances ancestrales. Modernité oblige, dites-vous, mais faudra-il penser à rendre moins agressifs, ces aspects dits modernes, qui portent préjudice aux fondements d'une culture populaire millénaire qui demeure, qu'on le veuille ou non, le ressourcement d'où puise notre mémoire collective. Faut-il aussi songer à redynamiser, la fête du mouton à Chéria, là également, la richesse animale est à protéger, un rendez-vous qui faisait la joie et la fierté des éleveurs, en venant exposant leurs bêtes, quand la race ‘Ouled Djellal' trônait sur les terres de parcours steppiques de Darmone et la plaine de M'chentel. Le métier d'éleveur, qui de nos jours connaît des moments difficiles, les fellahs sont parfois mis devant le fait accompli, du diktat des spéculateurs, la brebis synonyme de fécondité, n'est plus cet animal, qui rendait nos campagnes généreuses, où on allait chercher, le lait, le J'ben, le M'sali, K'lila, le Guedid, tous des produits du terroir, qui eux, également, sont mis dans le tiroir de l'oubli et ne font leur réapparition, que lors d'une exposition évènementielle. Tébessa, c'est aussi ce volet tradition multiforme, diverse, celle de nos mères, pères et grands-parents. Des pages entières de la personnalité d'une région, de son histoire et son devenir.


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