Algérie

Tebboune défend la commission Laraba



S'il n'a pas encore tranché les questions de fond, le chef de l'Etat semble avoir délimité les délais supplémentaires accordés au débat autour de la nouvelle loi fondamentale.Une semaine après l'apparition d'une polémique sur la position de membres de la commission de préparation de la mouture de la révision constitutionnelle, le chef de l'Etat tente de mettre fin à la controverse. Lors d'une nouvelle sortie médiatique, le chef de l'Etat prend la défense des membres de la commission Laraba et rappelle ses options pour la future révision constitutionnelle. Devant des journalistes rencontrés mercredi (l'interview a été diffusée vendredi soir), Abdelmadjid Tebboune a dit s'attendre à des "dérapages" autour des questions liées à l'identité nationale.
Il rappelle que le débat autour des composantes de l'identité nationale était "clos". Mais il rejette les accusations portées contre des membres de la commission de rédaction du projet de la loi fondamentale. Il estime que le professeur Ahmed Laraba est un "expert international" et un fils de chahid.
Il en est de même pour le professeur Walid Laggoune. Les deux hommes ont été la cible d'attaques virulentes venues notamment du courant islamiste. Les partisans de ce courant idéologique reprochent aux deux professeurs des déclarations tenues dans une récente interview à Liberté portant sur la définition de la citoyenneté. De toute façon, c'est "un nuage passager", élude le chef de l'Etat. Dans le fond, le président de la République défend ses options.
Il rappelle que c'est lui qui avait demandé de "réduire les prérogatives" du chef de l'Etat pour "partager le pouvoir" avec d'autres responsables. "Je n'ai pas attendu la rédaction de la Constitution pour déléguer une partie des prérogatives au Premier ministre", a-t-il encore indiqué. Il a montré un agacement face à certaines critiques qui l'accusent de vouloir établir une Constitution "monarchique".
En revanche, Abdelmadjid Tebboune a défendu l'idée de créer un poste de vice-président. "Nous avons vécu une expérience précédente qui a montré qu'un vide institutionnel peut être dangereux" pour le pays, rappelle-t-il. Il fait sans doute référence à la période durant laquelle la maladie d'Abdelaziz Bouteflika avait ouvert la voie à des "forces extraconstitutionnelles" pour s'emparer du pouvoir.
Interrogé sur la nature du régime politique à adopter, Abdelmadjid Tebboune a indiqué qu'une bonne partie des intervenants dans le débat ont montré une préférence pour "le système semi-présidentiel". L'homme ne semble pas avoir tranché la question. Mais il a plaidé pour un régime qui donne au pouvoir exécutif deux têtes, donc un président de la République et un Premier ministre.
"Les deux systèmes ont des avantages et des inconvénients", a-t-il tempéré. Le chef de l'Etat a défendu, une nouvelle fois, la possibilité donnée à l'armée algérienne d'intervenir dans des opérations de maintien de la paix dans le monde. Cette intervention "se fera de manière démocratique et avec l'aval des deux tiers du Parlement", a-t-il défendu.
"Nous disposerons d'une Constitution claire et transparente et notre armée aura le droit d'adhérer aux décisions d'instances internationales et régionales pour participer aux missions de maintien de la paix", a ajouté Abdelmadjid Tebboune qui rappelle que l'armée algérienne s'est déjà déployée en dehors des frontières nationales. Il aurait souhaité que le débat "porte" sur le fait que le déploiement de l'armée se fasse avec l'aval du Parlement.
"Le plus important a été omis, à savoir que l'armée n'interviendra qu'avec l'aval des deux tiers des représentants du peuple et non sur décision du Président", a-t-il insisté. Mais cela ne signifie pas que le pays "a changé de doctrine" parce que "l'Algérie ne sera jamais dans une attitude offensive", a-t-il ajouté.
S'il n'a pas encore tranché les questions de fond, le chef de l'Etat semble avoir délimité les délais supplémentaires accordés au débat autour de la nouvelle loi fondamentale. "Nous allons sans doute aller vers la fin du mois de juin", a-t-il indiqué. "S'il n'y avait pas le coronavirus, cela ferait longtemps qu'on aurait tout terminé. Mais là, nous avons perdu du temps", a-t-il rappelé. Il n'a cependant pas précisé quand la nouvelle loi sera adoptée définitivement.

Ali BOUKHLEF

"L'Algérie et la France ont des intérêts communs qui les obligent à travailler ensemble"
Pour la première fois depuis la brouille avec la France, Abdelmadjid Tebboune s'est longuement expliqué sur les relations algéro-françaises et sur ses liens avec le chef de l'Etat français. "Emmanuel Macron a montré des positions qui l'honorent, que ce soit ici en Algérie ou en France" sur la colonisation, a rappelé Abdelmadjid Tebboune qui fait référence à une déclaration faite, en 2016, par M. Macron alors candidat à la présidentielle dans une interview accordée au journaliste Khaled Drareni, aujourd'hui en prison.
L'Algérie et la France, "sont deux grands Etats, en Afrique pour l'un et en Europe pour l'autre, qui ont des intérêts communs les obligeant à travailler ensemble, mais cette bonne intention se heurte parfois à des tentatives de lobbies de susciter des conflits, et par conséquent de nuire à ces intérêts", a encore précisé Abdelmadjid Tebboune. Comme avec d'autres pays, l'Algérie entretient des "relations d'intérêts". "Nous avons des citoyens en France, et rien que pour nos enfants, nous devons entretenir des relations" avec ce pays.
Il en est de même avec les Etats-Unis et l'Allemagne avec lesquels l'Algérie entretient des relations "amicales". Cette intervention est intervenue quelques jours après le rappel de l'ambassadeur d'Algérie à Paris en signe de protestation contre la diffusion d'un documentaire par la chaîne de télévision française, France 5, sur le hirak en Algérie. "Nous avons expliqué à nos partenaires que la démocratie en Algérie se construit graduellement", a ajouté le chef de l'Etat. "Mais nous n'allons pas marchander notre souveraineté", a-t-il encore averti. Au sujet de la Libye, Abdelmadjid Tebboune rappelé la position de l'Algérie.
Le chef de l'Etat a indiqué que "l'Algérie est très peinée pour la situation dans laquelle se trouve ce pays frère, car elle a vécu pareilles tragédies et sait comment s'en sortir". Il a rappelé que "la solution pour la Libye ne saurait être militaire", tout en précisant que l'Algérie se tient à équidistance de l'ensemble des parties et est disposée à aider à mettre un terme à la crise et à l'effusion de sang.
"Le sang qui coule en Libye est bel et bien celui des Libyens et non de ceux qui y mènent une guerre par procuration", a déploré Abdelmadjid Tebboune qui estime que "quel que soit le nombre de victimes, le retour à la table des négociations est impératif, d'où la nécessité de les engager". "Tous les belligérants en Libye ont accepté la médiation algérienne parce qu'ils savent que l'Algérie n'est motivée par aucun intérêt", a encore rappelé le chef de l'Etat qui a relancé l'appel à des négociations inter-libyennes.

Ali B.


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