Algérie

Taux de change : Des satisfactions et des regrets Repères éco : les autres articles



Taux de change : Des satisfactions et des regrets                                    Repères éco : les autres articles
Très peu d'observateurs nationaux analysent en profondeur les politiques de taux de change et leurs répercussions sur le mode de fonctionnement de l'économie nationale. Cet oubli conscient est probablement dû à une observation importante : la politique de taux de change n'est pas un facteur bloquant pour le développement économique. Il ne se situe pas comme un frein à la croissance et au développement.
Même si des améliorations peuvent être apportées, considérant la structure de l'économie nationale, ce qui se fait en matière de gestion du taux de change est relativement admissible. J'ai eu à lire certains commentateurs spécifiant que nous devons libéraliser le taux de change et autoriser les flux de capitaux. Je ne pense pas que nous soyons arrivés à une telle étape de maîtrise de notre développement.
De nombreux pays, pourtant plus performants que nous (Indonésie, Thaïlande, Corée du Sud, etc.), ont décidé d'abandonner l'idée d'une liberté totale des flux de capitaux. L'argumentation de ces libéraux extrêmes repose sur les indicateurs macroéconomiques et les réserves de change.
Cependant, une analyse des plus superficielles révèlerait que les fondamentaux économiques sont mauvais (productivité, création d'entreprises, exportations hors hydrocarbures) et que nous bénéficions d'une conjoncture internationale favorable. C'est uniquement la rente qui produit la croissance hors hydrocarbure et qui a contribué à améliorer les réserves. L'économie algérienne est extrêmement vulnérable aux fluctuations des marchés mondiaux de l'énergie. Il suffit de trois mauvaises années pour que les réserves s'effondrent et que les transferts de capitaux deviennent problématiques. Il ne faut pas confondre indicateurs macroéconomiques et fondamentaux d'une économie. Nous avons de bons indicateurs et de mauvais fondamentaux.
Faire la part des choses
Nous avons une politique de taux de change qui consiste à opérer un glissement orienté de la valeur du dinar, en vue de réaliser un équilibre entre les quantités de monnaie offertes sur le marché par la Banque d'Algérie et les quantités demandées par les opérateurs économiques. Ce système a permis à l'économie algérienne de fonctionner sans grandes difficultés majeures induites par ces mécanismes financiers internationaux. Certes, le taux de change parallèle est toujours plus proche de la réalité économique de l'offre et de la demande.
A plusieurs reprises et pendant de longues périodes, le taux de change officiel et le parallèle ne différaient que de 5 à 10%. On a eu même droit à un événement exceptionnel pendant une semaine où la valeur du dinar algérien par rapport à l'euro était plus élevée au niveau du marché parallèle. Ce n'est que récemment que l'on commence à avoir des différences de 30 à 40% entre les deux taux. Et nous n'avons ni explication officielle ni académique sur le phénomène. La valeur du dinar se heurte à des problèmes beaucoup plus complexes comme ceux de la faiblesse de la productivité et l'orientation des ressources des agents économiques vers l'importation plutôt que la production de biens et de services. Nous avons donc deux chantiers importants qui puissent booster la valeur de notre économie : rendre nos entreprises plus compétitives et notre économie plus productive. La politique du taux de change, à elle seule, prise isolément peut faire peu de choses, pour améliorer la compétitivité internationale de notre pays, et par là, rehausser la valeur du dinar.
A cette étape de développement, rendre le dinar convertible serait prendre des risques énormes vis-à-vis de notre économie nationale. Les libéraux extrêmes qui prônent cette solution doivent savoir que les expériences dramatiques ont conduit les institutions internationales à revoir leurs positions. Elles ne forcent plus les pays émergents à adopter une telle attitude et demeurent très réservées quant à sa pertinence. Préconiser une telle attitude pour l'Algérie avec les structures économiques actuelles serait suicidaire. Alors que peut-on faire pour améliorer la situation '
Pistes possibles d'amélioration
Il est inadmissible qu'un pays de la taille de l'Algérie et aussi ouvert puisse fonctionner sans des bureaux de change. L'administration n'est pas outillée pour satisfaire au mieux tous les besoins de financement.
Certains seront forcément évacués vers les bureaux de change. Il y a beaucoup de questions à régler pour les ériger, mais elles ne peuvent pas être insurmontables. Beaucoup de pays disposant de moins de ressources et de moins de compétences ont érigé ces institutions. Nous avons là une faiblesse manifeste décriée par la vaste majorité des citoyens. Il y a un consensus entre économistes algériens, opérateurs économiques et analystes de tout bord que l'absence de ces bureaux de change constitue une faiblesse manifeste de l'économie nationale et une lacune dans l'action des autorités monétaires. Il faut réussir à les ériger. Il y a beaucoup de questions de détails à régler.
Dans des cas pareils, nous avons toujours des alternatives avec leurs avantages et inconvénients. Mais le pire serait de choisir de ne pas trancher. Le confort de l'inertie arrange bien beaucoup de nos bureaucrates. Mais l'économie consiste à prendre des risques calculés. On ne peut pas attendre de lever tous les obstacles avant d'agir.
Le premier problème concerne le différentiel toléré entre les deux marchés. Dans notre contexte, il faut prendre l'écart le plus grand possible, qui est compatible avec nos engagements internationaux. Si on peut aller vers 5%, 10% ou 20%, il ne faut pas s'en priver. Mais si on persiste à vouloir disposer d'un intervalle de 1%, l'opération devient pratiquement impossible à réaliser. Mais pour qu'il y ait un écart moins important, il faut que les bureaux de change aient accès à une offre importante de ressources financières. Il y a comme un consensus national de ne pas injecter des ressources de l'Etat tirées des hydrocarbures dans ce marché. Cette idée est bien raisonnable. Ces dernières doivent financer uniquement le développement économique et les besoins les plus prioritaires de la population.
Mais en plus des opérateurs actuels (immigrés, agents économiques établis à l'étranger, etc.), nous avons plusieurs pistes pour mieux alimenter ce marché. Il serait possible d'autoriser les exportateurs hors hydrocarbures d'échanger 50% de leurs avoirs sur ce marché. C'est autant une source de motivation pour l'exportation hors hydrocarbure que pour faire fonctionner correctement ce marché. Cette idée n'est pas la mienne. Elle est formulée par des experts financiers algériens. Et, elle est fondamentalement bonne. Les importateurs de certains biens de luxe peuvent se voir obligés d'effectuer leurs opérations internationales à travers les bureaux de change. Il faut également garantir un minimum d'anonymat comme c'est le cas de tous les bureaux de change des pays émergents.
Toute la problématique réside dans l'amélioration de l'offre en monnaie étrangère de ces bureaux afin que le différentiel de taux ne soit pas trop important. Par ailleurs, le taux qui va prévaloir au sein de ce marché libre, mais régulé est plus révélateur de la valeur réelle du dinar. Il va servir à orienter les politiques de glissement du dinar vers sa parité réelle. Orientation de la valeur officielle et politique d'alimentation du marché par des ressources autres que celles de Sonatrach permettront de faire fonctionner ce marché d'une manière acceptable. De toute façon, il faut trouver des solutions.
Les experts algériens et étrangers peuvent apporter beaucoup à la réflexion et à l'action. Il faut solliciter l'intelligence de tous. C'est l'inertie qui est inconcevable. Par ailleurs, nous avons créé une opportunité historique d'établir une très grande déconnexion entre les prix des produits de première nécessité, la valeur du dinar et les prix internationaux. Les différentes subventions supplémentaires d'huile, du sucre et autres simplifient énormément la tâche. Un glissement du dinar se serait plus synonyme d'émeutes et de problèmes sociaux graves. Il faut débattre seulement des quelques autres produits à mettre dans le panier. Rien n'est ingérable, sauf l'immobilisme.


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