Mammeri s'en serait réjoui : son deuxième roman Le sommeil du juste a été traduit en tamazight sous le titre Taguni Nwin Ighezzan. Celui qui s'est attelé à la rude tâche, Djamel Laceb, affirme avoir découvert par «un heureux hasard ce roman qui me fut comme destiné».«Déjà au collège mes premières lectures mammeriennes furent des extraits du Sommeil du juste et quand enfin un cousin nous ramena deux beaux titres La Colline oubliée et Le Sommeil du juste, je devais lire le Sommeil avant la Colline. C'était la chaîne... Depuis c'est celui que je préfère et lorsqu'enfin la Colline daigna s'offrir à moi, c'était trop tard. Le charme du Sommeil avait opéré sur moi», raconte-t-il un tantinet nostalgique.
Pour cet inspecteur de l'éducation, les personnages du deuxième roman du jeune Mammeri ressemblaient trop aux siens pour «le laisser distraire par la fraîcheur certes inégalable de la Colline». «L'atmosphère sombre du Sommeil était si envoûtante sur l'esprit du jeune collégien que j'étais que certains chapitres me laissaient dans des états d'âme inoubliables», se rappelle-t-il toujours.
D'ailleurs, il se demande, intrigué, si l'auteur n'aurait pas eu vent de certains épisodes historiques propres à sa famille grâce à l'amitié qu'il entretenait avec son oncle Laceb Mokhtar dit Mokrane, professeur d'anglais à la Faculté centrale d'Alger (actuel Benyoucef Benkhedda) : «J'étais capté par la souffrance du tuberculeux qui donna ses derniers instants de vie pour que sa famille ait un peu de répit. J'étais aussi saisi par l'histoire de la veuve qui devait se remarier obligatoirement avec le frère du défunt mari, car ce fut un épisode vécu dans le village par plusieurs personnes de ma connaissance.»
La famille du traducteur recevait Mammeri à la maison au village Bouadnane, dans la commune d'Iboudrarene.
«Nous recevions Mammeri dans le magasin même de mon grand-père qui fermait boutique à cette occasion. C'est assis sur un sac de farine que j'ai, pour la première fois, écouté Mammeri discourir sur cheikh Mohand.
Donc naturellement quand s'est tenue une discussion sur le Sommeil du juste j'ai émis le v?u de pouvoir le traduire», signale-t-il, remerciant au passage le secrétaire général du HCA, Si El Hachemi Assad, qui lui a fait confiance en lui confiant un tel travail.
Le traducteur, à la modestie chevillée au corps, reconnaît que ses compétences et intérêts professionnels ne pouvaient pas plaider en sa faveur, car étant enseignant de physique au départ, puis directeur et actuellement inspecteur d'administration :
«Seulement, mon amour pour l'?uvre m'a ouvert une porte. J'en parlais avec aisance, connaissant les moindres détails de l'intrigue ainsi que l'essentiel de la symbolique contenue dans le texte. Cette somme de connaissances est obtenue grâce à mes innombrables relectures du livre.»
Le traducteur, qui avoue que son orthographe «laisse vraiment à désirer, car venu tardivement à l'écriture en tamazight», signale qu'il s'est fait entourer d'amis qui partagent les mêmes passions que lui, mais pas les mêmes tares. Il cite : Abdenbi Mohand Ramdhane, Hadj Said Abdenour, Boussad Kebir et Salem Usalas, de son vrai nom Salem Ait Ali Belkacem.
Laceb regrette, toutefois, que la version publiée par son éditeur, pourtant un professionnel (Flici Othmane, responsable de Dar El Othmania), ne soit pas celle corrigée : «L'éditeur a promis de retirer de la vente ce qu'il a mis sur le marché et de refaire une réédition du texte corrigé.»
Poète à ses heures, Laceb Djamel écrit aussi des scénarios. Il a été primé lors de la 9e édition du Festival du film amazigh d'Agadir «Prix du meilleur scénario» pour un film réalisé par Mokrane Hammar intitulé Yir Abrid. Un recueil de textes, coordonné par lui, devrait sortir le jour de l'An berbère, désormais chômé et payé.
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Posté Le : 29/12/2017
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Nadir Iddir
Source : www.elwatan.com