Algérie

Tags, graffitis et rap comme moyens d'expression des jeunes : le poids des maux Arret sur image



A.Lemili

Au début des années 80, Jacques Attali disait qu'il «'valait mieux se plonger dans les textes de Renaud que dans les analyses de trois sociologues réunis». C'est vrai qu'en chantant Hexagone, Laisse béton, Mon beauf ou encore Dans mon HLM, le Gavroche du film «Les misérables » résumait de formidable manière à travers des stances qui lui sont propres les maux qui rongeaient la France et plus sérieusement sa jeunesse. Une légion de sociologues réunis en Algérie ne résumeraient pas les tumultes intérieures des jeunes Algériens et ne décoderaient certainement pas cris et coups de gueule matérialisés à travers les tags et graffitis qu'ils passent leur temps à graver sur les murs désolants de cités hideuses, de collèges, lycées, cages d'immeubles jusqu'à terminer par un tatouage parfois de mode effaçable avec le temps et indélébile pour les plus «durs».
Des rappeurs, ils s'en trouvent à Constantine et s'ils ont commencé à chanter protestataire au départ et pour cause le mal de vivre des jeunes dont ils sont censés être le vecteur, ils ont fini dans leur majorité à rentrer dans les rangs une fois récupérés dans le cadre des évènements et autres manifestations officiellement célébrés. Mehdi alias Biggie G est sans doute le seul à être demeuré fidèle à une rébellion qui fait d'ailleurs sa notoriété et force le respect de ses fans. Tags et graffitis sont incontestablement le prolongement du rap et inversement. Dans la ville de Constantine, les inscriptions qui pullulent dans les cités devraient en réalité servir de feuille de route aux responsables au niveau des pouvoirs publics. Faudrait-il toutefois que ces derniers en comprennent le sens. Quelques universitaires, notamment des sociologues, ont effectivement tenté, il y a quelques années au cours d'un important colloque sur la jeunesse et les désarrois qui la laminent, d'en expliquer les raisons et de fournir des pistes à la société à même de lui trouver des exutoires qui ne se situeraient pas au seul stade de la répression et/ou de la compassion, mais plutôt de transformer cette intelligence en bouillonnement culturel spécifique sans pour autant penser à le domestiquer.
A Constantine le tag n'est plus la marque de fabrique du jeune issu de la classe pauvre mais l'identification par excellence d'une catégorie de la population qui ne se sent plus bien dans sa peau et qui, malgré les différences de classes sociales, se retrouve unie dans les joies passagères ou une détresse définitivement ancrée. Certaines âmes bien pensantes s'efforcent parfois à effacer des graffitis dérangeants dont le mérite est pourtant d'immortaliser ce que pensent tout bas, dans leur quasi majorité, les membres de la société locale. Ainsi messages d'amour, hymne au nirvana que fournirait la consommation du kif, insultes à l'endroit de tout ce qui symbolise l'ordre, apologie du sexe, etc'
Dans l'une des communes de la wilaya, un maire avait été l'un des premiers à anticiper au début des années 2000 sur la question de la culture de rue et plus particulièrement du revêtement des murs de diverses inscriptions, dessins, slogans mais le message trop bon chic bon genre, paternaliste avait plus rebuté les jeunes qu'obtenu leur adhésion ou quelques témoignages de sympathie.
A. L.


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