Algérie

Taghit et Béni Abbès veulent sortir du tourisme occasionnel



2000 touristes étrangers en 2010, seulement 800 en 2011.

La Saoura, si lointaine du grand Sahara où plane toujours le risque sécuritaire, souffre des bruits environnants. Les nationaux assurent les nouveaux flux touristiques. Sporadiquement. Cette fois ce sont les infrastructures qui sont en retard. A Taghit et Béni Abbès, l'envoûtement reste toutefois garanti au pied de la dune.

Wakda, le nouvel hôtel de Bechar, la capitale de la Saoura, inauguré depuis deux mois, a toutes les apparences d'un établissement de «luxe». En fait, difficile de le classer. «L'hôtel a un hall de 4 étoiles, des chambres de 3 étoiles et… les sanitaires d'une seule étoile», relève, satirique, un inspecteur de tourisme, aujourd'hui à la retraite. Les légères carences sont largement compensées par le sourire et la disponibilité du personnel.

 Taghit, la fameuse palmeraie éternisée dans les livres scolaires algériens avec le qualificatif d'«enchanteresse», est reliée à Bechar, à 100 kilomètres de là, par une route impeccable. La palmeraie se dévoile sans préliminaires, au sortir d'un virage. L'arrêt s'impose. Rituel de la première visite. Et des suivantes. La contemplation époustouflante d'une combinaison miraculeuse. Le vert de la palmeraie, l'ocre du vieux Ksar, le doré de la dune géante au dessus de Taghit, ligne de crête qui cache le Grand Erg occidental.

 La générosité naturelle des habitants accentue le charme déjà exceptionnel de l'oasis. Les Taghitis se sont installés dans les habitations «modernes» du centre-ville, laissant le vieux Ksar dépeuplé. Moins de dix familles continuent à y vivre. Le touriste risque de passer un long moment dans ses méandres sans rencontrer personne pour lui indiquer la sortie.

UN NOUVEAU COMPLEXE TOURISTIQUE POUR TAGHIT

A défaut de retenir ses enfants, le Ksar a séduit, entre autres, deux jeunes de Kabylie, qui ont fondé, à 1100 km de chez eux au nord, la Maison des artistes où l'on fabrique des instruments de musique traditionnelle. «Nous avons appris la technique de fabrication du goumbri de la main d'un maâlam (maître) de la région», expliquent les jeunes, natifs de Béjaïa, au groupe de journalistes venus dans la cadre d'un eductour organisé par l'Officie national du tourisme (ONT).

 Taghit ne manque pas de lieux où l'on peut déguster un bon couscous, au-dessous d'une tente. Les affaires des professionnels du tourisme ne sont pourtant pas très fameuses. «Certes, il y a des périodes où l'on affiche complet mais, la plupart du temps, nous n'avons pas de clients», se plaint un restaurateur. Un avis partagé par Kada, le plus célèbre des guides touristiques de la région. «Nous avons accueilli des centaines de touristes dont des étrangers à l'occasion des fêtes de la fin d'année, mais malheureusement on passe des périodes creuses de plusieurs mois», explique Kada cité dans Le petit futé, comme «PDG de l'Erg occidental».

 Les touristes nationaux se font nombreux à l'occasion des vacances d'hiver et de printemps mais sont rares, à Taghit, les familles qui peuvent vivre uniquement du tourisme et de l'artisanat.

 En haute saison, lors de la fête du réveillon, notamment, des particuliers ouvrent leurs anciennes maisons aux touristes à des prix abordables ne dépassant pas les 1500 dinars la nuitée, par personne. Selon le directeur du tourisme à Bechar, Mohamed Boushab, Taghit devra prochainement renforcer son statut de principale destination touristique de la Saoura, en accueillant un complexe touristique à l'initiative d'un investisseur privé.

A L'HOTEL PUBLIC DE BENI ABBES, PLUS D'ALCOOL

A Béni Abbès - 250 kilomètres au sud-ouest de Bechar -, le paysage ne diffère pas beaucoup de celui de Taghit. Des palmeraies entourées de dunes et des cours d'eau rutilants attendent les visiteurs, toujours aussi rares. Les gens de Béni Abbès sont pourtant des plus accueillants. La ville dispose en outre de plus de lits que Taghit. L'hôtel Rym, un établissement public, a été mis récemment sous la tutelle de la direction d'El-Aurassi, le célèbre 5 étoiles d'Alger, tout comme l'hôtel public de Taghit en cours de réfection.

 Le premier acte de gestion de son nouveau directeur, installé depuis décembre dernier, a été de fermer le bar de l'établissement. «Pour compenser l'absence de clients, l'hôtel a été détourné de sa vocation touristique et a été transformé en cabaret durant de longues années», justifie le nouveau patron. D'après lui, l'établissement a accueilli 2200 clients dont 200 étrangers en 2011. Un chiffre qu'il espère doubler en 2012 après que le Rym eut bénéficié d'une enveloppe de 6,3 millions de dinars pour sa réhabilitation.

 Le début de reprise de l'activité touristique dans la Saoura initié l'année écoulée vient d'être contrarié par les craintes sécuritaires nourries par les attentats enregistrés en ce début de mars à Tam, pourtant à plus de 1500 km de là. En 2011, Bechar a enregistré plus de 35 000 touristes entre nationaux et étrangers contre 30 542 touristes en 2010. Le nombre des étrangers qui étaient de près de 2000 touristes en 2010, lui par contre, a baissé à moins de 800 touristes en 2011. Les «basculements politiques» qu'ont vécus la Tunisie, la Libye et l'Egypte ont affecté toute la région de l'Afrique du Nord, expliquent les responsables du tourisme à Bechar. Ils comptaient sur le coup de pouce d'Air Algérie. Les baisses de tarifs sur le Sud ont déçu. Trop de conditions exigées pour en profiter. Lot de consolation, la destination Bechar bénéficie enfin d'un aller-retour de jour à partir d'Alger. Jusque-là, c'était une destination nocturne.




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