Algérie

Système de santé : quelques pistes d'améliorations Repères éco : les autres articles



La santé constitue un domaine où on ne peut laisser entièrement et exclusivement les lois de l'offre et de la demande déterminer le niveau des soins et leur répartition entre les différentes catégories de citoyens. Mais il ne faut pas également s'en priver au point de laisser se développer des inefficacités, des surcoûts, du gaspillage et inévitablement des injustices. Nos administratifs ignorent, peut-être, un mécanisme économique et social fondamental : partout où l'on évince totalement le marché au nom des pauvres, des nécessiteux et des plus démunis, on finira par subventionner les meilleurs biens et services pour les plus aisés et octroyer des miettes aux catégories défavorisées.Cette observation a été validée dans tous les pays qui se sont essayés au socialisme (ex-pays de l'Est) ou qui ont totalement bureaucratisé le système de santé. Nous ne connaissons pas encore les lois économiques et sociales pour éviter cela et le défenseur acharné de ces distorsions a beau moraliser et fournir une typologie de raisonnement où prédominent des «si et seulement si» et des «normalement» rien ne changera au niveau des faits : de malheureux cancéreux périront à cause du manque de matériel de radiothérapie et de médicaments, mais l'élite se soignera gratuitement à nos frais à l'étranger pour des services qui existent dans nos hôpitaux. Le premier jalon de toute politique de santé commence par la gestion de la prévention.
Dans un pays en voie de développement, l'investissement en matière de santé le plus rentable demeure la prévention. Lorsqu'elle est efficacement gérée, avec des objectifs clairs, et dès lors que les moyens conséquents lui sont octroyés, elle permettra des économies de ressources considérables dans le futur. Eu égard à son importance et à l'économie de ressources qu'elle procure, toutes les dispositions de prévention seront gratuites.
La gratuité des soins pour tous les citoyens se justifie amplement d'un point de vue économique. Les citoyens ont tendance à négliger la prévention et à « sur-utiliser » par la suite les structures de soins et les médicaments. Nous devrions intégrer cette variante essentielle dans les dispositions d'incitation. Mais tout comme dans bien d'autres domaines, la gestion de la prévention se fera par objectifs, en responsabilisant des personnes et des structures identifiées et en construisant des systèmes de récompense/sanction autour des résultats obtenus. Cela nécessitera une profonde réorganisation avec des recyclages et des formations complètes pour les futurs décideurs.
La gestion de la prévention est trop sérieuse pour être réajustée quotidiennement sans disposer d'une vision et d'une stratégie dans le domaine. Une planification rigoureuse et méthodique permettra d'énormes économies de soins. Toute politique de santé commence par l'aspect du management de la prévention. Il ne peut y avoir de maîtrise des coûts de fonctionnement de l'appareil de santé sans une gestion rigoureuse de la prévention. C'est dans ce domaine-là que l'investissement étatique est rentable, mais encore faut-il savoir le gérer.
La gestion administrative de nos institutions étatiques est défaillante à bien des égards. Ce n'est pas en gérant notre système de prévention par la détermination des tâches que l'on peut espérer dégager des résultats concrets. Il est donc concerné par les nouvelles règles de management : critères de choix précis de dirigeants, mesure des résultats, politique de valorisation des ressources humaines et systèmes de contrôle (maîtrise du processus). On ne peut gérer efficacement la prévention sans revoir et reconsidérer ses approches et sa méthode actuelle.
De toute façon, un redressement économique global nécessite une révision profonde des méthodes de management de tous les secteurs, selon un schéma systémique et cohérent et non de simples replâtrages de façade çà et là auxquels on a souvent eu droit.
Comme il est de coutume d'avancer la préoccupation sociale comme une finalité en soi, sans savoir si elle finira par s'autodétruire en fin de processus, avançons tout d'abord les principes sur lesquels doit reposer notre système national de couverture des besoins sanitaires :
1. Responsabiliser les structures sanitaires à travers un système national de compétition de sorte à les motiver à fournir de meilleures prestations, en usant du minimum de ressources et ainsi alléger le budget de l'Etat ;
2. Inciter les citoyens à l'aide de mécanismes économiques à la modération et ainsi éviter les gaspillages et les inefficacités qui ont caractérisé le système de la «gratuité des soins». Il y a lieu d'introduire un ticket modérateur pour les plus nantis ;
3. Le système ne doit exclure aucun citoyen sous prétexte qu'il ne dispose pas de ressources suffisantes pour se soigner.
Tant que les responsables du secteur de la santé n'auront pas produit une démarche systémique qui part de la politique de santé et se retrouve détaillée jusqu'aux objectifs précis à atteindre à tous les niveaux : départements ministériels, wilayas, hôpitaux, polycliniques et même les plus petits services de ces derniers, les défaillances seront énormes. Il est clair que sans un système de rémunération/pénalisation bâti autour de ces objectifs, ces derniers demeureront des v'ux pieux. Gérer c'est mesurer, évaluer, améliorer et sanctionner (positivement et négativement). Ainsi, le schéma systémique inclut :
1. Des essais de prévision, même par scénario, du niveau des ressources qui seraient disponibles pour le secteur en fonction des possibilités financières du pays ;
2. La définition d'une politique de santé globale et intégrée en vue d'une utilisation rationnelle des ressources et après un audit des structures centrales et surtout d'un échantillon des structures d'exécution (hôpitaux, polycliniques). Cela constituerait en fait le début de détermination d'une stratégie sectorielle ;
3. La détermination des objectifs qui seront décomposés à tous les niveaux ;
4. Une réorganisation de toutes les structures en fonction de la nouvelle politique de santé ;
5. La détermination des profils souhaités, des critères de performance des personnes et des structures clés à tous les niveaux du secteur et la conception d'un système de rémunération, pénalisation capable de réaliser ces ambitions ;
6. Des systèmes de contrôle transparents, simples et adaptés à la nouvelle politique ;
7. Une politique de formation et de recyclage ;
8. Permettre aux citoyens les plus nécessiteux de disposer d'une couverture de qualité pour les soins de base.
Ainsi, on voit bien que le management des institutions à but non lucratif commence de plus en plus à ressembler à celui des entreprises économiques, avec des indicateurs bien différents. Il faut réussir le passage d'une gestion par les tâches à un management par les résultats. C'est un challenge énorme pour des institutions pas du tout préparées à fonctionner de cette manière. Nous avons occulté une multitude de détails. Mais on ne peut faire autrement lorsqu'on évoque un thème d'une telle complexité en un espace si réduit.


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