Lattaquié, principal port de la Syrie, ressemblait lundi à une ville
fantôme après la violence du week-end, alors que sous la pression d'une
contestation sans précédent, Bachar Al-Assad s'apprêtait à mettre fin à l'état
d'urgence en vigueur depuis près de cinq décennies. Les magasins et les écoles
de cette ville de 450.000 habitants, située à 40 km du village natal du chef de
l'Etat, étaient fermés lundi, après trois jours de violences. «La ville est
calme ce matin, mais les rideaux des magasins sont toujours tirés et les
fonctionnaires ne se sont pas rendus à leur travail. La majorité des écoles
sont fermées», a affirmé un habitant, Issam Khoury, joint par téléphone. Ce
journaliste et directeur du Centre de développement écologique et social a
assuré que «les forces de l'ordre n'étaient pas prêtes et ont été surprises par
l'intensité de la violence».
L'armée a déployé des renforts dans la nuit de samedi à dimanche. La nuit
tombée, dans les quartiers de cette ville où coexistent des sunnites, des
alaouites et des chrétiens, des comités de quartiers se sont constitués pour se
protéger contre l'intrusion de personnes étrangères, a indiqué M. Khoury.
La journaliste de l'AFP a vu, dans des ruelles, des jeunes qui avaient
placé des pneus, des blocs de béton et des plaques de bois pour ériger
manifestement des barricades de protection.
Ces trois derniers jours, 13 militaires et civils ont été tués ainsi que
deux insurgés, et il y a eu plus de 185 blessés, selon un bilan officiel et
hospitalier. Durant le week-end, des jeunes armés de bâtons et de couteaux
avaient attaqué des magasins et des habitants alors que des francs-tireurs
postés sur les toits d'immeubles avaient pris pour cible des passants.
M. Khoury a estimé qu'il était «trop tôt» pour déterminer qui étaient ces
hommes. Selon les autorités, il s'agit de «fondamentalistes» qui cherchent à
semer la division confessionnelle dans la ville. Selon Abdel Karim Rihaoui,
président de la Ligue syrienne de défense des droits de l'Homme, il s'agirait
de «ressortissants arabes de différentes nationalités qui possédaient des armes
et de grosses sommes d'argent». «La plupart des hommes armés ont été arrêtés
par la population qui les a remis aux forces de sécurité», selon ses
informations. Par ailleurs, et pour la première fois depuis
l'arrivée au pouvoir du parti Baas, le Parlement syrien a observé dimanche soir
une minute de silence «en témoignage de respect aux martyrs tombés et aux
protestations et revendications populaires». Selon des organisations des droits
de l'Homme, environ 130 personnes ont été tuées ces deux dernières semaines
notamment à Deraa, dans le sud du pays, épicentre de la révolte contre le régime.
Dans ce régime de parti unique, les députés ont aussi prié le président
Assad de venir expliquer les mesures de démocratisation promises, a indiqué
lundi à l'AFP le député Mohammad Habache. Il devrait annoncer notamment la fin
de l'état d'urgence imposé en 1963 lors de la prise du pouvoir du parti Baas,
l'instauration du pluralisme politique et une plus grande liberté de la presse.
A Deraa, où les manifestations se poursuivent malgré la répression, des
manifestants rassemblés lundi ont démasqué un «agent des services de
renseignement» qui s'était faufilé parmi eux, et l'ont arrêté, selon un témoin.
Des renforts de la Sûreté centrale envoyés de Damas patrouillaient les rues de
la ville de nouveau lundi après s'en être retirés samedi, notamment aux abords
de la mosquée Omari, où ont eu lieu des heurts meurtriers, ainsi que dans le
quartier Al-Mahata où se trouvent les bâtiments officiels.
La France a déconseillé à ses ressortissants de se rendre à Deraa et à
Lattaquié.
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Posté Le : 29/03/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Sammy Ketz De L'afp
Source : www.lequotidien-oran.com