résumé de la 95e partie - Le docteur délivre le permis d'inhumer...Après l'église, nous avons suivi le corbillard jusqu'au cimetière. Je me demande s'il y aura autant de monde à mon enterrement dans un an au plus ' Je ne le pense pas... Qui accompagnera mon cercueil jusqu'au Père-Lachaise ' Denys... Qui d'autre ' Le professeur Berthet... Il m'appréciait beaucoup. Les camarades de Villejuif ' Ils n'ont pas de temps à perdre... Des habitants d'ici qui auront été satisfaits de mes soins à domicile ' Il n'y en aura pas un... Ils ont besoin de moi, mais ils me détestent ! Ah ! j'y suis... Il y aura peut-être une personne qui fera exprès le voyage à Paris pour me conduire jusqu'à ma dernière demeure : Clémentine, par plaisir. Pour elle ce sera une véritable jouissance, comme l'enterrement de Mme Boitard en fut une pour moi, surtout au cimetière où nous avons tous, à tour de rôle, aspergé son cercueil d'eau bénite avant de défiler devant les gens de sa famille et de présenter les condoléances au notaire. L'eau bénite ne pourra pas la ressusciter et la poignée de main au mari trompé me sembla parfaitement bouffonne !
' Christiane passa devant maître Boitard juste avant moi. Denys aussi était là, plus inquiet qu'il ne voulait le laisser paraître. Il a eu tort : je savais, moi, que le lieutenant Deval ne viendrait pas à la cérémonie ! Sa situation d'amant le lui interdisait. Il a dû se terrer quelque part pendant toute la journée, n'osant même pas se montrer en ville. Je ne pense pas non plus qu'il utilisera la lettre : du moment qu'il n'a pas fait acte de présence tout à l'heure à la cérémonie, c'est qu'il n'a pas le courage de ses opinions. Ça l'accuse aussi indirectement dans les esprits bornés des gens de ce pays comme je l'avais prévu, on chuchotait déjà autour de moi, à l'église et au cimetière, que la belle dame s'était tuée par désespoir d'amour et qu'après tout elle ne s'était pas trompée en se croyant délaissée. La preuve éclatante de son abandon par l'amant était là dans cette absence inadmissible.
' C'est égal ! J'aurais bien voulu lire les deux lettres, surtout celle qu'a reçue l'amant ! Denys n'a pas voulu me dire ce qu'il y avait dans chacune d'elles à part la raison du suicide. Au fond cette femme s'est crue une grande héroïne de répertoire, une sorte de nouvelle Marguerite Gauthier qui se sait condamnée par un mal irrémédiable et veut disparaître en beauté après avoir laissé tomber quelques larmes sur une feuille de papier. En écrivant à l'amant, elle s'est attendrie sur elle-même, en s'adressant au mari, elle s'est libérée... C'est toute la différence entre les deux lettres. Eternelle comédie humaine !
' Je le reconnais : l'annonce par Denys de l'existence de ces lettres m'avait ennuyée mais je fus vite rassurée quand je sus que personne n'y était nommé. Maintenant que la terre du cimetière s'est refermée pour toujours sur le véritable secret de la mort de Mme Boitard, je peux envisager la suite des événements avec sérénité : finalement les deux lettres, au lieu de me nuire, vont me servir... N'ont-elles pas semé dans l'esprit de deux hommes très différents, le notaire et le lieutenant des Eaux et Forêts, la psychose du cancer ' C'est excellent, ça ! Qu'ils le veuillent ou non, ces deux hommes ne pourront plus jamais de leur vie entendre prononcer le seul nom du mal sans frémir. Et ils peuvent devenir rapidement mes meilleurs alliés dans la campagne anticancéreuse monstre que je ne vais pas tarder à déclencher dans le pays. (A suivre...)
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Posté Le : 31/08/2013
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Guy des Cars
Source : www.infosoir.com