Algérie

Superstition et ruée vers les talebs et les charlatans



Superstition et ruée vers les talebs et les charlatans
Les examens approchent à grands pas. Le compte à rebours est enclenché depuis quelques jours. L'apprentissage et les révisions qui constituent la clé de la réussite demeurent la seule constante, mais le mysticisme occupe aussi une place de choix chez un bon nombre de candidats. Evidemment ce sont certains parents, surtout les mamans, qui en sont les grands adeptes. Tous les moyens sont bons pour maximiser les chances de leur progéniture !
Les candidats sont en alerte générale. Les parents et surtout les mamans aussi. Dans notre société algérienne, quand on a un candidat chez soi, quel que soit l'examen qu'il prépare, toute la famille est solidaire. Soudée et unie comme jamais. Chacun y va de sa partition pour soutenir le candidat. Si les uns prodiguent des conseils ou jouent aux répétiteurs, d'autres par contre, en l'occurrence les mamans, usent d'artifices plus « mystiques ». Les demeures des « talebs » et « chouafates » se muent en lieux de prédilection pour les mamans. Car, comme l'explique Fadila, cette mère de famille rencontrée à la Toubou, un village où réside un grand marabout qui reçoit même les candidats aux élections, « quand on a un enfant qui passe un examen, cela devient l'affaire de toute la famille ». « Même si on se dit 'moderne' et très avancé mentalement et intellectuellement, nos réalités sont bien algériennes », termine-t-elle. Pour avoir plus de précision sur ce genre de pratiques, nous nous sommes rendus chez un taleb, dans un village situé à une dizaine de kilomètres du chef-lieu de la wilaya. Il ne reçoit que trois jours par semaine, samedi, dimanche et jeudi. Il faut arriver chez lui avant le lever du soleil, accompagné soit de la personne intéressée ou d'un de ses... sous-vêtements. Après un frottement des 'ufs aux sous-vêtements, le taleb d'un tour de magie casse les 'ufs dans un vieux récipient et les objets les plus hétéroclites sortent des 'ufs pourris. Généralement, des cheveux, du savon, du tissu rouge ou noir, des restes de viande, des grains d'orge ou de blé, etc. Le taleb ne donne pas d'explications et attend d'être payé. Certes, il n'y a pas de tarif fixé mais la coutume veut que celui qui donne plus est mieux servi. Une fois cette opération de nettoyage du s'hour achevée, on passe à l'autre étape qui consiste à préparer le candidat aux examens. Ces individus qui sont en général des personnes incultes, promettent le succès à tous leurs clients à condition que des sacrifices d'animaux soient faits. Poulets noirs, chèvres noires, de l'argent sont autant de choses qu'ils demandent pour accomplir le miracle. Cette fois-ci, nous nous sommes rendus à un autre taleb, dans un autre village, à la périphérie de la ville de Bordj Bou Arréridj. Il nous a été dit, après avoir fait les sacrifices et nous être doté d'un stylo pour le jour J, d'aller dormir, de ne plus nous casser la tête dans les révisions parce que le succès « est garanti ». « Les talebs ne font que s'adonner à des prières, donner des gris-gris et de l'eau bénite», révèle-t-il. En attendant que le miracle se produise, ce qui n'est pas évident parce que plusieurs candidats sont passés par là sans avoir connu le succès, les vendeurs d'illusions continuent de s'en mettre plein les poches sur le dos des candidats naïfs, souvent poussés par des parents irresponsables. Comme si la réussite à un examen pouvait tomber du ciel ou se trouver dans des mains occultes. Autre phénomène : certains élèves angoissés s'en remettent à l'aide divine en redoublant les prières, en visitant les zaouias, en remettant des sommes conséquentes aux mendiants dans la rue. Ils le font afin de s'assurer les bonnes grâces des esprits, une attitude irrationnelle pour des personnes qui étudient les sciences exactes et la philosophie' Une quête de spiritualité très intéressée qui attire une foule de jeunes sur les tombeaux des saints de la région qui reçoivent la visite d'un grand nombre de jeunes en période d'examen. En attendant, ils viennent en ces lieux boire l'eau de ces sanctuaires ou lire quelques versets du Coran, avant de disposer quelques pièces de monnaie et des bougies autour de la tombe du saint, pour s'attirer ses bonnes grâces. D'autres candidats se figent dans la superstition qui est un évènement aléatoire ou un objet quelconque d'origine naturelle ou artificielle avec une signification anthropocentrique et est capable d'influencer l'avenir. Autrement dit, il s'agit de perceptions d'intentions dans les choses qui entourent le candidat. « Chacun, secrètement, a besoin de s'accrocher à quelques signes définis comme 'favorables' pour évacuer son angoisse », disent les psychologues. C'est le cas dans des situations stressantes, telles que les examens, où des candidats portent sur eux un objet fétiche ou un signe en argent, des bonbons.... S'en remettre ainsi à des superstitions personnelles ne porte pas à conséquence, à la condition que l'absence de 'bon signe' n'implique pas l'échec. Car l'échec ou la réussite ne doivent rien au fait que vous portez une amulette ou un porte-bonheur sur vous.Pour un grand nombre de spécialistes, la superstition, c'est une croyance irrationnelle. L'homme est porté à croire à ce qui l'arrange. Rechercher la vérité demande souvent de l'effort et du temps, alors que les superstitions offrent une réponse facile et accessible à tous. L'homme prend pour vrai ce qui est le fruit de son imagination délirante. Comment croire que la patte de lapin et l'étoile filante soient des porte-bonheur et que voir un chat noir le matin ou passer sous une échelle serait maléfique ! Mais un autre aspect, souvent négligé par les élèves et les familles, est très important : le régime alimentaire nécessaire en cette période et les cycles de repos. Une nutritionniste conseille de « ne pas abuser de café, de se ménager des périodes de repos, d'éviter les veillées trop tardives. Une bonne alimentation et un régime équilibré riche en vitamine C stimuleront la mémoire. »


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