Algérie - Ras El Aioun


Souvenirs de Jacou
Nous gîtions dans la ravine que limitent au nord les enflures de tendres reliefs bleutés et chaque après-midi mes immatures impétuosités s'évertuaient à me reconduire vers l'oued. Quotidiennement, tout au long des étés de mon enfance j'ai fréquenté cette couleuvre qui de juillet à octobre débauchait mes courses de vélo, mes échappées ou mes nombreux tours de France imaginaires.

Les hommes l'avaient consacré sous la dénomination de Barika, ce qui voulait dire : la réussite ; il était lent, quasiment immobile comme un jeu de patience. Il réservait ses rares effervescences à nos moussons vernales en débordant une manne céleste qui inondait les plateaux ; alors les agrestes fellahs se précipitaient à leurs tours, se bousculant un peu, pour engeancer les spermes d'un levain espéré. Mais pour mon enfance, mon fleuve était charnellement étale, croupissant même dans ses coudes de rivières, bricolant une mousse farfouilleuses dans les bouquets de roseaux, au raz des ajoncs précoces. J'en savais toutes les sources, particulièrement celle qui se dépravait pour moi sous l'ombre de l'arche unique d'un pont à structure métallique. Soudain, mes fictifs ou oniriques coéquipiers, surprenaient mon ordre pour mettre pied à terre, quand la roue avant de la bicyclette tournait encore, nous étions déjà à nous accroupir au sol, à nous tasser pour déguster en rasant le filon de l'eau fait d'une fraîcheur et d'un exclusif goût de miel.


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