Sophia Hocini est journaliste et responsable des partenariats de la ZEP, une association qui donne la parole aux jeunes de quartiers défavorisés. À 25 ans, elle a déjà vécu mille vies et pousse les autres à témoigner et se parler.
« Quand j’essaie de me présenter en une phrase, je raconte que ma vocation c’est de tisser des liens », confie Sophia Hocini. Née en Algérie dans une famille kabyle, Sophia et sa famille fuient l’Algérie durant les années 90. Elle a 8 ans quand elle arrive sur le territoire français. Elle voit la France comme un espace de liberté, mais elle est très vite confrontée au choc d’avril 2002, où le Front National arrive au deuxième tour des élections présidentielles. Un événement en partie à l’origine de son engagement.
« Quand mon père a eu son premier boulot il m’a offert un cahier » : à partir de là , Sophia se met à écrire « J’ai commencé à écrire parce que ma mère ne sait pas lire et écrire, je me suis rendu compte très très tôt qu’avoir accès à l'écriture et la lecture ça permet de faire société, de créer des liens , se faire des amis … » C’est le premier pas vers l’émancipation pour la jeune femme, qui ne veut pas se plier aux règles d’une culture algérienne traditionnelle, qui enjoint les femmes à rester le plus discrète possible. « Mon combat au delà de tisser des liens c’est de rendre visibles les invisibles; la moitié de l’humanité est invisible à plusieurs égards, ça s’appelle les femmes ! »
Elle crée son blog à 17 ans pour être lue et se connecter aux autres. Son blog s’appelle La Robe Rouge, en référence à sa volonté de mise en lumière des femmes : « Quand tu vis dans ce milieu culturel et dans une cité, tu t’habilles pour te faire le moins remarquer possible et mon combat c’est d’être aussi, par mes vêtements, la plus visible possible ! »
Sophia commence très jeune à s’investir dans des associations, notamment l’AFEV qui fait de l’accompagnement par les étudiants de jeunes de quartiers difficiles.
« J’avais vocation à être prof de français, car pour moi pour libérer les pauvres, les femmes, les exclus, ça se passe avec le savoir. » Sophia quitte néanmoins l’Education nationale avant d’être titularisée, dégoûtée par le système de notation qu’elle juge
Engagée pour la jeunesse, les quartiers populaires, les femmes
À 21 ans, Sophia se présente aux élections municipales à Marseille, en 2014, puis aux élections départementales l’année suivante. Elle interpelle les élus sur les problèmes de son quartier sans être prise au sérieux, parce qu'elle est jeune, parce qu'elle est une femme.
Elle écrit Une Française de fabrication témoignant de son expérience de jeune femme issue de l'immigration dans la société française. Peu après, elle décide de quitter Marseille pour Paris.
Sophia parvient à trouver un logement après plusieurs mois difficiles : « J’étais devenue tellement mince que c’était facile de frauder le métro ! » Cette expérience confirme sa volonté de s’engager pour les jeunes..Elle s’occupe des partenariats à la ZEP, la Zone d’Expression Prioritaire. L'association organise des ateliers avec des jeunes très éloignés de l’écriture pour leur apprendre à structurer leur pensée, formuler un récit et pouvoir témoigner. Comme dit Sophia : « Quand on vit une situation, on est le mieux placé pour s’exprimer dessus, je milite pour que le témoignage prenne une place prépondérante dans la société. »
Elle fonde également en juin dernier l'association Tous Élus. C’est la première formation gratuite pour accompagner les jeunes à se présenter aux prochaines municipales, partout en France avec une priorité sur milieu rural , périurbain et les quartiers prioritaires. Elle s’engage beaucoup sur le sujet des règles , que ce soit contre la précarité menstruelle ou pour la lutte contre l’endométriose, dont elle est atteinte.
« Je considère que chacun doit pouvoir être libre de vivre où il veut, s’habiller comme il le souhaite »
Le féminisme de Sophia Hocini est simple : « Il faut un féminisme hyper clair sur le fait qu’une femme fait ce qu’elle veut , point barre. On ne commente pas comment elle s’habille, ses pratiques sexuelles etc... » Elle vit au croisement de nombreuses discriminations :« Quand j’ai des réunions partenaires je suis très souvent la seule femme, la seule jeune , je suis un ovni en fait ! »
Pour elle l’empowerment c’est transmettre et partager toutes les ressources pour que les femmes se sentent légitimes à prendre la place qu’elles méritent d’avoir. Son conseil est simple : « Lance toi, sois légitime, n’aie peur de rien ! »
Sophia sera présente au forum féministe parisien du 9 mars 2019 pour une table ronde sur la diffusion de la parole des femmes dans les sciences et les médias
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Posté Le : 07/03/2019
Posté par : Ghizou99
Ecrit par : Dahmene ghizlene
Source : Net