Algérie

Sonatrach face à l'érosion de ses contrats gaziers de long terme



La dépression du prix du gaz naturel sur le marché spot a sapé les anciens contrats. Ecart de prix trop grand. Les grandes compagnies productrices du gaz attendent la fin de la bulle gazière actuelle et la remontée de la demande mondiale. En attendant, elles font, ou, comme Sonatrach, se préparent à faire, des concessions commerciales à leurs clients, partenaires du long terme. Le ralentissement des investissements dans la chaîne gazière peut réhabiliter les contrats pluriannuels.

Dans un contexte de déprime du marché gazier international en 2009 et 2010, les compagnies russe Gazprom et norvégienne Statoil ont ouvert la brèche. La première a accepté que les prix de 10 à 15% de ses quantités commercialisés sous la formule contrats long terme soit fixés sur les prix spots. La seconde a été obligée d'emboîter le pas pour conserver ses parts de marché. A la source de cette pression sur les fournitures de gaz de long terme, un gap de prix devenu insoutenable. Durant l'année 2010, dite de montée en bulle du marché gazier, l'écart a atteint 10 dollars sur le million de BTU entre le prix moyen des contrats à longs terme et celui du marché libre (spot). Cet écart c'est légèrement réduit en 2011 mais demeure trop élevé pour ne pas mettre en difficulté les grands fournisseurs du marché européen, dont Sonatrach, accusés de vendre trop cher leur gaz naturel engagé par des contrats négociés dans une autre conjoncture de marché. «Je ne vois pas d'avenir pour les contrats long terme. Après la coexistence contrats long terme contrats spot, les contrats spot vont dominer le marché au cours des prochaines années», prédit un expert international dans le commerce du gaz. Plusieurs experts s'accordent à dire alors que la bulle gazière qui tire les prix vers le bas à cause d'un excédent de l'offre va se «dégonfler» vers 2013-2014, grâce à la reprise en cours de la demande mondiale du gaz. Mais au-delà, rien n'indique que les prix du gaz ne vont pas s'effriter avec une abondance de l'offre résultant de la montée en puissance du gaz non conventionnel ailleurs que sur le continent nord-américain, et des programmes ambitieux d'exportation de GNL du Qatar et de la Russie . «Il y aura beaucoup de gaz en spot. Il faut tenir compte de cela» ajoute l'expert.

Les investissements ralentissent face au risque marché

Dans une telle situation, certains grands pays exportateurs comme l'Algérie seront pénalisés. Avec la prédominance annoncée du marché spot, le risque marché redevient un handicap pour les investissements lourds dans le développement de projets gaziers. «Il faut 3 à 5 milliards de dollars d'investissements dans la chaîne gazière pour assurer un volume d'exportation de 8 milliards de mètres cubes par an. Pour que le producteur investisse dans cette chaîne, il faut qu'il soit certain de la rentabilité de son projet. Cela devient moins évident avec les contrats spots». L'avantage des contrats de long terme est qu'il sécurise l'investisseur en lui assurant une prédictibilité de ses revenus sur plus d'une décennie. Les difficultés de Alnaft à attirer des grandes compagnies sur le domaine minier algérien ne sont pas expliqués uniquement par la faible attractivité de la fiscalité de loi Khelil révisée. Le développement d'un gisement gazier pour une commercialisation sur le marché spot est un risque trop grand. Même si la conjoncture des prix peut se retourner. En 2007-2008, les prix du marché spot étaient plus élevés que ceux des contrats de long terme. Ce qui avait d'ailleurs poussé l'ancien ministre de l'Energie, Chakib Khelil, un peu novice sur le sujet, à affirmer que l'Algérie basculerait vers le marché spot une partie grandissante de son offre de gaz à venir, dans le cadre du plan des 85 milliards de dollars de m3 d'exportation par an. La bulle du gaz du marché nord-américain, pourtant prévisible dès le milieu des années 2000, a déprimé le marché spot du gaz. Une partie de la réponse des pays producteurs s'était esquissée en 2010 dans le plafonnement de leur offre dans le cadre de l'OPEP du gaz. Une piste irréaliste dans le court terme, selon les spécialistes mais qui fait sens si les pays producteurs ralentissent les investissements dans le contexte de marché actuel. Les derniers contrats significatifs de fournitures de long terme signés par Sonatrach sont liés au gazoduc Medgaz entré en activité commerciale en avril 2011. Rien qu'en 2010, deux projets, de maturité inégale, basés sur des contrats de fournitures à long terme ont été discrètement gelés. Le premier, le Galsi, doit acheminer, à partir des champs algériens, 8 milliards de m3 par an à l'Italie via la Sardaigne. Le second, le TSGP, prévoit de transporter du Delta du fleuve Niger jusqu'en Europe via le Niger et surtout l'Algérie, 15 milliards de m3 de gaz naturel par an. Les prix bas du marché spot sapent l'investissement. L'Europe réclame pourtant avec force un partenariat qui assure la sécurité de ses approvisionnements énergétiques. Les contrats à long terme n'ont peut être pas dit leur dernier mot.




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