Gas Natural préférait mettre des actions sur la table plutôt
que de régler 1,5 milliard de dollars de créance à Sonatrach.
Les négociations sont en cours, dans un contexte où tous les acteurs n'ont pas
intérêt à ce qu'elles aboutissent. La position de Sonatrach
en tant que grand fournisseur de gaz à l'Europe du Sud s'est précarisée depuis 4
ans. Mais pas complètement.
Les négociations
se poursuivent entre Sonatrach et Gas
Natural en vue d'une prise de participation de la
compagnie pétrolière nationale dans le capital de la société espagnole, qui
détient près de 70% de la distribution du gaz naturel sur son marché domestique.
Des sources concordantes confirment l'information divulguée il y a deux
semaines dans la presse espagnole. Gas Natural doit régler 1,5 milliard de dollars à la compagnie
pétrolière algérienne au terme d'un arbitrage international sur un conflit
commercial qui date de 2008. Gas Natural
a le choix, pour régler cette créance, entre recourir
à ses fonds propres, emprunter ou mettre ses actions sur le tapis en échange de
l'effacement de l'ardoise. La cession de ses actions à Sonatrach
semble la meilleure option pour Gas Natural. L'opérateur espagnol de gaz ne semble pas disposer
de liquidités court terme. De son côté le recours à l'emprunt serait trop
onéreux compte tenu de la conjoncture financière de l'entreprise. Toutefois, l'option
d'une cession d'actifs au profit de Sonatrach n'est
pas nécessairement bien perçue par tous les acteurs dans le secteur de
l'énergie espagnol et même à l'intérieur de l'actionnariat de Gas Natural.
«Le fait que ces négociations soient étalées
sur la presse espagnole, pourrait être interprété comme une volonté de saboter
l'opération» commente un ancien responsable du ministère de l'Energie. Certains
pointent du doigt Repsol qui selon des indiscrétions
aurait fait du lobbying pour discréditer la source algérienne de fourniture du
gaz, auprès des officiels espagnols. Le contentieux, toujours en suspens, Sonatrach-Repsol sur la non-exécution du contrat du
complexe de Gassi Touil a
forcément laissé des traces. Repsol est un
actionnaire de référence (25%) dans le capital de Gas
Natural, et l'arrivée de Sonatrach
dans le tour de table du grand distributeur espagnol «a peu de chances de se
produire sans son aval» estime une source d'affaire espagnole à Alger.
L'enjeu de la
remontée vers le client final
Sonatrach a-t-elle pourtant
un intérêt évident à entrer dans le capital de Gas Natural ? La stratégie de la compagnie consiste depuis plus
d'une décennie à venir sur «l'aval de ses clients», dans la distribution et la
remontée vers l'utilisateur de son gaz sur les marchés du sud de l'Europe où
elle est durablement implantée. «L'enjeu d'aujourd'hui est le client final» répètent les commerciaux de Sonatrach.
Avec une prise de parts dans Gas Natural,
Sonatrach peut mettre un pied sur le marché espagnol,
précisément dans la distribution du gaz aux entreprises et aux particuliers. «L'accès
de Sonatrach au marché européen, notamment espagnol
est stratégique. L'Algérie avec ses 4500 milliards de mètres cubes de réserves
ne peut soutenir à la longue la concurrence de pays plus riches en gaz comme le
Qatar avec ses 25.000 milliards de mètres cubes, et la Russie. Le premier pays
détient 6% du marché européen, contre 15% pour l'Algérie. Sa part va doubler
dans peu de temps. «Le GNL de Qatar a vocation à grignoter les parts de
l'Algérie. Et pas seulement lui. Notre pays va être dévoré par des pays dont
les réserves sont beaucoup plus abondantes. En ayant pied dans la distribution
sur le marché européen, il pourra capter en revanche une partie de la plus-value
tirée du commerce du gaz dont une bonne partie ne proviendra pas de la source
algérienne» estime un ancien responsable de Sonatrach.
Une capacité de
négociation fragilisée
L'accès du gaz
algérien au marché domestique européen constitue, en résumé, une option
stratégique. Pour les experts du secteur sa mise en Å“uvre passe par des prises
de participation dans des compagnies européennes de distribution ou par des
partenariats stratégiques croisés. L'Algérie n'a jamais officiellement répondu
à une offre du futur président Sarkozy, lancée lors de sa campagne aux
présidentielles de 2007 d'échanger des actions entre Gaz de France et Sonatrach. L'ouverture du capital de Sonatrach
était un premier obstacle juridique à la proposition, mais au-delà la partie
algérienne se pensait en position de force pour négocier l'entrée sur son amont
de grands acteurs énergétique étrangers. La conjoncture s'est retournée depuis
trois ans. Le prix du gaz est en dessous de 5 dollars le million de BTU sur le
marché spot. Les marchés de livraison à long terme sont dénoncés par les
clients européens et Gazprom a accepté de céder 15% de ses fournitures de gaz
de contrat de long terme, au prix – très bas – du marché spot. Autant
d'évolutions qui ont fragilisé la position algérienne. L'ouverture d'une brèche
dans le capital de Gas Natural
paraît, pour de nombreux spécialistes, une bonne opportunité pour reprendre la
marche vers le client final. L'autre enjeu pour Sonatrach
est clairement de continuer à paraître comme un grand fournisseur de gaz fiable
sur les 20 prochaines années. Or la mobilisation de nouveaux volumes de gaz a
pris de très sérieux retards ces dernières années. Elle continue à être
hypothéquée par le refus des grandes compagnies mondiales de répondre aux
appels d'offres de l'agence Alnaft dans le cadre de
la loi actuelle sur l'accès au domaine minier algérien.
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Posté Le : 14/06/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Salim Dali
Source : www.lequotidien-oran.com