Algérie

Soltani entre illusion et mise en garde



Abou Djerra Soltani croit dur comme fer à la victoire du courant islamiste aux élections législatives du 10 mai prochain. Sa conviction, le chef du MSP la puise dans le fait, selon lui, que le monde entier accepte aujourd'hui l'arrivée des islamistes au pouvoir. Pour cette raison, il exclut que les Etats-Unis ou la France s'avisent de leur barrer le chemin en Algérie. Lui en tout cas dit travailler à la victoire du courant islamiste et c'est la raison d'être de l'alliance électorale nouée entre son parti, le MSP, Ennahda et El-Islah, dont il ne doute pas du succès le 10 mai. Dans cette hypothèse, il a averti que l'alliance ainsi formée refusera que le président de la République l'oblige à accepter de mener sa politique ou son programme.Ce n'est pas anodin ce qu'a formulé ainsi le chef du MSP. Il a touché du doigt le véritable enjeu des élections législatives. Celui de la nature des rapports postélectoraux entre le chef de l'Etat et un gouvernement n'émanant pas de son camp mais de l'opposition, au cas où l'un des segments de celle-ci l'emporte dans les urnes. Dans ce cas de figure, l'on voit mal le chef de l'Etat aller à l'encontre du verdict des urnes en faisant appel à un Premier ministre choisi par lui ailleurs que du camp des vainqueurs de l'élection. Constitutionnellement, il a certes le droit d'agir ainsi, mais il se verra accusé de ne pas respecter la souveraineté populaire.
La Constitution amendée par Bouteflika ne prévoyait manifestement pas l'hypothèse d'une victoire électorale remportée par des forces politiques hostiles au programme présidentiel. C'est qu'elle a été amendée avant que ne s'élève au Maghreb et dans le monde arabe les tempêtes anti-régime. N'ayant pas vu venir le bouleversement, Bouteflika a imposé sa «marotte», consistant à réunir entre les mains du président de la République la totalité des pouvoirs et faisant du Premier ministre l'exécutant totalement soumis de sa politique et de son programme.
C'est cette forme d'organisation du pouvoir qu'Abou Djerra Soltani déclare par avance non conforme, car elle ignore les résultats des urnes. Selon lui, c'est au Premier ministre venant du camp des vainqueurs de l'élection de soumettre les réformes économiques ou politiques : c'est le choix du peuple.
Voilà une mise en garde qui promet de la «friture» en perspective dans les rapports du Président et de son Premier ministre dans l'hypothèse d'une victoire électorale des oppositions. A moins que la réforme constitutionnelle programmée ne vienne mettre un terme à une situation institutionnelle dépassée par les exigences du contexte.
Soltani a incontestablement mis le doigt sur une incongruité constitutionnelle qui n'a été rendue possible que parce que le pouvoir n'a jamais envisagé que vienne le temps où il sera bousculé et que le verdict des urnes puisse lui être défavorable. Mais se voir en vainqueur des élections avec l'alliance qu'il a concoctée avec Ennahda et El-Islah est pour le chef du MSP une «prédiction» aventureuse, loin d'avoir un début de crédibilité au vu des avanies organiques subies par sa formation et l'inconsistance de celles avec qui il a concocté alliance électorale.


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