Algérie

SKIKDA: Salah Balaska, un homme qui savait parler de Révolution


Ammi Salah s'en va et avec lui toute une époque, il vient de tirer sa révérence à l'âge de 77 ans, emportant avec lui ses mémoires marquées par une période durant laquelle il a mené aux côtés de ses frères, un combat implacable contre les forces coloniales. Une période qu'il a vécue et qui a marqué à jamais l'histoire contemporaine du pays. Salah Balaska, était un homme affable qui connaissait toute la région et tout particulièrement, Skikda la ville qui l'a vu naître, il y a 77 ans. Au fait de tous les évènements qui se sont succédé depuis la Seconde Guerre mondiale, il ne se faisait pas prier pour « se mettre à table » en racontant son passé qui se confondait avec celui de la région. C'était le genre de personne qui savait parler, alliant le geste à la parole, comme s'il revivait les faits du passé. Il avait aussi une certaine note d'humour qui rendait plaisant sa compagnie. Il passait des heures à raconter l'histoire récente en décrivant avec force détails tous les faits qui se sont déroulés devant lui et les évènements qui se sont produits dans sa région avec une précision déroutante due à une mémoire infaillible.
C'était d'ailleurs une personne incontournable quand il s'agissait de revisiter le passé ou de se remémorer des événements politiques, sportifs ou artistiques importants qui ont marqué Skikda.
Il était particulièrement prolifique en petites anecdotes vous laissant suspendus à ses lèvres, subjugués par tant d'éloquence et de passion qui animent cet homme qui n'avait aucune prétention matérielle.
C'était un patriote dont le seul souhait est de voir son pays briller de par le monde et son peuple profiter de l'indépendance acquise au prix de lourds sacrifices.
Il lisait presque tous les journaux et s'intéressait beaucoup à la chronique locale. Ammi Salah n'a pas suivi des études poussées car les conditions du moment ne le lui ont pas permis mais il étonnait néanmoins par sa grande connaissance de la culture. Une culture, qu'il a acquise par la lecture et le contact de certains intellectuels de renom.
Bien que moudjahid, il a toujours essayé d'éluder les aspects durs de la guerre d'indépendance pour ne pas choquer, il avait une autre méthode bien particulière de relater les évènements préférant laisser le soin à d'autres que lui le dire.
Au travers des certaines rencontres auxquelles nous avions eu la chance d'assister, Il raconta l'histoire d'un pilote français qui l'avait pris en chasse en plein désert où il était parti ramener de l'eau à ses compagnons mais qui se ravisa à la dernière minute.
C'était en 1959 non loin de Béchar. Repéré par l'avion de chasse français, l'avion équipé de mitrailleuse effectua un passage près de lui en rase mottes alors qu'il ramenait de l'eau à dos de chameau. C'était en plein désert et il n'y avait pas d'endroit où se mettre à l'abri. Le pilote français fonça une deuxième fois sur la cible facile qu'il était, d'autant que Si Salah portait un fusil et était en tenue, pour faire feu sur lui. Pourtant à la dernière minute au moment où il avait fait sa prière, l'avion reprit de l'altitude et s'éloigna pour disparaître dans le ciel sans user de son artillerie.
Un moment qu'il n'oubliera pas tout en sachant que le pilote français a certainement refusé à la dernière minute de l'exécuter. « J'ai quand même perdu dans l'affaire, le dromadaire avec son chargement d'eau ! » S'esclaffe-t-il. Si Salah, évoquait avec beaucoup de tendresse d'ailleurs, comment son chef et ami, Bachir Rouis dit « Nehru », décédé lui aussi il y a quelque mois de cela, s'est particulièrement montré magnanime à son égard lorsqu'il avait égaré sa carabine US, lors d'un pilonnage par l'artillerie française des positions ALN en Zone 08 de la wilaya 05. Il a rejoint l'ALN au Maroc en 1957.
Son instruction militaire, il l'avait effectuée au camp de « Laaraeche » près de Tétouan au Maroc avant d'être affecté à la zone 08, dans la wilaya 05 historique. Deux ans auparavant, il s'était rendu à Casablanca pour éviter d'être incorporé par l'armée française en tant qu'appelé du contingent.
Il s'est éteint, dimanche dernier, à Skikda où il a été inhumé, il restera une figure qui a su s'assurer une grande sympathie parmi les citoyens.
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