Algérie

Silence officiel sur la présence des observateurs



En d'autres circonstances, l'élection présidentielle aurait donné lieu à un grand tapage médiatique pour accréditer la "régularité" du scrutin, mais aussi pour exalter "l'exemple" algérien dans l'organisation du scrutin. À un mois du rendez-vous électoral, le gouvernement, qui s'emploie depuis plusieurs mois à convaincre de la pertinence du choix de l'élection et de la réunion des conditions pour sa tenue, ne souffle mot sur la présence ou non d'observateurs internationaux.Ni le ministère des Affaires étrangères auquel échoit le rôle d'inviter ces observateurs, ni l'Autorité nationale indépendante des élections (Anie) présidée par Mohamed Charfi, et encore moins le Premier ministre, qui régulièrement "présente l'état des lieux" au chef de l'Etat Abdelkader Bensalah, n'ont évoqué pour l'heure la question.
Pourtant, d'ordinaire, encore plus pour l'élection présidentielle, cette présence est exhibée par les autorités comme un gage de leur bonne foi pour l'organisation d'un scrutin régulier, répondant aux normes internationales, et comme témoin, aux yeux de l'opinion internationale, de la transparence de l'opération.
Interrogé, fin septembre dernier lors de son passage au Forum d'El Moudjahid, sur une éventuelle présence d'observateurs étrangers au scrutin, le vice-président de l'Anie, Abdelhafidh Milat, s'était contenté de répondre : "Ceux qui veulent suivre cette élection sont les bienvenus." Comprendre par là que leur présence est facultative.
Reste qu'au regard du contexte politique, du peu de visibilité et de l'incertitude qui plane sur le maintien du scrutin, malgré l'attachement du pouvoir à son organisation, il semble difficile à certains pays, notamment ceux de l'Union européenne, de dépêcher des observateurs à un rendez-vous qui, en plus d'être aléatoire, est loin de réunir les conditions que requiert un rendez-vous d'une telle importance.
Bien entendu, la Ligue arabe, dominée par l'Arabie saoudite et l'Egypte, deux pays réfractaires au vent de changement démocratique qui souffle sur certains pays, ou encore l'Organisation de la coopération islamique, voire l'Union africaine, peuvent concéder l'envoi de quelques observateurs, mais l'ONU ou l'UE.
Au-delà des zones d'ombre qui entourent le processus mené au pas de charge, le rejet du scrutin, sans cesse réitéré par le mouvement populaire qui ne donne pas des signes d'essoufflement, l'UE, qui avait dépêché des experts en 2012 et en 2017, n'avait pas manqué de relever les "carences" dans un rapport dont la divulgation à l'été 2017 en exclusivité par Liberté avait agacé Alger. Dans son rapport, l'UE a préconisé une série de recommandations, mais mises sous le boisseau par les autorités.
Outre l'amendement des lois sur les partis et les associations, ainsi que celle relative aux manifestations publiques et le code pénal, l'UE préconise l'établissement d'un registre électoral consolidé au niveau national, l'amendement du code électoral, afin d'assurer aux représentants des partis politiques et des candidats un "accès systématique, en qualité d'observateurs, à toutes les étapes du processus", la promulgation de la loi sur la publicité pour consolider un "environnement médiatique plus libre et conforme aux obligations et aux normes internationales" et de larges prérogatives pour l'Arav.
Seule la mise en place de l'Anie, instance contestée, fruit d'un pseudodialogue mené par Karim Younès, et la révision des listes électorales sont à mettre pour l'heure sur le compte d'un processus aux allures d'un passage en force. Et si l'on y ajoute la récente sortie de la vice-présidente de la Commission des droits de l'Homme de l'UE, exprimant son soutien au hirak, autant dire que l'envoi des observateurs n'est pas à l'ordre du jour. D'où, probablement, le silence d'Alger.

Karim K.


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