Algérie

SILA 2018 : Stand des éditions Hibr



SILA 2018 : Stand des éditions Hibr


Tout a commencé à El Biar, sur les hauteurs d’Alger, à la fin de l’année 1963. Et tout s’y poursuit encore avec la Librairie Générale et les éditions Hibr (encre), créées le 16 avril 2006, date symbolique puisque Journée nationale du savoir en Algérie. M’hand Smaïl, qui gère les deux établissements et a créé le second, se souvient des débuts de cette épopée culturelle : «C’est à mon père qui a acquis, à l’indépendance, une petite librairie d’El Biar, située près de Cheval Blanc, que je dois d’avoir embrassé la carrière de libraire, puis celle d’éditeur. J’ai fait des études de droit à la faculté de Ben Aknoun et, par la suite, je suis entré dans un ministère où j’ai travaillé deux ans. Mais la vie et le travail de fonctionnaire ne me convenaient pas.

J’ai donc décidé d’aller travailler dans la librairie paternelle qui, en 1966, s’est déplacée vers son siège actuel, plus vaste et mieux situé, en face de la Place Kennedy.» Il faut préciser que le père de notre interlocuteur, décédé l’an dernier, fut un enseignant hors-pair qui a formé des générations d’élèves et voué toute sa vie à l’éducation, avec l’abnégation et la passion qui caractérisaient les «maîtres» d’antan. La librairie était pour lui le prolongement naturel de son sacerdoce pédagogique et, dans sa famille, le livre était un objet quasi-sacré. Aussi, M’hand Smaïl a-t-il évolué dans cette atmosphère de respect et d’amour de la lecture. Son caractère affable et sa courtoisie légendaire ont fait qu’aujourd’hui il est particulièrement apprécié par ses collègues libraires, comme par tous les professionnels du livre.

La Librairie Générale d’El Biar est un lieu estimé des lecteurs et lectrices d’Alger, de même qu’un emblème de l’histoire du quartier. Avec sa façade modeste et ses décors d’une simplicité reposante, elle incarne bien ces anciennes et rares boutiques de la capitale qui n’ont jamais dévié de leur activité et qui sont de plus en plus menacées par l’évolution anarchique de la ville et un modèle dominant de commerces éphémères et agressifs. Quand on y pénètre, le capharnaüm du carrefour principal du quartier semble disparaître aussitôt, laissant place à la contemplation des livres de tous genres. C’est la dernière librairie d’Alger en prenant la direction de l’ancienne route du Sahel, et elle est particulièrement précieuse pour les enseignants, étudiants et élèves de la grosse concentration d’universités, cités U, instituts supérieurs et lycées de Ben-Aknoun et de Bouzaréah. Régulièrement, elle organise des rencontres et séances de dédicaces des auteurs en promotion.

C’est elle qui a donné naissance aux éditions Hibr. «Mon expérience de quarante ans de librairie, dans une librairie qui a presque l’âge de l’indépendance du pays, m’a permis d’être en contact permanent avec les lecteurs et lectrices de tous âges et de me familiariser avec leurs besoins et leurs goûts très différents. De là est née, petit à petit, l’idée de fonder une maison d’édition qui tienne compte de cette expérience. La librairie et la maison d’édition sont donc complémentaires, mais je veille à bien séparer leurs activités. La librairie doit par exemple promouvoir les ouvrages de tous les éditeurs, avec loyauté et sans privilégier nos titres.» Actuellement, les éditions Hibr présentent un catalogue que leur responsable qualifie de «modeste» (à son image) mais qui force le respect en considérant que la maison vient d’atteindre à peine son sixième anniversaire. «Notre catalogue généraliste, ajoute M’hand Smaïl, privilégie les ouvrages dédiés au savoir et à la littérature, et ce, pour différents lectorats. Le lectorat universitaire et estudiantin, plus spécialisé, constitue pour nous une priorité ; nous publions à son attention des études et des recherches couvrant, principalement, les domaines des sciences humaines et sociales. L’enseignement et l’apprentissage ne sont pas en reste. Nous nous attachons aussi à favoriser l’émergence de nouveaux talents dans des domaines souvent délicats comme le théâtre ou la poésie.»

Le catalogue Hibr comprend près de 70 ouvrages répartis, presqu’à égalité, entre langue arabe et langue française. Cette diversité linguistique se double d’une diversité de genres et des thèmes d’ouvrages. Les essais, et parmi eux les essais historiques particulièrement, occupent une place de choix. On y compte des titres aussi divers que Dans la tempête de l’histoire, Hannibal et Jugurtha de Abdelkader Fathi ; Les Grecs, les Arabes et nous de Philippe Buttgen ; Les ressortissants européens et la révolution algérienne, 1954-1962 du Dr Hassina Hammamid (en arabe) ; L’histoire de la Turquie contemporaine de Hamit Bozarslan ; la trilogie de Benjamin Stora sur l’Algérie de 1830 à 1954, de 1954 à 1962 et de 1962 à 1988, etc. Les essais abordent volontiers les domaines littéraires et linguistiques, notamment en collaboration avec l’université, comme Littérature-Monde, Enjeux et perspectives ; Littérature algérienne contemporaine et actualité des symboles culturels, etc. On y trouve également de l’histoire de l’art comme avec l’essai de Rachid Mokhtari sur l’œuvre du chanteur Amraoui Missoum (1921-1967). Un des domaines les plus remarquables de ce catalogue, qui compte quelques romans, est bien la poésie où peu d’éditeurs s’aventurent. Hibr a publié aussi une pièce de théâtre, L’Algérie révoltée de Baazi Ben Omar. Diversité et courage, parfois témérité, semblent marquer cette sympathique maison d’édition qui apporte humblement, mais avec de belles surprises, sa pierre à l’édifice éditorial algérien.



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