Algérie

Signe particulier, homme des grands défis



Il a sa méthode. Il a son style. Il a son caractère, et il a sa philosophie pour convaincre, partager son expérience et réunir autour de ses objectifs ses joueurs.Il n'aime pas copier les styles de jeu, il aime réinventer le sien, créer des différences que cela plaise aux uns et déplaise aux autres. Lui, il trace sa feuille de route et dessine par son jeu ses objectifs. Djamal Belmadi avance et ne fait concurrence à personne, ce sont les autres qui essaient de le concurrencer. Ses statistiques le prouvent. A quelques mois de ses 45 ans, il ne veut pas encore cueillir des résultats que les autres, par leur faute, n'ont pas réussi. Pour les fêter et en faire des Verts une force du football national. Il rêve de la Coupe d'Afrique des nations 2019. Il la veut et promet de livrer bataille jusqu'à la toucher, ne serait-ce, de la pointe du pied. L'essentiel est de la frôler. Depuis sa venue, les choses changent et continuent de changer en empruntant un autre style de vie.
Il échappe aux rumeurs et n'écoute que sa conscience. Il fuit ceux qui veulent le traîner vers le piège qui ont fait des sélectionneurs précédents des exécutants. Pour lui, lorsqu'en 2010 il était nommé entraîneur de l'Al-Duhail, il savait que cette nomination était capitale pour lui, qu'elle était synonyme d'un pari fou, d'un engagement, voire d'une promesse à tenir pour faire de ce club le champion du Qatar. Le temps lui a donné raison, c'est ce qu'il réalisa par deux fois. Son passage en 2013, chez l'équipe du Qatar B, c'est aussi pour gagner, et pas n'importe quel pari. Il gagne le championnat d'Asie de l'Ouest, avant d'aller entraîner la sélection du Qatar où il cimente sa marque en remportant la coupe du Golf des nations. Il y a eu cette élimination avec l'équipe du Qatar à la Coupe d'Asie des nations au premier tour, par la suite, mais son passage était illuminé par des félicitations avant de revenir à Al-Duhail, où il remporta de nombreux trophées comme celui du Qatar par deux fois (2017, 2018), puis la Coupe du Qatar par deux fois (2016, 2018), et une fois la Coupe Crown Princeen 2018.
Voilà ce qui peut faire taire les entraîneurs qui sont passés par Dely Ibrahim, pour repartir les poches pleines, mais sans avoir laissé un seul résultat positif. Ce fut la déchéance, le temps où l'image de l'équipe nationale fut ternie avec la bénédiction de plusieurs personnes. Un gâchis, une véritable implosion de notre football, dont quelques-uns des auteurs sont encore au sein du bureau fédéral. Belmadi dérange mais résiste et fait face à ceux qui n'arrivent pas à le déstabiliser. En cette fin d'année 2018, l'équipe nationale retrouve ses équilibres. Prête à affronter les grands défis du football. Tout le monde y croit, et tout le monde reprend confiance. En cette fin d'année 2018, une occasion pour rendre hommage aux entraîneurs locaux africains qui ont réussi leur paris, alors longtemps chasse gardée des coaches européens.
Des Fédérations du continent ont compris, avec beaucoup de retard mais ont compris que les techniciens locaux peuvent aussi encadrer les équipes nationales. La liste des qualifiés pour la Coupe d'Afrique des nations (CAN) au Cameroun, du 15 juin au 13 juillet 2019, n'est pas encore close, puisque seuls treize des 24 billets disponibles ont été attribués. «Et sur ces treize équipes, huit sont entraînés par des étrangers, mais les choses pourraient s'équilibrer d'ici à la phase finale. Car sur le continent, 32 des 54 sélections affiliées à la FIFA sont désormais entre les mains d'un Africain...» Constant Omari, le président de la Fecofa, la Fédération de football de République démocratique du Congo (RDC) se félicite, «le niveau des techniciens africains ne cesse de s'améliorer, les résultats de nombreuses sélections le montrent. Des équipes comme celles d'Algérie, du Mali, de la Tunisie, de la Côte d'Ivoire, du Ghana ou du Gabon font confiance à des locaux».
En 2014, il avait ainsi nommé Florent Ibenge pour remplacer le Français Claude Le Roy. Un choix qui lui avait valu de nombreuses critiques, mais qu'il avait défendu mordicus : «Les supporters et la presse attendaient un étranger renommé. Moi, j'ai voulu donner sa chance à un Congolais, même si Ibenge a obtenu ses diplômes en Europe et qu'il y a travaillé, notamment en France dans des clubs amateurs. En Afrique, il faut faire tomber les barrières sociologues et psychologiques, ne plus avoir de complexe d'infériorité».
Rabah Saâdane surnommé «le Cheick», 7e dans une liste qui compte les «11 plus grands coaches ayant marqué l'histoire du football africain» désigné meilleur entraîneur par la Convention Internationale du Sport Africain. En équipe nationale algérienne, il a qualifié les Fennecs en demi-finale de la CAN-2010, ce qui n'était pas arrivé depuis 1990 (année où ils avaient gagné à domicile) et surtout au Mondial de cette même année, une première depuis 24 ans. Un confrère d'un journal européen faisait remarquer «des fédérations parmi les plus puissantes d'Afrique ont fait le pari de confier à un local le deuxième poste le plus exposé du pays, Ainsi, Mohamed Magassouba a attendu d'avoir presque 60 ans pour devenir le sélectionneur du Mali, en septembre 2017, après le départ du Français Alain Giresse».
Samedi 17 novembre, les Aigles maliens ont obtenu leur qualification pour la CAN-2019 grâce à une victoire au Gabon. Leur coach, méconnu en Europe, y a pourtant effectué une grande partie de sa formation. Titulaire d'une maîtrise de sciences économiques, il a obtenu son diplôme d'entraîneur sur le «Vieux Continent» et a sillonné l'Afrique avant de se voir confier la sélection de son pays. «La mode dans le football africain n'est pas aux entraîneurs nationaux. Sauf quand il n'y a pas d'autre solution, finances obligent. Et c'est ainsi que lorsqu'Alain Giresse a quitté les Aigles du Mali, il a été fait appel à Mohamed Magassouba, intérimaire».
Quatorze mois plus tard, cet homme qui a près de quarante années d'expérience bien qu'encore très jeune - il aura soixante et un an dans quelques semaines - vient de qualifier les Aigles pour la CAN Total 2019. Une belle leçon de patriotisme. Magassouba déclarait : «On doit beaucoup à certains. Ils ont apporté leurs compétences, leur expertise, car ils ont bénéficié d'une très bonne formation. Mais je pense que les écarts sont en train de se resserrer et je suis convaincu que les résultats obtenus par des Africains vont inciter les fédérations à nous faire de plus en plus confiance, même si les étrangers seront toujours les bienvenus. J'espère qu'un jour, on verra plus d'Africains exercer en Europe». L'Afrique peut relever tous les défis.


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