«Des éléments d'Al-Qaïda infiltrent les services du contre-espionnage les
plus performants dans le monde: le britannique MI5». Le journal anglais
traditionnellement proche des milieux militaires et des services secrets Daily
Telegraph en a fait la une, samedi 1er août. S'agit-il réellement d'une
infiltration ou d'une purge des agents de confession musulmane?
Un parlementaire conservateur,
président de la sous-commission parlementaire de lutte contre le terrorisme
interpelle le gouvernement de Gordon Brown pour tirer au clair une forte
présomption d'infiltration des services secrets par Al-Qaïda. Selon le député
conservateur Patrick Mercer, cité par le Telegraph, six employés de confession
musulmane du service de sécurité intérieure ont été écartés après des
révélations sur leurs antécédents politiques. Deux d'entre eux auraient
séjourné dans des camps d'Al-Qaïda au Pakistan et en Afghanistan. Les quatre
autres présentaient des lacunes suspectes de trois mois dans leur curriculum
vitae. Les deux agents soupçonnés d'avoir participé à des camps d'entraînement
auraient bénéficié de plusieurs semaines de préparation avant que les services
secrets ne découvrent leur vie passée. Les quatre autres ont été licenciés
avant le début de leur entraînement. Mais selon le Daily Telegraph aucun
d'entre eux n'a eu accès à des informations classées confidentielles, les
nouvelles recrues étant généralement soumises à des mois d'enquête avant de
pouvoir intégrer le siège des services secrets.
Le MI5 a affirmé qu'aucun de ses
employés actuels n'avait de liens avec une organisation terroriste quelle
qu'elle soit. «Nous prenons nos vérifications d'identité très, très à coeur», a
expliqué un porte-parole de l'agence de sécurité. Sept mois après les attentats
de Londres du 7 juillet 2005 (52 morts), les services de sécurité anglais ont
lancé une vaste campagne pour dénicher des musulmans. But déclaré: «Mieux
comprendre les motivations des quatre jeunes musulmans anglais poseurs de
bombes.» L'idée émane du Conseil supérieur du renseignement et du 10 Downing
Street.
Début 2007, le MI5 avait publié
des petites annonces dans la presse de la communauté musulmane. Des officiers
avaient donné des interviews à la chaîne asiatique de la BBC, très écoutée par
les Britanniques issus du sous-continent indien. Deux cents personnes avaient
été embauchées dont 70% dans la cellule antiterroriste. Le Telegraph juge que
l'opération de recrutement s'est faite dans la précipitation. Les six hommes
ont toutefois été «démasqués» avant d'avoir été formés aux techniques de
contre-espionnage ou d'avoir eu accès aux dossiers confidentiels, en
particulier les informations transmises par la CIA. Voilà qui ternit davantage
l'image de MI5. Libéré de Guantanamo (Cuba) en février, Binyam Mohamed a
déclenché une action judiciaire civile contre le MI5. Il affirme qu'un de ses
agents a fourni les questions posées lors de séances de torture dans un lieu
secret au Maroc.
Un temps est révolu: l'avant
attentats de Londres et Glasgow. Depuis, tout a changé. Fini le temps où les
autorités britanniques ont tenté de «sanctuariser» leur territoire en offrant
hospitalité et protection judiciaire aux extrémistes islamistes les plus
radicaux. Ainsi naquit, au début des années 90, le «Londonistan», d'où étaient
commanditées les actions des GIA en Algérie, du Djihad en Egypte, les attentats
de Paris en 1995... Après les attaques du 11 Septembre, la donne a radicalement
changé. La Grande-Bretagne s'est dotée d'une législation antiterroriste très
rigoureuse qui a permis de mettre hors d'état de nuire les principaux «califes
du Londonistan». Abou Hamza al-Masri, leader des Ansar al-Charia, et Abou
Qatada, le principal théoricien du salafo-djihadisme mondial, furent arrêtés en
2003. Omar Bakri, le chef de file de l'organisation al-Mouhajiroun, devenait
interdit de retour vers l'Angleterre après un voyage qu'il avait effectué au
Liban, en 2004. Et Rachid Ramda, le cerveau des attentats de Paris, était remis
à la France, après huit ans de procédure.
Les attentats Londres ont
reproduit le modus operandi classique d'Al-Qaïda: des exécutants venus d'Irak,
connectés à des «cerveaux» appartenant à un réseau britannique dirigé par
l'Indo-Pakistanais Dhiren Baret, connu aussi sous le nom de Reza al-Hindi.
Ainsi, les têtes de l'hydre djihadiste londonienne furent coupées. Mais le
cancer avait, auparavant, développé des «métastases». Une nébuleuse de
groupuscules de tous bords a donc survécu au Terrorist Act. Les autorités
britanniques exercent une surveillance accrue sur ces cellules. Mais en coupant
leurs têtes dirigeantes, elles les ont contraintes à plus de clandestinité,
estompant considérablement la visibilité sur leurs visées terroristes.
Un rapport secret remis au
gouvernement Blair, au début de l'année, sous l'intitulé «Données sur la menace
extérieure», illustre l'étendue de ce phénomène de morcellement de la nébuleuse
djihadiste londonienne. Ce rapport signale que le MI5 a collecté des
informations sur une trentaine de plans terroristes en préparation sur le sol
britannique, en moins d'un an, dont une attaque de type NRBC (nucléaire,
radioactif, biologique, chimique). Il estime à plus de 2.000 le nombre de
djihadistes clandestins en Grande-Bretagne. Quant aux groupuscules susceptibles
de commettre des actes terroristes, le rapport les évalue à 180 ou 200, pour la
seule région de Londres !
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Posté Le : 04/08/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : Amine L
Source : www.lequotidien-oran.com