Algérie

Selma ou le compromis salutaire



Elle corrige : «Non ce n’est pas vrai, je dis ça juste parce que je suis sur le point de me marier, mais en réalité, ça m’évoque tout autre chose.» Cette chose n’est pas facile à définir, dit-elle. Elle hésite puis poursuit : «En fait, c’est tout plein de contradictions auxquels je suis confrontée depuis quelques années déjà et pour résumer, je dirai qu’être femme en Algérie est une question de compromis.» Arracher quelques libertés, parfois au prix fort, jouer le jeu de l’hypocrisie sociale, tout en restant fidèle à ses rêves d’émancipation, telles sont ses contradictions. Selma fait partie de ces jeunes femmes partagées entre les pesanteurs coercitives des traditions et les besoins d’émancipation sans cesse grandissant. Elle est agent marketing dans une multinationale. Elle tente tant bien que mal de s’imposer dans un univers d’hommes. Et être coquette, peut poser bien des problèmes contrairement à ce qu’on peut penser : «Les pressions viennent de toute part, des personnes qui apprécient votre émancipation et qui veulent en tirer profit sur le plan professionnel, mais qui ne manquent pas parfois de la retourner contre vous pour vous amoindrir ou vous assujettir», explique-t-elle. Une confidence à peine voilée pour éviter de dire les mots qui fâchent : harcèlement sexuel, intimidation, discrimination. Mais Selma a une stratégie efficace pour y répondre : le compromis. Elle est coquette, aime sortir, voyager, faire des rencontres et se sentir libre, mais elle sait, quand il le faut et il le faut souvent, adopter l’image de la femme soumise et conciliante qui se plaît à jouer à ce qu’on appelle communément «bent familya» (une fille de bonne famille).
Qu’est-ce qu’une fille de bonne famille ' : «Certainement pas une fille libre, qui aime voyager et s’attabler souvent avec des amis», explique-t-elle, tout en précisant : «Bien sûr, selon le regard des conservateurs ! Mais dans le fond c’est une question de compromis.» Encore le compromis.
Elle y parvient bien même si elle n’est pas à l’abri des regards inquisiteurs et parfois même méprisants qui n’aiment pas ce compromis ou qui le comprennent mal. Ce modèle de vie, elle l’a arraché après bien des luttes. Au sein même de sa famille. «J’ai été intransigeante avec mes parents, bien que dans le respect. Ils ont eu du mal à accepter mes sorties, ma soif d’indépendance et mes ambitions professionnelles, mais ils s’y sont faits. Et maintenant que je me marie, ils n’ont presque plus d’inquiétude là-dessus», précise-t-elle. La pression de la société ne pèsera plus sur ses petites épaules de jeune «proie» dévorée par tous les regards. Sa date de mariage est fixée, le 21 juillet prochain. Alors oui, quoi qu’on puisse dire, être femme en Algérie est toujours une question de mariage. Petite précision : Selma adore son futur mari.  
 


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