Algérie

Secteur industriel Des frémissements mais trop d'inertie encore



A trois ans seulement de la date limite de l'objectif fixé, somme toute modeste, de faire contribuer le secteur industriel à10% du produit intérieur brut (PIB) nous en sommes toujours en ce dernier trimestre 2011 à la moitié (5%). Les quelques progrès enregistrés dans certaines branches sont encore limités et ne pèsent ni suffisamment, ni n'ont un effet d'entraînement, sur l'ensemble du secteur industriel. Néanmoins ils indiquent qu'il est possible de faire mieux - et plus vite- dans d'autres branches industrielles à fort potentiel de croissance, inertes encore sous le poids des rentes, de l'obsolescence des équipements et de pratiques institutionnelles et managériales inadéquates.
Voyons d'abord les quelques progrès enregistrés par certaines branches pour en tirer quelques enseignements utiles pour celles qui sont encore en léthargie ou même en régression.
Les industries agro alimentaires (IAA) méritent une attention particulière en rapport avec la problématique sensible de la dépendance alimentaire. Les IAA méritent aussi notre attention parce qu'elles représentent 40% de l'emploi industriel global, avec 140 000 salariés dans 17100 entreprises qui réalisent 50% du PIB du secteur industriel (hors hydrocarbures). L'Office national des statistiques (ONS) nous indique que les IAA ont fait 26,4% de croissance au premier semestre 2011. Les deux tiers des entreprises de la branche ont produit aux trois quarts de leurs capacités. A l'intérieur de la branche, certaines filières font mieux que d'autres. Ainsi la filière du lait a réalisé au premier trimestre 2011 le taux de 37,5% de croissance après une hausse de 10,6% sur l'année 2010. Cependant même si l'activité de conservation de fruits et légumes a progressé de façon exponentielle avec 130,5% de croissance durant le trimestre 2011, il y a un bémol. Ainsi les professionnels de la tomate industrielle qui s'étaient engagés à produire 60 000 tonnes de double concentré de tomates en 2011 n'en produiront finalement que la moitié pour des besoins du marché national estimé à 90 000 tonnes. Je reste cependant persuadé qu'il pourront faire mieux pour les prochaines saisons. Car ce n'est par hasard que la conserverie Soumaa de la commune d'El Eulma (Annaba), dirigée par Missaoui Dahoui, a reçu le premier prix (médaille du mérite) du concours organisé par l'Organisation arabe du développement agricole (OADA). On retrouve d'ailleurs d'autres bons indicateurs de performance des IAA dans leur contribution aux exportations hors hydrocarbures. Les montants de exportations hors hydrocarbures sont ainsi passés de 41 millions d'euros en 2009 à 267 millions d'euros en 2010 selon Mohamed Benini, directeur général d'Agence algérienne de promotion du commerce extérieur (ALGEX).Il fallait relever cela même si le bond enregistré est en grande partie dû à la mise en service d'une usine de sucre et l'exportation réussie de sa production. Mais en même temps cela met en exergue la nécessité d'avoir des productions nationales agricoles en amont de qualité et en quantité suffisante. Les développements réussis récents de certaines productions agricoles dans les territoires, comme la pomme de terre produite à El Oued à hauteur du tiers de la production nationale, peuvent être obtenus ailleurs. Mais les IAA devront, avec les producteurs, mettre en place la chaîne logistique de façon concomitante.
Voyons maintenant les branches où cela patine malgré quelques percées. La percée d'abord. La filière mécanique et automobile n'a effectivement démarré que pour prendre en charge les besoins militaires avec le projet de Tiaret (véhicules militaires et engins blindés) et celui de Constantine (véhicules légers et véhicules blindés). Les associations réalisées à cet effet sont intéressantes car elles regroupent outre la partie algérienne, le fonds souverain émirati Aabar Invesments et cinq groupes industriels allemands de premier plan dont Man et Daimler. Quant au grand projet structurant de véhicules de l'association SNVI avec le constructeur français Renault il met du temps à se mettre en place. Il me semble que, par anticipation, la mise à niveau des entreprises sous traitantes devrait être engagée sans plus attendre d'autant que le financement public est disponible et que le réseau de ces dernières est déjà organisé et opérationnel autour de l'Union professionnelle de l'industrie automobile et mécanique (UPIAM).Cela peut servir d'exemple pour d'autres programmes de mise à niveau industrielle.
Il y a ensuite deux branches dérivées des hydrocarbures, qui ont un grand effet d'entraînement sur les autres secteurs économiques mais qui pourraient contribuer davantage à la croissance de ces derniers. D'abord celle de l'industrie des engrais qui était engagée depuis au moins une décennie dans des programmes variés de partenariats. Les investissements et les productions prévues ne sont pas au rendez vous. Aussi des bilans doivent être produits afin de soutenir, ou à l'inverse infléchir, les tendances en cours pour les projets déjà engagés ou à venir J'ai pu par exemple observer dans les wilayates du Sud et des Hauts Plateaux, mais aussi ailleurs dans le pays, les prix élevés des engrais rendus aux agriculteurs. Cette problématique doit être posée et traitée car on ne peut vendre sur le marché national des produits aux prix internationaux alors que la matière de base est soutenue en amont au profit des industriels (prix du gaz naturel). Cela est valable pour la deuxième filière celle de la pétrochimie dont il faudra également faire le bilan. Celui d'abord des projets contractés ou engagés pour reconsidérer, s'il le fallait, les nouvelles conditions contractuelles de réalisation de l'ensemble du programme pétrochimique. Là aussi il sera difficile de vendre à la filière algérienne de plasturgie, particulièrement dynamique elle aussi, des produits pétrochimiques aux prix internationaux alors que les intrants comme le gaz naturel ou même l'éthane sont délivrés aux usines de pétrochimie de base à des prix soutenus. En tout cas un débat devra être ouvert avec les associations professionnelles sur ce sujet.
Dernier point les retards considérables pris par la filière ciment qui dispose non seulement du marché mais des intrants disponibles(calcaire) à des prix soutenus (gaz naturel). Le minimum à demander à cette filière est qu'elle réalise ses engagements de faire passer la production actuelle de 11,5 millions de tonnes à 20 millions de tonnes en 2015.
En conclusion, et pour tout dire, je vois mal comment pourrait-on construire une nouvelle industrie nationale des énergies renouvelables dont le programme a été arrêté (120 milliards de dollars d'investissements pour produire 22 000 mégawatts à l'horizon 2030 dont la moitié pour l'export) si déjà on traîne les pieds pour booster nos industries classiques ' Sujet à méditer par tous.


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