Sculpture. Un bronzé sculpteur de bronze
De la terre au bronze ! C?est l?étrange itinéraire d?un quinquagénaire, 57 ans, auteur aujourd?hui de « plusieurs pièces ouvragées » - il ne veut pas encore parler d?« ?uvres » - que convoitent nombre d?entrepreneurs et de directeurs de galeries d?art aux Emirats. Des ?uvres que découvrent maintenant des espaces au Canada et en France, par la grâce de relations personnelles de l?artiste et qui déclarent vouloir l?aider à faire sortir ces sculptures du pays. « J?aime mon pays et j?ai déjà exposé dans un des pays du Golfe mais je préfère encore m?abstenir de rôder autour de rapaces », confie Smaïn Meziane lors d?une visite qui lui a été rendue en son domicile. Une vingtaine de sculptures rassemblées en paires thématiques trônait au salon où l?ameublement, réduit à sa plus simple expression, relevait encore davantage la valeur des « pièces ». Art et matière, La Belle et la bête, la Dérive des hémisphères : quelques-unes des sculptures ouvragées à la main sur une matière difficilement malléable ; bronze, acier, étain ainsi qu?une tour de dentiste, et c?est un grand-père de deux enfants qui s?isole des heures, quelquefois des jours, avant de revenir avec des silhouettes en trois dimensions, commencées par des caricatures et provenant d?idées triturées par un cerveau qui ne cesse plus de ruminer. « Je suis blousé et blasé par ce monde et je préfère me retirer en douceur, ne pas avoir à contacter cet être humain qui n?est plus le même. » Smaïn sait que « la quiétude de son existence se trouve gravement altérée » - il est poète aussi, et un recueil attend dans les tiroirs une improbable publication - mais se découvre davantage une âme de sculpteur après avoir tenté diverses expériences pour apprivoiser la terre. « J?ai obtenu mon ingéniorat en 1977 et on m?avait mis dans un bureau où j?ai moisi durant dix années, période entrecoupée par un 3e cycle à Montpellier. Une aubaine s?était alors offerte en 1987 avec le départ ??volontaire?? pour la création d?exploitations. Quelques années de bonheur avant la décennie noire du côté de Attatba, dans la wilaya de Tipaza, et la destruction de tout ce que nous avions alors investi. » Moment de long silence avant de poursuivre : « J?ai cédé mes parts en 2000 devant cette sensation de frustration, d?ailleurs, le règlement des litiges est toujours en cours et cet autre monde me jeta alors dans le refuge de cette matière que je découvris par pur hasard en manipulant un pilon. » Cet art avait donc nécessité pour lui une petite initiation chez un plombier pour les diverses soudures et une recherche documentaire qu?il ne trouvera qu?à travers quelques documentaires dans des chaînes thématiques. « Je n?arrive pas à trouver sur le support écrit de quoi satisfaire ma curiosité. » Symbolisme, art figuratif, surréalisme, l?artiste touche à tout et ne se gêne pas en se mettant debout devant un miroir et parler à son autre : « Je me remets en question, me pose des questions d?ordre universel mais je n?aime pas m?attarder. » Des ?uvres uniques peuplent sa demeure et l?homme ne veut s?en dessaisir. « Ce n?est pas que j?ai peur d?être floué ! Ces pièces me parlent et je leur cause. Il m?arrive de reprendre l?une d?elles pour prononcer davantage une forme, un détail. » L?artiste évoque avec amour quelques-unes des sculptures qu?il n?a encore jamais dévoilées : « Indifférence » : deux hommes assis sur un banc public et que tout sépare. L?un est d?aspect occidental, l?autre est Arabe et leurs regards sont diamétralement opposés ; chacun regarde vers un horizon autre, avec des intérêts nécessairement différents. La Dérive des hémisphères semble emporter la palme pour tout ce qui est exposé sur une des tables. On a l?habitude d?entendre parler de « dérive des continents » mais ses « paires » jouent sur les mots et les sens, au grand plaisir du visiteur.
Posté Le : 05/11/2007
Posté par : sofiane
Ecrit par : A. Mekfouldji
Source : www.elwatan.com