Algérie

Scénario pour un procès futur



arrêt sur image : la pulpeuse Tzipi Livni, au banc des accusés répondant de ses crimes de guerre pendant que des milliers de témoins défilent à la barre. Musique de fond : «Elle était si jolie» d'Alain Barrière sifflotée par Abul Gheit, les mains occupées à construire un mur de plus aux environs de Rafah. Effets spéciaux : des enfants palestiniens sortant en lumière d'un charnier tels des anges dans une procession en deux colonnes, l'une se dirigeant vers l'église de la Nativité, berceau de la chrétienté, et l'autre ouvrant les bras vers El-Aqsa, au Dôme impressionnant, pour une prière de vendredi.

 Traveling sur Charm Echeikh : réunion extraordinaire des ministre arabes des «affaires étranges» pour évaluer l'impact d'un procès en Angleterre sur le devenir de leurs pays respectifs d'abord, et sur le devenir de la nation arabe, sans Israël, ensuite. Zoom avant sur la délégation égyptienne assise derrière un bouquet de roses déchirant en petits morceaux un drapeau algérien en papier. Plan de coupe : la délégation saoudienne, emmitouflée dans ses robes longues, compte ses avoirs dans les banques anglaises sur un carnet de poche en se servant de ses orteils en guise de calculette. A sa gauche, la délégation soudanaise sort les dattes envoyées par les Biskris pour les remercier de leur hospitalité envers les supporters algériens. Gros plan sur une horloge parlante rappelant le changement de temps. C'est l'heure du repas et de la résolution de clôture. Amr Moussa donne rendez-vous pour une réunion prochaine en proposant l'Egypte comme pays d'accueil. Une fois de plus, l'ordre du jour épuisant n'a pas été épuisé.

 Le procès de Livni continue dans une salle de Westminster obscurcie par l'ancienneté des meubles et une tapisserie royale qui rappelle la naissance d'un Etat fort. Au pays de la Reine, le magistrat est roi. Dans la salle, des Palestiniens en keffieh en noir et blanc suivent pas à pas le procès. Une femme se lève et lance un « birrouh, biddem... », arrêtée par son voisin, qui a envie d'écouter les griefs reprochés pour son prochain livre. Il prend la moindre note, décrit le moindre geste en signe de témoignage par le texte. Par le seul texte. « L'Occident pour une fois a compris », écrit-il en marge pour rappel. Une fillette, blottie entre les seins de sa mère adoptive, pleure tous les membres de sa famille disparus dans un raid lancé par cette armée criminelle appelée «Tsahal» par sympathie, pour la doter d'un masque humain.

 Retour sur un génocide : des maisons en feu, des routes cassées, des écoles détruites et des corps gisant dans une mare de sang, aussi grande qu'une mer. Plongée, contre-plongée sur des corps enterrés vivants sous le poids de bombes à fragmentation lancées d'un ciel fait pour couvrir toute l'humanité et lui rappeler ses devoirs envers tous les prochains. Plus loin, des femmes et des hommes marchant, banderoles en main criant au crime. D'autres, avec d'autres banderoles en main, soutiennent honteusement l'assassinat d'enfants.

 Paris s'ouvre et se ferme comme un coquillage vide à tous, sans faire dans la distinction. Paris se la ferme, reçoit sur le perron de son palais la pulpeuse la bouche serrée et serre ses mains salies de sang. Et le rapport du juge sud-africain Richard Goldstone fut. Sud-africain blanc. Blanc et objectif. En sous-titrage : Israël coupable, Hamas coupable. Pour Hamas, l'accusation n'est pas un scoop, sauf que l'amalgame cette fois implique aussi les raisons d'une occupation par définition injuste. L'Egypte continue la construction d'un mur qui l'étouffera autant qu'il étouffera Ghaza. Les témoins sont gênants pour l'Histoire. Le procès dure le temps qu'il faut, le flegme anglais aidant. On passe en revue les détails et les détails des détails. On revoit les scènes par vidéo, on épluche les photos. Les audiences sont suspendues pour être reprises les lendemains. A la chambre des Communes, les représentants de la couronne et ceux du peuple essaient de changer les lois. Les débats se chauffent, les mains se lèvent et s'abaissent au gré des mots. La loi passe difficilement : on ne peut plus répondre à une accusation pour crime de guerre au pays des Beatles. Tzipi peut venir en Angleterre, assister à la fin de son procès par contumace. Aboul Gheit souffle et reprend sa maçonnerie contre les Palestiniens. Amr Moussa écrit aux membres de la Ligue pour leur rappeler la réunion. Ghaza restera sans réponse. Mais plus tard, bien plus tard, lorsque viendront d'autres générations qui auront su ce qui s'est passé, elles reprendront d'autres procès où Israël devra répondre, de même que ses complices arabes, d'un génocide qui aura conservé un goût de vengeance. Fin mais suite.








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