De notre correspondant à Paris
Merzak Meneceur
Le rideau est tombé ce samedi à zéro heure sur la campagne électorale pour le premier tour du scrutin de l'élection présidentielle. Un samedi donc sans discours ni sondages. C'est le moment de la dernière réflexion pour les électeurs indécis avant d'aller aux urnes demain afin de voter pour le candidat de leur choix sur les dix prétendants à la magistrature suprême. 44,5 millions de citoyens sont invités à s'exprimer à travers leurs bulletins de vote pour dégager les deux candidats qui arriveront en tête afin de se disputer le fauteuil présidentiel lors du second tour du scrutin fixé au 6 mai. Sarkozy, le président sortant, et Hollande, candidat socialiste, devraient être, sauf une énorme et grandiose surprise, ceux qui resteront pour le duel ultime. Derrière, les scores que réaliseront Jean-Luc Mélenchon, Front de gauche, qui a mené la meilleure campagne électorale pour passer de 3%, il y a quelques mois, aux alentours de 15%, selon les instituts de sondage, Marine Le Pen, extrême-droite, François Bayrou, centriste, et Eva Joly, écologiste, sont très attendus en raison de leur impact sur le report des voix le 6 mai.Au lendemain de cette fin de campagne électorale dominée par de nombreux thèmes économiques et sociaux, plusieurs observateurs et journalistes ont relevé l'évocation de l'Algérie par Nicolas Sarkozy à deux reprises, en moins d'une semaine, alors que les questions internationales n'ont pratiquement pas eu de place dans les préoccupations exprimées par les candidats. Pas parce que l'Algérie est redevenue comme par miracle ou amnésie de l'histoire un sujet interne. Mais parce qu'il y a la relation bilatérale dans le domaine de l'immigration. Considéré certainement par Sarkozy comme un sujet porteur, pouvant grignoter des voix du côté des électeurs du Front national (sinon pourquoi évoquer ce sujet maintenant et seulement l'Algérie '). Le candidat de l'UMP s'est exprimé pour la première fois sur une chaîne de télévision (i-télé) le vendredi 13 avril pour affirmer sa volonté, dans le cas de sa réélection, de renégocier les accords sur l'immigration passé «avec des pays amis» et «voisins», en citant nommément l'Algérie. «Après cinquante ans de décolonisation, il est temps de mettre les choses à plat», a-t-il déclaré, afin, entre autres volontés, de réduire par deux le nombre d'Algériens admis régulièrement en France. Le président sortant a remis une seconde couche dans l'hebdomadaire l'Express de cette semaine. «Cinquante ans après la décolonisation, il faut achever sans tarder, avec l'Algérie, la renégociation des accords préférentiels en matière d'immigration, qui datent de 1968», promet-il en précisant : «Nous imposerons à tous ceux qui veulent venir au titre du regroupement familial ou du mariage avec un Français, l'obligation : 1. d'avoir un logement, 2. d'avoir un revenu, 3. d'apprendre le français et les valeurs de la République avant d'entrer sur le territoire national.» Sarkozy oublie tout simplement que ces conditions qu'il compte imposer figurent déjà dans l'article 4 de l'accord algéro-français de 1968. Et même, avant d'imposer, il faut avoir l'accord d'Alger car il ne peut pas passer au-dessus du document qui lie les deux gouvernements, un document qui a connu depuis 68 trois avenants. Ce que ne dit pas Sarkozy est que l'Algérie et la France sont en négociations depuis deux ans pour «mettre à jour» l'accord relatif à la circulation, à l'entrée, au séjour et à l'emploi des travailleurs algériens en France et aux membres de leurs familles. Deux années de négociations sans succès car la philosophie qui anime les deux parties n'est pas semblable. Le souci de Paris est d'intégrer les immigrés algériens dans le droit commun qui est de plus en plus restrictif en termes de droits et d'avantages. Pour Alger, les rapports algéro-français dans le domaine de l'immigration, comme celui de la circulation des personnes, ne peuvent être banalisés en faisant fi des liens historiques et du partenariat d'exception qui définit les relations entre les deux pays. Ce partenariat d'exception ne peut être limité à la circulation des biens et des services en ignorant la dimension humaine ancienne, forte et dense qui existe entre les deux Etats, entre les deux peuples. C'est au nom de ces principes que l'Algérie a jusqu'à présent opposé une fin de non-recevoir aux requêtes de la France.Le quotidien Libération a qualifié les prises de position de Sarkozy de «nouvelle offensive contre les droits des immigrés», allant jusqu'à titrer un article «Immigration : l'Algérie dans la mire de Sarkozy». Jeudi dernier, Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères, qui participe à la campagne électorale de son président-candidat, a mis un petit bémol aux exigences de son chef en affirmant à propos de l'accord de 1968 : «On le renégociera ensemble. Ce n'est pas un diktat. Les relations avec l'Algérie sont bonnes. On sait ce que sont les relations franco-algériennes, elles sont épidermiques», a-t-il ajouté en guise d'apaisement. Il aurait peut-être mieux fait de conseiller Sarkozy à laisser hors campagne électorale l'Algérie et son immigration.
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Posté Le : 20/04/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : M M
Source : www.latribune-online.com