Sarkozy écrit à Bouteflika

La relation d’»exception» doit être une «priorité commune» Quelques jours seulement après son investiture à la tête de l’Etat français, le président Nicolas Sarkozy donne le ton de ce que pourraient être les relations entre Paris et Alger. La suite logique de la politique du président Chirac si on met de côté les discours de campagne destinés surtout à la consommation interne. Le tout nouveau président français prêche, en effet, pour l’approfondissement de la relation d’»exception» entre l’Algérie et la France qui «doit constituer une priorité commune». Ce premier «contact» du président Sarkozy intervient dans une lettre qu’il a adressée au président Bouteflika suite au message de félicitations de ce dernier au lendemain de l’élection de M. Sarkozy, le 6 mai dernier. «Comme vous, je suis convaincu que l’approfondissement de la relation d’exception entre l’Algérie et la France doit constituer une priorité commune, car il répond aux attentes de nos deux peuples et pourra, j’en suis sûr, servir de modèle aux rapprochements nécessaires de part et d’autre de la Méditerranée», écrit le chef de l’Etat français. Emotif, comme décrit par ses proches, il en a fait, une nouvelle fois la preuve, Sarkozy se dit très sensible au message qu’a adressé le président Bouteflika. «Vous avez bien voulu m’adresser une lettre de félicitations après mon élection à la présidence de la République française. J’y ai été très sensible et je vous en remercie chaleureusement». Une occasion propice pour marquer les orientations futures qui régiront les deux pays. Nicolas Sarkozy en a donné le ton dans son premier discours lorsqu’il a clairement identifié les objectifs à atteindre par son pays, notamment dans le bassin méditerranéen, en affirmant vouloir travailler pour une Union méditerranéenne à l’image de l’Union européenne appelant, au passage, les pays de ce pourtour à dépasser les haines et les rancœurs, allusion claire faite à l’Algérie. Ce message a été accueilli favorablement par Alger, puisque deux jours après, le président Bouteflika, à l’occasion de la commémoration des massacres du 8 mai 1945, l’a clairement signifié. «Bien sûr, nous ne devons pas voir le présent et l’avenir seulement avec les yeux d’un passé traumatisant. En deux générations d’indépendance, notre pays a pansé la plupart de ses blessures, et pour l’essentiel il est sorti de la nuit coloniale». Une façon de signifier que les rapports peuvent être cordiaux à condition que les nostalgiques de l’Algérie française «se tiennent à carreau» et pour les historiens faire leur travail. Le travail de mémoire. Cette lettre de Sarkozy à Bouteflika a le mérite de clarifier les choses car le président français se montre intéressé par une coopération empreinte de sérieux et de respect. Chose que l’Algérie n’a jamais cessé d’appeler de ses vœux. «Les relations entre nos deux pays sont essentielles et vous trouverez en moi un interlocuteur soucieux de les renforcer encore, dans cet esprit de coopération et de respect mutuel auquel nous sommes tous deux attachés», a souligné le président français. Un peu plus loin, le chef de l’Etat français précise un peu plus ses ambitions en indiquant qu’avec «les pays de l’espace méditerranéen, je souhaite, en effet, que nous bâtissions une union pour relever ensemble, et avec succès, les défis qui nous sont communs», ajoutant que «dans cette entreprise ambitieuse et tellement nécessaire, je sais que je pourrai compter sur votre soutien et sur votre détermination». Sarkozy évite de parler de traité d’amitié, sachant que l’Etat algérien ne se déjugera pas et n’abandonnera pas sa revendication de voir la France demander pardon. Le partenariat d’exception et l’Union méditerranéenne semblent être un bon compromis pour les deux parties car les domaines de coopération entre les deux pays sont aussi vastes que nombreux. Farida Kadache