Algérie

Santé: Les médicaments essentiels en question



Les «médicaments essentiels» ont été, hier, au centre d'exposés et de débat de et entre les professionnels de la santé qui ont appelé à l'élaboration d'une liste de ces produits en fonction de données entre autres, «déterminer avec chiffres à l'appui la prévalence des maladies morbides dans le pays».La journée d'hier a, en effet, été dédiée aux «Médicaments essentiels : pour un meilleur accès aux soins» dans le cadre d'une rencontre nationale organisée par le ministère de la Santé en partenariat avec le Pnud et l'Union européenne et en présence «des principaux acteurs, secteurs et partenaires nationaux et internationaux intervenant dans le domaine pharmaceutique». La rencontre, disent ses organisateurs, a «pour objectif de faire le point sur les enseignements tirés de la mise en ?uvre de la stratégie nationale de gestion des médicaments essentiels, et permettra aussi d'exposer les potentiels leviers d'action, les enseignements et les outils permettant d'améliorer l'accès à ces médicaments». En ouverture des travaux, le ministre de la Santé, Abdelhak Saïhi, a affirmé que «les pouvoirs publics préparent une feuille de route pour la prise en charge du malade et le plan de travail que nous avons arrêté fait partie de cette vision prospective qui vise à fournir et à garantir les meilleurs services à nos malades». A propos des médicaments en général et ceux «essentiels», le ministre rassure «au regard de l'importance du sujet relatif à la disponibilité des médicaments» de «la détermination des pouvoirs publics à déployer un maximum d'efforts pour lui trouver des solutions garanties et durables dans ce cadre».
A l'attention des professionnels de la santé, Saïhi souligne que «la levée des contraintes qui entravent la garantie, la rationalisation, la qualité et la distribution des médicaments en général, se fera grâce à votre participation et à vos propositions(...)». Il estime qu' «il ne suffit pas aujourd'hui pour nous d'évaluer ces travaux mais nous nous devons aussi de tracer une véritable stratégie qui prend en charge la gestion effective des médicaments essentiels(...), il nous incombe de travailler sans délais pour donner les meilleures solutions aux équipes de soins en matière de disponibilité des produits pharmaceutiques et mettre en service toutes les techniques modernes susceptibles de prendre en charge cette préoccupation».
Diagnostic «d'un droit fondamental»
C'est le professeur Djamel-Eddine Nibouche, expert clinicien en cardiologie qui a cerné la problématique des «Médicaments essentiels» qui, dit-il, «sont prioritaires pour l'OMS et répondent aux besoins de santé par un accès facile pour les malades». Il évoquera, entre autres, «la nécessité d'une définition des médicaments essentiels par une approche scientifique de la question et non administrative, parler de la qualité, est-ce qu'on gère comme il faut (...), un produit pharmaceutique comme un produit marchand alors qu'il y a une nette différence, il y a l'urgence de son acquisition». Il estime qu' «il faudrait singulariser le médicament et le laisser loin de la bureaucratie». Il le qualifie «d'extrêmement stratégique en matière de politique de santé d'un pays». Il est impératif pour lui de «définir un médicament essentiel parce qu'il soulage, participe au diagnostic réel dans certains cas et prévient certaines maladies». Il souligne alors que «les médicaments essentiels le sont pour la majorité des citoyens, donc ils doivent être disponibles». Et «plusieurs parties doivent intervenir pour les garantir, il est vrai que c'est complexe», juge-t-il. Il a fait savoir qu' «en 2005, l'OMS a déclaré que l'accès au médicament essentiel est vital parce qu'il sauve des vies et améliore la santé». L'Organisation mondiale de la santé l'a donc, dit-il, «reconnu comme un droit fondamental et incontournable même pour les gens qui n'en ont pas les moyens». Ainsi, précise-t-il, «c'est devenu une préoccupation(...), son utilisation rationnelle (impose) l'intérêt pour sa gestion».
Pour en assurer la disponibilité, Prof Nibouche pose des conditions «il faut traiter les besoins prioritaires d'un pays, déterminer la prévalence des maladies morbides, il faut des chiffres réels, d'actualité, sélectionner les médicaments en fonction de leur innocuité, leur efficacité, favoriser leur fabrication, leur achat rationnel, à un prix abordable (...)». Il note que «la sécurité sanitaire d'un pays c'est de pouvoir fabriquer l'ensemble des médicaments essentiels». Il affirme à cet effet qu'«il nous faut des outils de conception adaptés à nos possibilités, à la situation sociale du pays». Nibouche recommande pour cela «un guide pratique renouvelé dans le temps et la base c'est d'avoir une liste des médicaments essentiels, un véritable répertoire, les textes existent en Algérie ainsi que le comité d'experts pour les choisir». Il indique que «l'OMS publie régulièrement depuis sa première liste établie en 1977 et la renouvelle tous les deux ans». Et «chaque pays est encouragé à préparer sa liste». Il estime qu' «on doit l'avoir et l'actualiser tous les deux ans mais pour le moment elle n'existe pas».
Le professeur Amar Tebaiba, expert clinicien en médecine interne a abordé pour sa part la problématique des «médicaments innovants» qu'il qualifie de «2ème liste, complémentaire» aux médicaments essentiels, et «qui doit exister au niveau des CHU pour soigner les maladies dans les spécialités». Il pense que «l'hôpital germano-qatari en construction en Algérie fournira des soins de hauts niveaux pour lesquels on aura besoin de médicaments innovants». Il note que «la liste de médicaments essentiels doit passer par plusieurs niveaux, leur classification se fait à partir de protocoles thérapeutiques précis, ils sont obligatoires». Pour cela, «on doit avoir nos propres instituts de santé, on les a négligés en Algérie, le CPMC en est un devant donner des protocoles, des stratégies(...)».
«42% des médicaments contrefaits sont sur le marché africain»
Pour Prof Tebaiba, «cette complexité en matière de santé ne peut pas être résolue par une simple liste élaborée par des experts, il faut d'abord définir qu'est-ce qu'un expert...». Il recommande «un protocole national, un médicament national, l'institut de santé publique doit jouer pour cela un rôle fondamental». Le ministère de la Santé supervise à ses yeux «la gestion des médicaments dans laquelle il faut inclure tous les acteurs, y compris les assurances». Il existe, dit-il, «1438 médicaments essentiels, les médicaments innovants apportent un plus là où le médicament chimique a échoué».
La «médecine de précision» sera exposée par le professeur Reda Djidjik, doyen de la faculté de pharmacie d'Alger et expert en immunologie. C'est pour lui «une médecine personnalisée (relation très étroite entre le médecin et le patient)», ceci, «pour éviter de donner le même médicament à la même maladie».
La «précision» signifie, selon lui, «des médicaments spécifiques pour chaque cas, un ciblage de patients, ce qui donne une médecine stratifiée, génomique(...), avoir une masse de données pour chaque patient». Il affirme que «pour avoir une médecine de précision, il faut tout revoir, c'est une médecine d'aujourd'hui et non de demain». Ses projets «construction d'une usine-école pour des métiers de produits pharmaceutiques, mise en place d'une plate-forme génomique et des masters bioinformatiques».
En visioconférence, les participants ont écouté à partir de Copenhague, Rodney Gallway, expert à la Centrale d'achat du Pnud «agent d'approvisionnement pour l'achat mondial». Il a fait état «des différents risques dans les achats publics de médicaments» à travers «le coût, l'efficacité, le transport, la gestion des stocks qualitatifs et quantitatifs», le tout devant répondre à «des procédures d'achats publics transparentes». Gallway a fait savoir que «42% des médicaments contrefaits sont sur le marché africain, notamment en Afrique subsaharienne».


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