Algérie

Santé: La cherté des médicaments anticancéreux est un faux débat



? La cherté des médicaments innovants est «un faut débat», a estimé hier mardi le président de la société algérienne d'oncologie médicale, le professeur Kamel Bouzid, selon lequel les malades «ont le droit d'être traités où ils veulent».Il a expliqué à la radio nationale que ce type de médicaments a été déjà demandé par les spécialistes à partir de 2010 sous la forme d'ATU (autorisation temporaire d'utilisation), et ‘'d'autres médicaments se sont rajoutés selon les thérapies''. Le Pr Kamel Bouzid a rappelé que trois chefs de services ont demandé des ‘'ATU'', au moment où les autres responsables de services de traitement du cancer avaient refusé ce type de thérapie, ce qui avait conforté dans ses choix de bloquer les ‘'ATU'' la pharmacie centrale.
Selon le Pr Kamel Bouzid, l'ATU revenait déjà à huit millions de dinars. ‘'On se bat depuis huit ans, a-t-il dit, pour ces médicaments, qui étaient sous ATU et n'ont pas été renouvelés depuis 2016''. Et, ‘'finalement, ces blocages ont été levés par le ministre la Santé depuis janvier 2018 et on a commencé à faire nos commandes, mais on s'est heurtés à un problème de budget, ce sont des médicaments qui coûtent très cher et n'ont pas été prévus pour 2018'', explique le président de la société algérienne d'oncologie, selon lequel ‘'il y a eu une réflexion au ministère et on a eu comme consigne de la part du ministre de veiller à optimiser l'utilisation de ces médicaments''. Le Pr Kamel Bouzid a souligné que pour l'immunothérapie, il y a deux médicaments pour trois localisations (le cancer du poumon, une tumeur de la peau et le cancer de la vessie et des voies extractives). ‘'Nous avons veillé à ce qu'il n'y ait pas d'extension de localisation, et pour le moment, il n'y a que ces trois extensions et pas de prescription abusive (aux Etats-Unis il y a 12 prescriptions), avec une hospitalisation et une disponibilité du personnel H24, et sur place''. Il a également affirmé, quant à la disponibilité de ces médicaments, que ‘'la consigne est que l'opinion publique soit rassurée, il n'y a pas de médecine à deux collèges, tous les patients algériens qui le nécessitent auront ce médicament, en temps et en lieu dans leur localité'', avant de relever que ‘'la polémique est que certains ont dit aux laboratoires de ne pas nous fournir pour devenir des centres de référence''.
Pour dispenser ce type d'immunothérapie et avoir accès à ces médicaments innovants, qui coûtent très cher, six centres ont été retenus, selon le Pr Kamel Bouzid : le CMPC d'Alger, l'EHS anti-cancer Emir Abdelkader de Misserghine de la wilaya d'Oran, le centre hospitalier Didouche Mourad de Constantine, le centre anti-cancer d'El Oued, le centre anti-cancer d'Adrar ‘'et probablement le centre anti-cancer de Laghouat pour couvrir tous nos compatriotes du Sud''. Pour autant, il a estimé que ‘'du point de vue thérapie médicamenteuse, l'immunothérapie ne va pas remplacer du jour au lendemain les médicaments classiques, c'est-à-dire la chimiothérapie, l'hormonothérapie, les thérapies ciblées. Il y aura probablement un combo, une association d'immunothérapie et chimiothérapie dans le cas du cancer du poumon et les résultats publiés par nos collègues occidentaux et asiatiques sont impressionnants''. Et, sur le plan financier, il concède que les traitements innovants dans le cas du cancer ‘'sont très coûteux: entre 20.000 et 100.000 euros par an et par personne. Le flacon d'un des médicaments coûte 2.463 euros, et il faut deux flacons pour faire un cycle. C'est effectivement onéreux, mais attention, il ne faut pas qu'on déplace le débat, les thérapies ciblées atteignent aussi ces chiffres, on a utilisé un médicament pour le cancer du rein en 2006 à Oran et ce médicament coûte 6.000 euros le mois de traitement pour une durée de 12 à 15 ans pour une personne, et donc pour un patient c'est un million d'euros.'' ‘'Le débat sur le coût direct est un faux débat'', estime le Pr Kamel Bouzid selon lequel ‘'l'intervention de la sécurité sociale est une solution pour pallier à ce coût faramineux''.
A la fin du mois d'octobre dernier, le Dr Farid Benhamdine, président de la société algérienne de pharmacie, avait relevé que ‘'les produits innovants ne sont que des produits nouveaux seulement. Oui à l'innovation, mais ce que nous contestons, c'est le prix de l'innovation qui est très cher, parce qu'on valide des molécules qu'on dit nouvelles avec une thérapie extraordinaire'', avait-il souligné.
Les patients ont le droit d'être traités où ils veulent
''On gagne six mois, trois mois, au moins un an ou deux ans, mais c'est le prix qu'il faut revoir'', relève le Dr Benhamdine, estimant que ‘'ce prix est évalué par rapport aux dispositions à payer pour une année de survie par rapport aux produits anciens''. Par ailleurs, le président de la société algérienne d'oncologie médicale a relevé, concernant le discours officiel sur la prise en charge de traitement onéreux, qu'''à aucun moment il n'a été question de dire qu'on va faire des économies sur cet aspect. Par contre le discours actuel, c'est que le ministre de la Santé a constaté qu'il y a des gaspillages dans la thérapie ciblée et il a dit que c'est le moment d'arrêter de gaspiller et de jeter des médicaments qui coûtent plus de 6.000 euros à la poubelle.'' ‘'Le discours officiel du ministre de la Santé est de dire qu'il faut rationnaliser et optimiser, c'est pour cela qu'on a désigné ces six centres d'immunothérapie'', précise-t-il.
Sur l'évolution de la maladie en Algérie, de 41.870 cancéreux en 2015, les proportions vont augmenter dans les prochaines années à 49.000 en 2020 et 61.000 en 2025, et selon le Pr Kamel Bouzid, ces proportions peuvent atteindre un ‘'pic'' de 70.000 malades en 2025 ‘'sur la base d'un taux d'accroissement annuel de 7,5%''. ‘'Le nombre importe peu, et ce qu'il convient de faire est de prendre des mesures préventives dont le dépistage, la prévention primaire comme le changement des habitudes alimentaires'', recommande le Pr Kamel Bouzid pour qui ‘'le dépistage permettra de faire des économies en termes de thérapies lourdes'', avant de conseiller de ‘'revenir à nos habitudes alimentaires des années 1970''. Concernant le plan national anti-caner, il a rappelé qu'il y a actuellement 17 centres publics fonctionnels et six centres privés dont certains sont conventionnés pour certaines catégories sociales de la population. ‘'Nous sommes très loin de la crise des années 2010-2012, on peut espérer qu'à la fin de 2019, les nouveaux centres seront fonctionnels comme ceux de Laghouat, Adrar et El Oued pour éviter que les gens du Sud se rendent à Alger ou dans les villes du Nord''.
Le Pr Bouzid a également souligné que les délais pour les rendez-vous ont été significativement réduits, ‘'il y a une amélioration, à Annaba, Sétif, Laghouat, Sidi Bel-Abbès, Tlemcen, le RDV c'est demain matin. A Blida et le Centre Pierre et Marie Curie d'Alger, ils sont encore entre deux à six mois pour les RDV''. Pour lui, ‘'il y a une habitude à se concentrer sur Alger'', avant d'affirmer que ‘'le patient atteint de cancer a le droit de choisir où il veut être traité, sans exhiber un S12 pour prouver son lieu de résidence‘'. ‘'Il est de Béjaïa ou de Tizi Ouzou et il veut être traité à Alger, il en a le droit et on n'est pas obligé de l'envoyer à Sétif, ça c'est pour les bureaucrates de la médecine, ce n'est pas fait pour des médecins'', a-t-il accusé.


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