Algérie


Santé
Les prélèvements et greffes de tissus ou d'organes ne sont plus une chirurgie extraordinaire dans la grande majorité des hôpitaux et cliniques à travers le monde. Il ne va pas sans dire que des résistances sociales, culturelles ou même techniques y subsistent encore. Dans le contexte algérien, elles sont plus persistantes et indociles au changement.Naouel Boukir - Alger (Le Soir) - Le CHU Mustapha et le Comité de greffe ont organisé, hier, une journée thématique axée sur les prélèvements d'organes et de tissus, avec la contribution de l'expérience française en la matière. Une conférence baptisée «sous le patronage du ministère de la Santé» qui n'a pas vu la présence de son ministre pour lequel une allocution d'ouverture a été prévue, pourtant, dans le planning de l'évènement.Parlant d'une thématique stratégique pour l'amélioration de la santé publique, le professeur Denis Glotz de l'hôpital Saint-Denis, Paris, a exposé l'importance de la stratification du risque et le management de la greffe. Qu'elle soit rénale ou autre, le succès de toute transplantation est intimement dépendant d'un ensemble de conditionnalités liées au donneur, au receveur, ainsi qu'aux circonstances de son déroulement. A rappeler qu'une greffe peut se faire à partir d'un donneur, effectivement, vivant ou en état de mort encéphalique, autrement dit cérébrale, ou bien, décédé suite à une crise cardiaque. Ce dernier cas étant de nature plus complexe à traiter.Pourquoi les prélèvements sur donneurs décédés sont-ils globalement en croissance'Non pas que ce soit une tendance d'instrumentalisation du corps humain ; bien au contraire, il s'agit de considérations tout à fait cartésiennes qui expliquent la hausse des prélèvements sur des donneurs décédés. En effet, «nous sommes face à une croissance soutenue de la demande de greffe», a affirmé le professeur Laurent Jacob de l'hôpital Saint-Denis. Le déficit en dons d'organes se creuse continuellement. Conséquemment, les donneurs vivants ne sont plus en mesure de couvrir la totalité des besoins exprimés. Aussi, il serait plus rationnel d'effectuer un prélèvement sur un individu décédé puisque l'organe ou le tissu n'est plus susceptible d'être utilisé que de le faire sur un donneur vivant et de l'en priver. Ceci étant plus déterminant quand il est question d'organes vitaux.En Europe, plus des 72% des prélèvements sont faits sur des donneurs décédés ; ce taux est de près de 60% aux Etats-Unis. Ce mouvement est inversé pour ce qui est de l'Asie, et de l'Afrique notamment, où ce type de prélèvement est quasi inexistant.Quelles précautions techniques et socioculturelles 'Comme pour toute chose, l'information est au cœur du succès de toute greffe. C'est dans ce sens que les deux intervenants français ont souligné l'aspect décisif de la récolte des données et antécédents médicaux concernant les receveurs et les donneurs avant de procéder à la greffe. Evidemment, pour une meilleure prise en charge, la biopsie est souvent «nécessaire», voire «toujours systématique», a précisé D.Glotz. L'étape de la réanimation est également essentielle pour ce type d'intervention, particulièrement. Toutefois, il est à noter qu'un rejet n'est pas «catastrophique», selon le conférencier. Ceci, si ce désagrément est traité «àtemps».Vraisemblablement, l'aspect socioculturel s'opposant aux dons d'organes demeure le plus complexe. Partageant l'expérience française, L. Jacob a déclaré que sur les donneurs recensés, seulement 50% sont des donneurs prélevés. Les oppositions familiales et les pressions exercées par l'entourage du donneur l'empêchent de procéder à l'intervention. Selon ce dernier, fréquents sont les cas où des familles ont catégoriquement rejeté le don d'organes de leurs membres décédés ; sachant que ceux-là mêmes avaient exprimé verbalement leur consentement avant leur décès. Surtout que la législation française ne retient que l'accord du concerné direct par le prélèvement.Pour ce qui est du contexte algérien, «cette fébrilité doublée d'une résistance collective est poussée à l'extrême», a affirmé le corps médical du CHU. Effectivement, outre l'aspect «émotionnel» de l'entourage du donneur, il existe un véritable lobby extrémiste répandant des pensées religieuses infondées sur les dons d'organes. Particulièrement pour ce qui est du prélèvement sur donneurs décédés. C'est pourquoi, le comité de greffe est conscient que vaincre «ces acquis faussés» nécessite un travail de sensibilisation et de communication coordonné de plusieurs années, et que ces mentalités ne changeront pas par une simple campagne.




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