Algérie

Sans hausse de son prix, la crise du carburant ne fait que débuter en Algérie Analyse éco : les autres articles



A la crise de l'électricité de l'été 2012 succède celle du carburant de l'été 2013. Tableau comparable. D'un côté une offre de produits raffinés et de Kilowatts-heure peu élastique, de l'autre une demande domestique débridée. Le reste est artifice de communication. Lorsque le ministre de l'Intérieur, Daho Ould Kablia, affirme que 25% de la production algérienne s'en va par les frontières, il fabule. Bien sûr, il ne pouvait pas le dire ainsi pour l'électricité. La progression du parc automobile ' 10% en moyenne annuelle sur les cinq dernières années, a été d'au moins cinq fois supérieure à celle du réseau de distribution des produits pétroliers, au moment où la capacité de raffinage a régressé pour cause de maintenance.Naftal , tout comme Algérie Télécom pour le déploiement de la fibre optique et l'internet² fixe, est un quasi monopole qui n'a pas les moyens managériaux d'accompagner une telle explosion de la demande. Que faire alors ' Attirer de nouveaux acteurs de la distribution de carburants afin de soulager Naftal larguée dans sa course contre la consommation galopante ' Il y a dix ans que la loi le permet. Quelques privés nationaux, notamment à l'ouest du pays, ont fait le grand saut pour construire de nouvelles enseignes de distribution de carburants.
Effet marginal. Les grandes compagnies ont boudé. Pour des raisons faciles à comprendre, les marges opérationnelles ne couvrent que de très peu l'investissement et les frais d'exploitation. Le prix du carburant, administrativement maintenu à son niveau d'il y a dix ans, n'est pas attractif pour se lancer dans la distribution en Algérie. Cette éviction de l'investissement étranger et privé national de grande échelle, n'est bien sûr pas le seul effet du soutien masqué du prix du carburant par le Trésor public algérien.
L'autre effet est, bien sûr, la surconsommation et le gaspillage. Spectacle de plus en plus fréquent par temps de canicule durant le Ramadhan : des conducteurs font, entre deux courses, la sieste dans leur voiture moteur et climatisation en marche. C'est un journaliste américain qui relevait, ébahi, que le peuple algérien fêtait tout en défilant des heures durant en voiture' victoire de l'EN, mariages'
Le trafic de carburant vers le Maroc et la Tunisie aggrave la tension dans les régions frontalières. Mais le déséquilibre offre-demande est national.
Daho Ould Kablia le sait. Mais préfère éluder la vérité. Car elle est symptomatique du système de rente qui a enflé ces dix dernières années. Les autorités algériennes vont finir par relever le prix des carburants. L'équation est ainsi faite. Elles sont difractées entre deux risques. Celui de subir des émeutes du carburant comme le début de Mad Max qu'a connu la pourtant paisible ville de Tlemcen il y a un mois. Ou subir des émeutes contre la hausse des prix du carburant comme cela s'est produit au Nigéria, en 2012. Le second risque est infiniment plus faible. Surtout si le réajustement du prix du carburant se fait progressivement sur trois ou quatre années.
Le fait est qu'il faut commencer dès la prochaine loi de finances. Le ministre du Commerce, Mustapha Benbada, a planté une banderille en affirmant qu'il fallait à terme arriver au même système de fixation des prix que celui au Maroc et en Tunisie. Sans subventions. Il a ajouté aussi qu'une telle mesure nécessitait du courage politique. Ce qui est dans le contexte de ces dernières années, la dernière denrée disponible dans la gouvernance algérienne. Le réajustement par le bas, autour du prix du gazole, est une priorité. Pour raisons économique, environnementale et souveraine. Réduction du gaspillage et de l'encombrement des routes, inversion de la diésélisation hyper-polluante du parc roulant conduite, sans prospective, dans les années 90, et réduction des importations palliatives au déficit de coupes lourdes à la sortie des raffineries algériennes.
Un litre de gazole à 20 dinars par augmentations successives sur trois années paraît être un socle supportable pour construire des écarts raisonnables avec le prix des carburants légers. La relance du GPL et l'incitation fiscale en faveur de l'hybride et du tout électrique devraient accompagner cette nouvelle politique des prix du carburant en Algérie. Le scénario vertueux est de voir Naftal débarrassée du fardeau du monopole sur le carburant sous subvention en Algérie, s'installer dans l'Est marocain et dans l'Ouest tunisien pour y distribuer, au nez des hallaba, des produits pétroliers légèrement plus chers que les prix domestiques algériens et légèrement meilleur marché que la concurrence dans ces pays voisins. Mais là nous travaillons sur un logiciel de la croissance partagée et ouverte que Daho Ould Kablia, retranché derrière sa frontière fermée et néanmoins passoire, a passé l'âge de comprendre.


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