Maintenant que l’euphorie de la libération s’est complètement dissipée, les jours commencent à devenir de plus en plus pénibles pour le Conseil national de transition (CNT), dont les responsables sont aujourd’hui ouvertement contestés par la population. Accusé d’«opportunisme» et violemment pris à partie jeudi par les habitants de Benghazi, le vice-président du CNT, Abdelhafid Ghoga, a fini par annoncer hier sa démission en direct sur la chaîne de télévision qatarie Al Jazeera.
«J’ai choisi de démissionner (...) dans l’intérêt de la nation», a-t-il déclaré à la chaîne par téléphone. M. Ghoga a expliqué qu’il n’y avait plus le même consensus autour du CNT et qu’il ne voulait pas que le conflit autour de sa personne ait un «impact négatif» sur le Conseil. «L’important c’est de préserver le CNT. Nous ne savons pas vraiment ce qui se passe», a-t-il dit, en faisant état d’«attaques contre les personnes (...), de campagnes contre certains» membres du CNT.
En réalité, les nouveaux dirigeants libyens sont sous pression depuis plusieurs semaines. La population leur réclame avec insistance plus de transparence et l’exclusion de tous les responsables de l’ancien régime. Samedi, presque 1500 personnes, dont d’anciens combattants rebelles blessés pendant la révolution, avaient manifesté devant le siège du CNT à Benghazi. Plusieurs grenades artisanales avaient été lancées sur le bâtiment avant que les protestataires ne l’envahissent et le saccagent.
La loi électorale rejetée
Les raisons de la levée contre la structure dirigée par Mustapha Abdeljalil sont nombreuses. Mais cette fois, il est surtout reproché au CNT de vouloir élaborer en solo la loi électorale qui régira l’élection, en juin prochain, de l’Assemblée constituante libyenne. Ce n’est pas tout : la mouture sur laquelle planche le CNT a particulièrement déplu à certains groupes de rebelles qui soupçonnent M. Abdeljalil de chercher à verrouiller le jeu politique.
Devant ce climat de défiance, le CNT a dans un premier temps décidé de se réunir hier dans un lieu tenu secret pour adopter cette loi avant de se raviser et de renvoyer au 28 janvier le réexamen du texte. «La loi électorale devait être annoncée aujourd’hui (hier, ndlr) mais certains articles doivent être réexaminés», a indiqué hier à la presse un membre du CNT.
Ce report, a fait savoir le Conseil, doit être consacré à prendre l’avis d’organisations de la société civile et d’experts, certains articles du projet de loi publiés sur internet ayant été contestés, comme celui réservant 10% des sièges de l’assemblée aux femmes.
L’article concernant le mode de scrutin et celui qui interdit aux personnes ayant occupé un poste de responsabilité sous Mouammar El Gueddafi de se présenter doivent eux aussi faire l’objet de nouvelles discussions, ajoute-t-on.
Sur le terrain, les pouvoirs du président du CNT se sont extrêmement affaiblis face à des milices qui refusent de déposer les armes et qui se battent entre elles pour le contrôle du territoire. Devant cet état de fait, certains observateurs n’excluent pas l’éventualité de voir Washington «l’épauler et de maintenir l’ordre» en envoyant sur place 12 000 soldats. C’est du moins ce qu’affirme le quotidien Al Quds Al Arabi dans un éditorial publié le 18 janvier. Si la situation de chaos perdure, les mêmes observateurs n’écartent également pas l’idée que les Etats-Unis érigent en Libye une base afin de sécuriser, au moins, les routes du pétrole.
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Posté Le : 25/01/2012
Posté par : sofiane
Ecrit par : Aniss Zineddine
Source : www.elwatan.com